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La Cour d’appel de Colmar, 11 septembre 2025, statue en matière d’évaluation du taux d’incapacité permanente après accident du travail. L’arrêt intervient sur appel d’un jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 26 juillet 2023, lequel avait porté l’incapacité à 37 %, en retenant un taux médical de 32 % et un coefficient professionnel de 5 %. Le litige oppose la victime, salariée blessée en 2019 et consolidée le 18 juin 2021, à l’organisme social qui avait initialement fixé l’IPP à 26 % dont 4 % d’incidence professionnelle.
La procédure a connu un examen médical judiciaire confirmant d’abord 26 %, avant que les premiers juges ne relèvent la part médicale à 32 % et la part professionnelle à 5 %. L’appelant sollicite la confirmation de l’évaluation initiale, soutient une incidence psychique non directement imputable et rappelle la force des barèmes. L’intimée requiert la confirmation du relèvement opéré en première instance. La question posée tient à la méthode de fixation du taux médical au jour de la consolidation, à la prise en compte de séquelles psychiques alléguées et à l’octroi d’un coefficient professionnel distinct. La solution adoptée retient que « Il est de principe que le taux d’IPP doit être fixé en fonction de l’état séquellaire au jour de la consolidation » et aboutit, après application du barème et de la règle de Balthazar, à un taux médical de 26 %. La Cour ramène ensuite l’incidence professionnelle à 4 % et « FIXE à 30 % le taux d’incapacité permanente partielle (…) dont 4 % au titre de l’incidence professionnelle ».
I. Le sens de la décision: une fixation du taux médical ancrée dans le barème et la consolidation
A. Le cadre légal et temporel de l’évaluation
La Cour rappelle d’abord la base textuelle du calcul du taux, en se référant aux articles L. 434-2 et R. 434-32 du code de la sécurité sociale. Elle souligne que « les barèmes indicatifs d’invalidité dont il est tenu compte (…) sont annexés au livre IV », marquant l’obligation de se référer à ces repères méthodologiques. Surtout, elle rappelle la règle gouvernante: « Il est de principe que le taux d’IPP doit être fixé en fonction de l’état séquellaire au jour de la consolidation (…) et qu’il n’est possible d’indemniser un état pathologique antérieur au titre d’un accident du travail que si celui-ci l’a aggravé ».
Le contrôle exercé est donc un contrôle de qualification barémique des séquelles objectivées à la consolidation. Les éléments postérieurs sont indifférents, sauf aggravation légalement reconnue. Cette approche garantit une cohérence temporelle de l’indemnisation et évite d’absorber, au titre de l’AT, des conséquences étrangères à l’état séquellaire consolidé.
B. L’application du barème et la formule de Balthazar pour fixer 26 % médical
La Cour déroule ensuite l’application du barème indicatif, en isolant les composantes séquellaires pertinentes. Elle retient « un taux d’IPP de 15 % » pour l’atteinte du coude non dominant, justifié par les blocs et limitations selon le paragraphe 1.1.2. Elle confirme « un taux d’incapacité de 8 % » pour l’épaule non dominante, au regard d’un « déficit modéré de 20° de l’antépulsion, de l’abduction et de la rotation interne et externe ». Les cervicalgies sont fixées à 5 %, conformément au barème, point qui ne prête pas à discussion.
S’ensuit l’application de la règle de Balthazar. La Cour énonce que « les taux précités (…) ne pouvant être additionnés », il convient d’opérer successivement, pour obtenir « 15 % + 6,8 % + 3,91 % = 25,71 % ». Elle en déduit que « ce qui justifie l’octroi d’un taux d’IPP de 26 % ». La méthode, rigoureuse et transparente, évite l’écueil d’une simple addition et traduit fidèlement la logique de capacité restante inhérente au barème indicatif d’invalidité.
II. La valeur et la portée: exigence probatoire du coefficient professionnel et articulation des séquelles psychiques
A. L’octroi mesuré de l’incidence professionnelle, fondé sur la preuve spécifique
La Cour distingue nettement le taux médical et l’éventuel coefficient professionnel. Elle rappelle que « par application de l’article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, le taux de l’incapacité permanente partielle prend en considération l’incidence professionnelle ». Toutefois, « l’assuré qui se prévaut d’un préjudice spécifique distinct justifiant l’octroi d’un coefficient professionnel (…) doit apporter la preuve d’un lien direct et certain entre la perte de revenus et les séquelles à la date de consolidation ».
En l’espèce, la preuve d’un retentissement supérieur à 4 % n’est pas rapportée. La Cour relève que l’argumentation ne démontre pas, au-delà des suites professionnelles de l’accident, un impact chiffrable excédant le coefficient initialement retenu. Elle « fixe à 4 % le taux de l’incidence professionnelle », puis, par voie de conséquence, « FIXE à 30 % le taux d’incapacité permanente partielle », prolongeant une ligne jurisprudentielle qui exige une démonstration circonstanciée de l’atteinte à la trajectoire professionnelle.
B. La portée de la solution: intégration raisonnée du psychique et cohérence du droit positif
La décision tranche avec prudence la question des séquelles psychiques. D’un côté, elle rappelle utilement que « le taux médical d’incapacité permanente comprend certes l’atteinte physique séquellaire mais également une composante psychique ». De l’autre, elle retient, au vu des éléments médicaux, que « Les manifestations psychiques actuelles ne sont pas que la conséquence directe de l’AT ». La Cour s’appuie sur l’analyse expertale selon laquelle « Le stress post-traumatique allégué est réel (…) mais a surtout été majoré sinon remplacé par un état anxio-dépressif » dans un contexte professionnel distinct.
Cette articulation confirme deux principes de portée générale. D’abord, la place du psychique dans l’IPP médicale n’est pas exclue mais suppose une imputabilité directe à l’accident évaluée à la consolidation. Ensuite, les litiges parallèles sur la prise en charge d’une lésion nouvelle ne sauraient altérer la méthode barémique ni l’exigence probatoire attachée au coefficient professionnel. L’arrêt conforte ainsi une lecture stricte du barème, un usage loyal de la formule de Balthazar et une distinction nette entre déficit fonctionnel séquellaire et retentissement professionnel démontré. En pratique, il offre un cadre opératoire stable aux praticiens pour calibrer, à droit constant, des séquelles combinées et hétérogènes.