Cour d’appel de Agen, le 2 juillet 2025, n°25/00426

L’article 462 du Code de procédure civile permet aux juridictions de rectifier les erreurs matérielles affectant leurs décisions. Par un arrêt du 2 juillet 2025, la Cour d’appel d’Agen illustre le fonctionnement de cette procédure, en corrigeant une erreur portant sur la dénomination d’un créancier dans le dispositif d’un précédent arrêt rendu en matière de surendettement.

Une banque avait été partie à une procédure de surendettement concernant un débiteur. Un arrêt rendu le 19 mai 2025 avait statué sur les modalités de remboursement des dettes de ce dernier. Le dispositif de cet arrêt comportait une erreur sur la dénomination de l’établissement bancaire créancier.

Par requête déposée le 21 mai 2025, soit deux jours après le prononcé de l’arrêt, la banque a sollicité la rectification de cette erreur matérielle. La requête a été communiquée aux autres parties, dont le débiteur représenté par avocat. Aucune observation n’a été formulée.

La Cour d’appel d’Agen devait déterminer si l’erreur invoquée constituait une erreur matérielle susceptible de rectification au sens de l’article 462 du Code de procédure civile.

La Cour constate que « l’erreur invoquée est avérée et doit être rectifiée ». Elle procède à la correction du dispositif en remplaçant les mentions erronées relatives à la dénomination du créancier, ordonne la mention de cette rectification en marge de la minute et laisse les dépens à la charge de l’État.

I. Les conditions de la rectification d’erreur matérielle

A. La notion d’erreur matérielle au sens de l’article 462

L’article 462 du Code de procédure civile autorise la juridiction à rectifier les erreurs et omissions matérielles affectant un jugement, même passé en force de chose jugée. Cette disposition constitue une exception au principe du dessaisissement du juge après le prononcé de sa décision.

La Cour retient que « l’erreur invoquée est avérée ». Cette formulation succincte traduit la nature même de l’erreur matérielle, qui doit être manifeste et ne résulter d’aucune appréciation au fond. L’erreur portant sur la dénomination d’une partie correspond parfaitement à cette définition. Il s’agit d’une simple inadvertance dans la transcription du nom du créancier, sans incidence sur le raisonnement juridique ayant conduit à la décision initiale.

La distinction entre erreur matérielle et erreur de jugement revêt une importance capitale. Seule la première peut faire l’objet d’une rectification, la seconde relevant exclusivement des voies de recours. En l’espèce, la solution retenue au fond demeure inchangée. La rectification ne modifie ni le montant des créances, ni les modalités de remboursement, ni la durée du plan. Elle se borne à identifier correctement le bénéficiaire des paiements.

B. La procédure contradictoire préalable

La Cour indique que « cette requête a été communiquée aux autres parties par lettres, ou par le RPVA pour les parties qui avaient constitué avocat, afin d’éventuelles observations ». Cette mention traduit le respect du principe du contradictoire, même dans le cadre d’une procédure de rectification.

L’article 462 prévoit que la rectification peut intervenir à la demande d’une partie ou d’office par le juge. Dans les deux cas, la jurisprudence exige que les parties soient mises en mesure de présenter leurs observations. Cette exigence procédurale garantit que la rectification ne porte pas atteinte aux droits des parties qui pourraient contester le caractère purement matériel de l’erreur alléguée.

La Cour précise qu’« aucune observation n’a été déposée ». L’absence de contestation corrobore le caractère évident de l’erreur. Si l’une des parties avait estimé que la modification sollicitée excédait le champ de la simple rectification matérielle, elle aurait pu le faire valoir.

II. Les effets de la rectification sur la décision initiale

A. La portée limitée de la correction

Le dispositif de l’arrêt rectificatif procède à des substitutions ponctuelles dans le texte de la décision du 19 mai 2025. La Cour dit que certains paragraphes sont « remplacés » par de nouvelles mentions comportant la dénomination exacte du créancier.

Cette technique de correction préserve l’intégrité du raisonnement juridique contenu dans l’arrêt initial. La rectification n’ajoute ni ne retranche rien au dispositif, hormis la correction de l’erreur de désignation. Les droits et obligations des parties demeurent strictement identiques. Le débiteur reste tenu de rembourser selon les modalités fixées. Le créancier conserve ses prérogatives, désormais attachées à sa dénomination correcte.

La jurisprudence constante de la Cour de cassation veille à ce que la rectification ne serve pas à modifier le sens ou la portée de la décision. Toute modification substantielle excède le champ de l’article 462 et doit être poursuivie par les voies de recours appropriées. L’arrêt commenté s’inscrit dans cette orthodoxie procédurale.

B. Les modalités de publicité de la rectification

La Cour ordonne « qu’il soit fait mention de cette rectification en marge de la minute du dit arrêt et des expéditions qui en seront délivrées, et dit qu’elles seront notifiées comme celui-ci ». Cette disposition assure la concordance entre la décision rectifiée et les exemplaires en circulation.

La mention marginale constitue le procédé technique permettant d’assurer l’unicité de la décision rectifiée. Elle évite la coexistence de versions contradictoires d’un même arrêt. Les expéditions délivrées postérieurement comporteront cette mention, garantissant ainsi la sécurité juridique des parties et des tiers.

La notification de l’arrêt rectificatif selon les mêmes modalités que la décision initiale assure l’information de toutes les parties. Cette publicité revêt une importance particulière en matière de surendettement, où de nombreux créanciers sont concernés par les mesures adoptées. La connaissance exacte de l’identité des bénéficiaires des paiements conditionne la bonne exécution du plan.

La décision de laisser les dépens à la charge de l’État traduit la nature spécifique de cette procédure. L’erreur rectifiée provient de la rédaction de la décision elle-même et non du fait des parties. Il serait inéquitable de faire supporter les frais de rectification à celui qui en sollicite le bénéfice ou à son adversaire.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

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