Cour d’appel de Aix-en-Provence, le 5 septembre 2025, n°21/10804

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 5 septembre 2025, statue sur la validité d’un licenciement pour faute grave prononcé contre un agent de sécurité. L’employeur a été alerté par son client d’attitudes déplacées envers des salariées, puis a engagé une mise à pied conservatoire avant licenciement.

L’enquête interne a recueilli des attestations concordantes et la consultation d’images de vidéosurveillance par plusieurs responsables du magasin. Le salarié a contesté les faits et invoqué un décalage de date mentionné dans la lettre de licenciement.

Le conseil de prud’hommes de Toulon, 23 juin 2021, a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et a alloué diverses indemnités au salarié. L’employeur a relevé appel en soutenant la faute grave. Le salarié a sollicité confirmation partielle et des dommages, notamment pour un caractère prétendument vexatoire.

Le litige posait la question de la preuve des faits fautifs, de l’incidence d’une erreur de date et de l’existence de circonstances vexatoires. « Dit que le licenciement est bien fondé sur une faute grave. » Il convient d’examiner le contrôle probatoire et la portée de la lettre de licenciement, puis d’apprécier la valeur et la portée pratiques de la solution.

I. Preuve de la faute grave et contrôle de la lettre

A. Charge et degré de preuve

« Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve des faits énoncés dans la lettre de licenciement ainsi que dans la lettre précisant les motifs de ce dernier afin de justifier une mesure de licenciement pour faute grave. » La cour rappelle ainsi l’exigence classique pesant sur l’auteur de la rupture disciplinaire, que le juge apprécie souverainement. Les éléments versés, composés d’attestations précises et d’un visionnage interne des images, ont été jugés concordants et suffisants pour établir les faits.

Le juge d’appel retient qu’ils décrivent une agression sexuelle datée, confirmée par plusieurs témoins ayant consulté l’enregistrement. La contestation générale du salarié et les témoignages de moralité ne renversent pas cette démonstration.

B. Erreur de date et qualification de la faute

« L’erreur matérielle de date figurant dans la lettre de licenciement qui fait état du 25 juin 2018 est sans incidence sur la description précise des faits relatés par cette même lettre de licenciement et parfaitement corroborés par les déclarations de la victime autant que par les témoins qui ont visionné l’enregistrement vidéo de la scène. » Cette affirmation distingue l’inexactitude formelle d’une réelle insuffisance de motivation, en privilégiant la description circonstanciée du comportement reproché. La solution s’accorde avec la finalité de la lettre, qui fixe les limites du litige sans ériger toute approximation en cause de nullité.

« Dès lors, la moralité du salarié apparaît indifférente à la gravité de la faute commise laquelle justifiait la mise à pied conservatoire et s’opposait à la poursuite de la relation contractuelle même durant le préavis. » La qualification de faute grave découle de l’impossibilité de maintenir le contrat, même pendant le préavis, au regard d’atteintes sexuelles en milieu professionnel. Le rejet des demandes afférentes au préavis, au salaire de mise à pied et à l’indemnité légale s’ensuit logiquement.

II. Valeur et portée de la solution

A. Appréciation critique du raisonnement probatoire

L’usage d’attestations relatant un visionnage, sans production matérielle des images, pose la question de la force probante en contentieux prud’homal. Le choix de retenir des témoignages convergents réaffirme la liberté de la preuve et le pouvoir souverain d’appréciation.

La réponse apportée au décalage de date demeure convaincante car les faits sont précisément décrits et corroborés. Elle appelle toutefois une vigilance accrue sur la conduite des enquêtes internes et la traçabilité des vérifications réalisées.

B. Conséquences pratiques et rejet du grief vexatoire

« Mais il n’apparaît pas que l’employeur ait entouré la procédure de licenciement de circonstances vexatoires alors qu’il se trouvait contraint de préserver l’intégrité physique et psychique des collaboratrices de son client. » Le standard retenu confirme que le caractère vexatoire suppose des modalités humiliantes ou des divulgations inutiles, étrangères à la seule nécessité de protection.

La décision encourage des procédures disciplinaires rapides mais rigoureuses, centrées sur des faits précis et des preuves contemporaines. Elle rappelle enfin l’issue contentieuse, « Dit que le licenciement est bien fondé sur une faute grave », qui balise l’action managériale en contexte sensible.

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Hassan KOHEN
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Hassan Kohen

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