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Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 18 juin 2025. Un litige successoral oppose deux cohéritiers sur le rapport de libéralités et la valorisation d’actifs. L’assignation initiale n’a visé qu’un seul défendeur alors que les prétentions énonçaient des demandes impliquant deux bénéficiaires d’une donation. Le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence avait statué le 27 janvier 2020, en intégrant au dispositif des chefs relatifs à ces bénéficiaires non attraits. En cause d’appel, un avant-dire droit du 12 avril 2023 a invité les parties à débattre de la validité des actes de procédure, puis la clôture est intervenue le 23 avril 2025. La question portait sur la sanction d’une déclaration d’appel imprécise et, surtout, sur l’irrecevabilité d’une assignation qui ne met pas en cause toutes les personnes visées par les prétentions. La cour juge que la déclaration d’appel ne mérite aucune sanction, retient l’irrecevabilité de l’assignation, et en déduit l’annulation du jugement entrepris, avec condamnation aux dépens et au titre de l’article 700.
« Il convient de rappeler qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif. » La formation souligne aussi que « Les demandes de “donner acte” sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l’article 4 du code de procédure civile. » Elle précise encore l’office de l’appel en rappelant que « Par ailleurs l’effet dévolutif de l’appel implique que la cour connaisse des faits survenus au cours de l’instance d’appel […] même s’ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu’en cours d’instance d’appel. » Sur la recevabilité de l’appel, le dispositif tranche sans détour: « Juge que la déclaration d’appel n’encourt aucune sanction. » Enfin, la solution centrale est formulée avec netteté: « Cette irrecevabilité implique que le jugement attaqué est affecté d’un vice en justifiant l’annulation. »
I. La délimitation de la saisine et la déclaration d’appel
A. La rigueur du dispositif et l’épuration des demandes accessoires
La cour recentre l’office juridictionnel sur les prétentions, seules à figurer valablement au dispositif. En rappelant que « la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif », elle exclut les constats et “donner acte”, dépourvus d’effet utile. Cette mise au point sécurise la lisibilité de la décision, prévient les confusions exécutoires et impose aux parties un tri procédural. La solution, constante, renforce la distinction entre moyens, motifs et chefs, et confie aux motifs le traitement des éléments factuels et accessoires, hors de la partie exécutoire.
Cette rigueur se prolonge avec l’exclusion des demandes sans enjeu. La décision rappelle que « Les demandes de “donner acte” sont dépourvues de tout enjeu juridique », ce qui ferme la voie à des dispositifs encombrés. Le rappel de l’effet dévolutif parachève l’ordonnancement du débat. En indiquant que la cour connaît des faits survenus en appel, l’arrêt clarifie l’étendue du contrôle et la temporalité probatoire, sans diluer l’exigence d’une prétention clairement formulée et précisément étayée.
B. La souplesse encadrée de la déclaration d’appel imprécise
La cour admet la validité d’une déclaration d’appel qui n’indiquait pas, à l’origine, la voie de réformation ou d’annulation. La mention ultérieure, dans les premières conclusions, a suffi à lever l’ambiguïté. Le dispositif l’énonce: « Juge que la déclaration d’appel n’encourt aucune sanction. » La solution s’aligne sur la jurisprudence de la Cour de cassation du 25 mai 2023, qui consacre une logique de régularisation par les écritures, lorsque l’incertitude initiale ne porte pas atteinte aux droits de la défense.
Cette approche concilie sécurité et proportionnalité. Elle évite un formalisme excessif, tout en exigeant une clarification rapide dans le cadre de l’article 954 du code de procédure civile. La stabilité de la saisine tient ici au couplage entre l’acte d’appel et les conclusions, qui précisent sans tarder la portée du recours. La discipline du dispositif demeure la boussole, mais la sanction cède devant une régularisation effective et non dilatoire.
II. La nécessité d’assigner toute personne directement visée par les prétentions
A. Le principe d’appel en cause des personnes concernées
Le cœur du litige tient aux demandes visant une donation consentie à deux bénéficiaires non parties. La cour relève que les prétentions initiales entendaient voir “rappeler dans la succession” cette libéralité, tandis que l’assignation n’avait visé qu’un cohéritier. Une telle disjonction méconnaît l’exigence d’assigner toute personne directement appelée à subir les effets d’un chef de dispositif. L’office du juge ne peut porter sur des droits sans que leur titulaire soit attrait, selon les exigences de la contradiction et du droit d’être entendu.
La motivation articule ainsi la sanction. L’assignation est jugée irrecevable faute d’avoir attrait toutes les personnes contre lesquelles des prétentions étaient élevées. La cour évite d’emprunter la voie d’une requalification en simple débat fiscal, car le dispositif sollicité excédait l’injonction notariale neutre. La nature de la demande guide la qualification: une prétention civile sur une libéralité déterminée appelle les intéressés, quand un contrôle fiscal-notarial abstrait pourrait s’en dispenser.
B. La sanction d’irrecevabilité et l’annulation corrélative du jugement
La cour lie étroitement l’irrecevabilité de l’assignation et le sort du jugement de première instance. Elle l’affirme sans ambages: « Cette irrecevabilité implique que le jugement attaqué est affecté d’un vice en justifiant l’annulation. » L’annulation en toutes ses dispositions s’impose puisque le premier juge avait intégré au dispositif des chefs concernant des personnes non attraites. L’atteinte aux droits de la défense, ici structurelle, ne pouvait être réparée par une simple retranchement.
La portée pratique est nette. D’une part, les demandeurs doivent calibrer leurs prétentions avec soin, en distinguant le rapport civil engageant des tiers et la seule prise en compte notariale. D’autre part, la régularisation par mise en cause doit intervenir avant que le juge statue, faute de quoi l’irrégularité entraîne l’irrecevabilité. L’arrêt fournit un signal clair: lorsque le dispositif projeté affecte des droits déterminés, l’appel en la cause des intéressés n’est pas une option procédurale, mais une condition d’accès au juge.