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La Cour d’appel d’Amiens, 5 septembre 2025, statue en matière de tarification des risques professionnels. Un employeur du secteur du tri des déchets conteste une cotisation supplémentaire de 25 % prononcée après une injonction de prévention demeurée partiellement exécutée. Les visites successives ont relevé des manutentions lourdes persistantes, des dysfonctionnements d’équipement et des conditions d’hygiène dégradées. L’employeur invoque des efforts substantiels, l’extension des exigences au-delà de l’injonction initiale, et l’impossibilité d’éviter toute nuisance liée à la nature des déchets. La caisse rétorque que l’injonction non contestée est définitive et que l’exécution, fragmentaire et tardive, ne répond pas aux exigences.
La procédure révèle deux saisines jointes. La cour déclare recevable le recours malgré un mode de saisine irrégulier, l’organisme ayant indiqué des voies inexactes. Sur le fond, la juridiction rappelle le cadre administratif de contestation des injonctions, puis examine l’effectivité des mesures à l’échéance. Elle conclut à la justification de la cotisation supplémentaire, faute d’exécution complète et simultanée des prescriptions.
La question posée tient d’abord aux effets d’une injonction non déférée devant l’autorité administrative compétente. Elle porte ensuite sur la condition d’exécution intégrale et efficace des mesures de prévention pour écarter ou réduire la cotisation supplémentaire. La Cour énonce que « Il s’en déduit que faute d’avoir fait l’objet d’un recours contentieux, l’injonction du 22 juillet 2022 est devenue définitive ». Elle ajoute que « Il est constant que les entreprises ne peuvent se retrancher derrière une réalisation partielle des mesures pour prétendre être exonérées de l’imposition d’une cotisation supplémentaire ».
I. Caractère définitif de l’injonction et office du juge de la tarification
A. Voies de recours administratives exclusives et textes applicables
La cour aligne sa motivation sur l’arrêté du 9 décembre 2010, qui organise injonctions, ristournes et cotisations supplémentaires. Elle circonscrit le contentieux de l’injonction au recours administratif, préalable et exclusif. Le juge d’appel en tarification n’en réexamine pas le bien-fondé, mais contrôle la décision d’imposition au regard de l’exécution des mesures. La solution s’enracine dans une répartition des offices claire, garante de sécurité juridique.
La motivation s’appuie sur une formule nette, qui borne le débat judiciaire. La cour énonce que « Il s’en déduit que faute d’avoir fait l’objet d’un recours contentieux, l’injonction du 22 juillet 2022 est devenue définitive ». La règle protège l’économie du dispositif de prévention et évite un contrôle incident tardif, source d’incertitude. Elle favorise une temporalité resserrée, conforme à l’objectif de réduction rapide des risques professionnels.
B. Interdiction de la remise en cause indirecte devant le juge judiciaire
Ayant constaté l’absence de recours administratif, la cour neutralise les griefs dirigés contre le contenu des prescriptions. Elle recadre le litige sur l’unique terrain de l’exécution à l’échéance. La juridiction rappelle avec sobriété que « Il est donc vain, pour la société, de remettre en cause, même indirectement, le contenu des mesures prescrites par l’injonction ». Cette affirmation ferme ferme toute tentative de requalification des exigences techniques dans le cadre de la tarification.
La portée de cette solution est double. Elle impose aux employeurs une vigilance procédurale immédiate, sous peine de cristallisation. Elle concentre ensuite l’office du juge judiciaire sur l’effectivité et la complétude des mesures, réduisant les débats proliférants sur la portée initiale des prescriptions. Le cadre contentieux gagne en densité probatoire et en rigueur.
II. Conditions de la cotisation supplémentaire et contrôle de l’effectivité des mesures
A. Exigence de complétude et d’efficacité des mesures prescrites
La cour s’attache à l’économie de l’injonction plutôt qu’à ses modalités exemplatives. Elle rappelle que « La formule employée était particulièrement large », ce qui autorisait l’employeur à choisir des moyens équivalents, pourvu qu’ils soient efficaces. La démarche ne fige pas la technique, elle impose un résultat mesurable sur l’exposition aux risques, apprécié au plus près des postes.
La juridiction fixe une exigence d’exécution totale à la date d’échéance, sans tolérer les mises en conformité séquentielles. Le principe dégagé est ferme : « Il est constant que les entreprises ne peuvent se retrancher derrière une réalisation partielle des mesures pour prétendre être exonérées de l’imposition d’une cotisation supplémentaire ». L’analyse retient une approche fonctionnelle de la prévention, centrée sur la réduction concrète des risques, et non sur l’acquisition formelle d’équipements.
B. Appréciation concrète des manquements persistants justifiant la majoration
Le contrôle s’appuie sur des constats répétés. Les manutentions de sacs plastique restaient importantes le lundi, en raison d’amoncellements postérieurs au week-end. Le transpalette semi-électrique, parfois immobilisé faute d’énergie, conduisait au retour de manœuvres manuelles. L’hygiène demeurait insuffisante, la fréquence mensuelle de nettoyage ne maîtrisant ni l’encrassement ni les nuisances. La cour retient que « Il appartenait à la société de définir une fréquence d’intervention suffisamment soutenue pour réduire sensiblement les risques, ou de retenir tout autre moyen d’efficacité équivalente ».
La simultanéité des conformités fait défaut, ce que la cour formule explicitement. Elle constate que, jusqu’au contrôle d’avril 2024, jamais l’ensemble des prescriptions n’avait été rempli à la fois. La motivation est incisive : « force est de constater que les mesures prescrites n’ont jamais été réalisées toutes en même temps, jusqu’à la visite du 25 avril 2024 ». La majoration est logiquement validée, l’exigence d’effectivité n’ayant pas été satisfaite dans le délai. La solution confirme une ligne jurisprudentielle exigeante, proportionnée à la gravité des risques visés.