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Rendue par la Cour d’appel d’Amiens le 28 août 2025, la décision tranche un litige de recouvrement né d’un contrôle portant sur 2016 à 2018. Une lettre d’observations datée de décembre 2019 a été suivie d’une mise en demeure. La cotisante a sollicité la prorogation du délai de réponse, refusée, puis a contesté plusieurs chefs de redressement, notamment la réduction générale et les frais professionnels des chauffeurs. Le pôle social du tribunal judiciaire de Lille avait annulé l’ensemble en janvier 2024. Saisie de l’appel, la Cour infirme, valide la régularité de la procédure contradictoire, confirme le chef relatif à la réduction générale, et ne censure que le montant du chef « frais professionnels », imposant un recalcul sur une base nette.
La question centrale portait, d’une part, sur la nature de la prorogation du délai de trente jours ouverte par l’article L. 243-7-1 A et son articulation avec la version antérieure de l’article R. 243-59. D’autre part, elle concernait la détermination du SMIC de référence pour la réduction générale, au regard des heures effectivement travaillées, et le traitement des allocations forfaitaires de déplacement au titre des frais professionnels. La Cour répond que la prorogation n’était alors qu’une faculté, que les heures non travaillées ne majorent pas le SMIC annuel, et que l’absence de justificatifs autorise la réintégration, sous réserve d’un recalcul en base nette. Elle énonce notamment que « Il en résulte que seules les heures de travail effectivement exécutées sont prises en compte pour déterminer le SMIC annuel retenu pour le calcul du coefficient de réduction des cotisations ». Elle ajoute, à propos de la lettre d’observations, qu’« ainsi, contrairement aux dires de la cotisante, la lettre d’observations comporte toutes les prescriptions visées par les dispositions de l’article R. 243-59, III, précité ».
I. La solution retenue par la Cour
A. La prorogation du délai contradictoire comme simple faculté
La Cour retient que le refus de prorogation ne viciait pas la procédure, la version applicable des textes n’instaurant qu’une possibilité. Elle relève qu’« il n’existe pas de droit acquis du cotisant dont le refus d’attribution impliquerait qu’il soit obligatoirement motivé par l’organisme ». La lettre d’observations était régulière, les mentions imposées étant présentes, y compris dans les annexes, partie intégrante de l’acte.
La position s’appuie sur l’entrée en vigueur différée du mécanisme d’acceptation implicite, non applicable au contrôle clos en 2019. La Cour juge également que le refus, notifié avant l’expiration du délai, n’a pas empêché d’éventuelles observations utiles. Elle écarte toute violation du contradictoire, l’obligation de réponse de l’agent ne naissant que si le cotisant formule des observations dans le délai.
B. Le SMIC de référence et l’exclusion des périodes non travaillées
S’agissant de la réduction générale, la Cour reprend une solution de principe. Elle affirme que « seules les heures de travail effectivement exécutées sont prises en compte » pour déterminer le SMIC annuel, citant l’orientation de la 2e chambre civile (2e Civ., 13 octobre 2022, n° 21-14.137). Les indemnités de congés payés ou d’absences avec maintien ne sauraient donc accroître le numérateur par reconstitution d’heures.
La Cour valide le chef relatif à la réduction générale, dès lors que les reconstitutions opérées par l’employeur intégraient des heures non accomplies. Les rémunérations attachées à des jours fériés effectivement travaillés, ainsi que les repos compensateurs, demeurent en revanche prises en compte, car rattachées à du temps de travail effectif. Les critiques fondées sur une lecture extensive du droit de l’Union sont écartées, faute d’incidence sur la définition nationale du SMIC de référence retenu pour le coefficient.
II. Valeur et portée de la décision
A. Une lecture cohérente des textes et de la jurisprudence sociale
La solution relative à la prorogation respecte la logique des dispositions transitoires. Le mécanisme d’acceptation implicite introduit par l’article R. 243-59, dans sa version postérieure, ne pouvait rétroagir. La Cour évite une confusion entre la Charte et la norme, en retenant que les garanties procédurales découlent du code, non d’un document d’information. Le rappel que la lettre d’observations peut être complétée par des annexes est net et proportionné.
La confirmation de la solution sur la réduction générale s’inscrit dans une jurisprudence constante, privilégiant l’effectivité du travail pour la détermination du SMIC annuel. Elle clarifie la pratique des reconstitutions, encore fluctuante dans certains secteurs. La Cour en précise la limite, en distinguant le traitement des éléments de rémunération liés à une prestation accomplie de ceux correspondant à des absences, même rémunérées.
B. Effets pratiques sur le contentieux des frais et de l’assiette
Sur les frais professionnels, la Cour rejette l’argument d’un échantillonnage irrégulier en examinant concrètement les demandes de justificatifs. Elle constate qu’« il ne ressort pas de ces éléments que les inspectrices aient (…) voulu recourir à la méthode de l’échantillonnage ». L’absence de pièces suffisantes justifie la réintégration des allocations forfaitaires de déplacement au titre de l’article L. 242-1.
La portée de la censure réside dans l’assiette. La Cour juge qu’« il n’est pas démontré que la société aurait procédé au précompte (…) de sorte que les inspectrices n’auraient pas dû reconstituer les sommes correspondantes aux avantages litigieux en base brute ». Elle impose un recalcul en base nette, conformément à la combinaison des articles L. 242-1 et L. 243-1 et à l’orientation de la 2e chambre civile (2e Civ., 26 septembre 2024, n° 22-17.950; 2e Civ., 20 septembre 2020, n° 19-13.194). Cette exigence affine la sécurité juridique, en rappelant la charge de la preuve du précompte et la rigueur attendue dans la reconstitution.
L’arrêt, en définitive, consolide les cadres méthodologiques du contrôle social. Il confirme la prévisibilité du calcul de la réduction générale, encadre utilement la preuve des frais, et précise l’assiette de réintégration. Par un équilibre mesuré entre validation de principe et correction du quantum, la Cour renforce la lisibilité du contentieux.