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Par un arrêt de la Cour d’appel de Bourges du 4 juillet 2025, la juridiction tranche la validité de deux testaments olographes et la qualification de recel successoral lors des opérations de partage. Le litige naît d’une donation-partage ancienne, suivie du décès successif des ascendants, puis de la révélation de testaments instituant un legs de quotité disponible. La gestion des comptes du disposant par un héritier, au fil d’une longue période, nourrit les griefs de retraits et d’avantages indus.
La juridiction de première instance a ouvert la liquidation-partage, refusé la nullité des testaments et retenu un recel chiffré. L’appel principal tendait à l’infirmation du recel et à la rectification de la charge de la preuve, tandis que l’appel incident sollicitait l’annulation des testaments et un élargissement du recel. Une expertise comptable a été ordonnée en cause d’appel, tandis que des écritures tardives ont été écartées pour préserver le contradictoire. La question posée portait d’abord sur l’insanité d’esprit ou le vice du consentement du testateur, ensuite sur les indices et le périmètre du recel au regard des mouvements bancaires et des fruits indivis.
La Cour confirme le refus de nullité des testaments, adopte la vérification d’écriture réalisée au fond, et retient un recel successoral partiel, fixé à 105 919,34 euros, en excluant notamment les sommes postérieures à l’ouverture de la succession. Elle confirme par ailleurs l’exclusion de prétentions probatoires supplémentaires et répartit les dépens d’appel en conséquence.
I. Le sens de la décision
A. L’office de la Cour face à l’insanité d’esprit et aux vices du consentement
La Cour rappelle le standard de capacité et la charge probatoire, rappelant que « pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit ». Elle précise le critère matériel de l’altération du discernement en citant que « elle résulte d’un trouble psychique, durable ou temporaire, suffisamment grave pour être de nature à exclure une volonté consciente, libre et éclairée ». Elle souligne enfin que la preuve doit porter sur le jour de l’acte, et ne se confond pas avec une simple vulnérabilité d’âge ou des abus ponctuels par des tiers.
Au vu du dossier médical et des éléments circonstanciels, la Cour confirme l’analyse du premier juge. Elle retient l’absence d’atteinte établie du discernement aux dates des testaments, tout en écartant les éléments postérieurs ou imprécis susceptibles d’entretenir un doute non probant. Elle l’énonce nettement: « C’est donc de manière pertinente que le premier juge a écarté l’insanité d’esprit du testateur à la date de la rédaction des testaments litigieux et estimé qu’une expertise médicale ne pourrait pas plus l’établir, ce en quoi le jugement sera confirmé ». Les allégations de dol, fondées sur une vulnérabilité supposée et sur des enregistrements tardifs, ne suffisent pas davantage à caractériser des manœuvres.
B. La qualification du recel successoral et la délimitation de son périmètre
La Cour définit rigoureusement la figure du recel: « Le recel successoral s’entend du détournement par un héritier, au détriment de ses cohéritiers, de certains effets de la succession, meubles ou immeubles, et qui a pour but de rompre l’égalité du partage entre co-héritiers ou de modifier leur vocation héréditaire ». Elle rappelle son rattachement procédural en indiquant que « la demande ne peut être formée qu’à l’occasion d’une action en partage ». Elle adopte la méthode de l’expert pour rapprocher débits et crédits, puis distingue les postes justifiés de ceux révélant une intention frauduleuse.
La Cour retient l’encaissement de chèques au profit d’un héritier et l’usage de la carte bancaire du de cujus pour des dépenses personnelles, indices d’une volonté d’avantager un successible au détriment de l’autre. Elle caractérise l’élément intentionnel en relevant que « l’utilisation de la carte de son père révélant l’intention manifeste de frauder les droits de l’autre héritier ». À l’inverse, elle écarte les retraits modestes, corrélés au train de vie du disposant, ainsi que des loyers ou recettes liés à des investissements financés personnellement. Surtout, elle exclut l’indemnité d’assurance perçue après le décès, énonçant que « ne sont pas susceptibles d’être recelés des biens indivis, dépendant d’une indivision successorale mais n’ayant pas existé dans la succession ». La somme recelée est fixée à 105 919,34 euros, avec privation corrélative de part.
II. Valeur et portée
A. Une exigence probatoire mesurée au service de la sécurité des libéralités
La solution retenue confirme une ligne jurisprudentielle constante en matière de capacité: ni l’âge avancé, ni des vulnérabilités circonstancielles ne constituent, en soi, la preuve de l’insanité d’esprit au jour de l’acte. La Cour assied utilement l’exigence sur la temporalité probatoire, refuse de déduire l’altération du discernement d’incidents postérieurs et borne le prétoire en écartant des investigations médicaux-légales superflues. Le recours à la vérification d’écriture, correctement conduite, dispense d’une expertise graphologique lorsque les comparaisons sont probantes et contradictoirement débattues.
Ce resserrement méthodologique évite la remise en cause tardive et aléatoire d’actes de dernière volonté régulièrement formés. Il protège la stabilité des transmissions, tout en préservant la possibilité d’une annulation lorsque la démonstration, précise et datée, d’un trouble excluant la volonté libre est rapportée. L’arrêt illustre ainsi un contrôle de proportion, attentif à la preuve utile et rétif aux conjectures.
B. Un cadrage utile des indices de recel et des frontières de l’indivision
Sur le recel, la Cour valorise l’audit financier factuel et l’appréciation concrète de l’intention frauduleuse, en recherchant la destination effective des fonds. Le faisceau d’indices repose sur des flux croisés, des dépenses manifestement personnelles et des correspondances bancaires probantes, non sur une présomption générale de détournement. La mise à l’écart des retraits modestes et des flux justifiés par des investissements personnels évite de confondre gestion familiale et captation.
La portée est nette pour les rapports entre recel et indivision post mortem. L’arrêt aligne le traitement de l’indemnité d’assurance sur la règle de principe, en citant que « ne sont pas susceptibles d’être recelés des biens indivis, dépendant d’une indivision successorale mais n’ayant pas existé dans la succession ». La référence à la subrogation réelle de l’article 815-10 ne bouleverse pas cette grille lorsqu’aucune substitution intégrale et contemporaine de l’actif successoral n’est démontrée. La solution s’inscrit dans la ligne de Cass. 1re civ., 25 nov. 2003, n° 01-03.877, et clarifie la frontière temporelle et matérielle des biens recelables.
La décision, enfin, confirme que la privation de part est la sanction adéquate du recel caractérisé, tandis qu’un tri serré des postes litigeux prévient les surévaluations. Elle offre un mode d’emploi prudent et opératoire pour les notaires et conseils appelés à sécuriser les partages.