Cour d’appel de Bastia, le 16 juillet 2025, n°24/00159

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Rendue par la Cour d’appel de Bastia le 16 juillet 2025, la décision commentée tranche un contentieux de sécurité sociale relatif à la reconnaissance d’un syndrome du canal carpien gauche au titre du tableau 57C. Le salarié, mécanicien jusqu’en 2016 puis représentant syndical à temps plein, a déclaré sa pathologie en octobre 2021. La caisse a refusé la prise en charge après un premier avis défavorable d’un comité régional, confirmé par un second avis rendu à la demande du premier juge. Le pôle social saisi à Ajaccio a homologué ces avis et débouté l’assuré.

En cause d’appel, l’assuré sollicitait l’infirmation du jugement, la reconnaissance de la maladie professionnelle au titre du tableau 57, ou subsidiairement la désignation d’un troisième comité. L’organisme social concluait à la confirmation, aux dépens et au rejet des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La question posée à la Cour tenait, d’abord, à la recevabilité d’une nouvelle saisine d’un comité régional, ensuite, à l’application des conditions du tableau 57C, spécialement le délai de prise en charge et la liste limitative des travaux, et, à défaut, à l’existence d’un lien direct avec le travail habituel. La Cour confirme l’homologation des avis et écarte toute nouvelle expertise, jugeant que « La désignation d’un troisième comité s’avère donc inopportune, la cour s’estimant suffisament informée ». Elle retient l’absence de lien direct, après avoir constaté que « Les rapports des [comités] (…) ont été motivés en des termes clairs et non équivoques » et que « En conséquence, la comité ne retient pas un lien direct entre la pathologie déclarée et la dernière profession exercée ».

I. Le cadre légal mobilisé et la méthode de contrôle

A. Les conditions du tableau 57C et la présomption d’imputabilité

La Cour rappelle le régime légal, selon lequel la présomption d’origine s’attache aux affections désignées et contractées dans les conditions du tableau. Elle expose ensuite, de manière didactique, les alternatives ouvertes lorsque une condition fait défaut. L’arrêt retient ainsi que « Trois hypothèses distinctes résultent de ces dispositions », distinguant la présomption, la reconnaissance hors présomption en cas de défaut partiel, puis la reconnaissance pour les maladies non désignées.

Le tableau 57C exige, pour le syndrome du canal carpien, un « délai de prise en charge » de trente jours, ainsi qu’une « liste limitative des travaux » comportant « de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés d’extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main ». La Cour inscrit sa motivation dans ce cadre, en sélectionnant les faits utiles pour apprécier, d’abord, la date de la dernière exposition, ensuite, la nature des tâches réellement accomplies.

B. La portée des avis des comités et le refus d’une nouvelle saisine

Le juge d’appel confirme la méthode retenue en première instance, centrée sur la collecte d’avis médicaux motivés, émanant de comités de régions différentes. La Cour souligne que « Les rapports des [comités] (…) ont été motivés en des termes clairs et non équivoques », et que la procédure a respecté les règles propres à ces instances.

Le refus d’un troisième comité se justifie au regard de l’article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale, dès lors que le dossier rassemble des éléments médicaux complets, y compris ceux de la médecine du travail que la Cour intègre à son appréciation. Elle l’énonce nettement, en affirmant que « La désignation d’un troisième comité s’avère donc inopportune, la cour s’estimant suffisament informée ». La solution assure la sécurité juridique et prévient une instruction dilatoire sans plus-value probatoire.

II. L’application concrète aux faits et l’appréciation de la solution

A. Le délai de prise en charge et la détermination de la dernière exposition

La difficulté centrale tenait au décompte du délai de trente jours entre la dernière exposition au risque et la première constatation médicale, intervenue le 21 octobre 2021. La Cour constate que l’intéressé n’exerçait plus l’activité de mécanicien depuis 2016, date retenue comme fin d’exposition potentielle. Cette donnée rend inopérants, pour le délai, les mouvements liés au métier antérieur.

Les comités ont relevé, s’agissant de l’activité de mécanicien, que « Dans ce cas, le délai est très largement dépassé ». La décision se fonde sur une chronologie cohérente, qui fixe la dernière exposition plusieurs années avant la constatation médicale. La Cour adopte cette analyse, conforme à la lettre du tableau, sans élargir le périmètre temporel au-delà du cadre normatif strict.

B. La liste limitative des travaux et l’absence de lien direct avec l’activité syndicale

Restait la question de la liste limitative, puis, subsidiairement, celle du lien direct avec le travail habituel. L’intéressé invoquait des tâches de bureautique intensives, incluant saisies et rédaction de comptes rendus, pour caractériser des mouvements répétés d’extension du poignet. L’arrêt examine ces éléments, intègre le dossier de santé au travail, et confronte la description des tâches aux connaissances médicales mobilisées par les comités.

L’un des avis retient que « le travail sur ordinateur, sauf circonstances d’exposition particulière, n’est pas un facteur de risque de survenue du canal carpien ». La Cour en déduit l’absence de correspondance avec la liste limitative du tableau, et, plus largement, l’insuffisance des éléments pour établir un lien direct. Elle confirme que « En conséquence, la comité ne retient pas un lien direct entre la pathologie déclarée et la dernière profession exercée », ce qui exclut la reconnaissance au titre de l’alinéa ouvrant la voie hors présomption.

La solution, ferme sur la preuve de l’exposition et la causalité, privilégie une lecture stricte du tableau et du standard probatoire exigé pour le lien direct. Elle renforce la place des avis spécialisés, sans priver le juge de son pouvoir d’appréciation lorsque de nouveaux éléments médicaux déterminants seraient produits.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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