Cour d’appel de Colmar, le 11 septembre 2025, n°23/03490

Par un arrêt de la Cour d’appel de Colmar du 11 septembre 2025, la formation sociale statue sur un appel en procédure sans représentation obligatoire. Un organisme de sécurité sociale contestait l’inopposabilité, prononcée par le tribunal judiciaire de Strasbourg le 30 août 2023, d’une prise en charge d’origine professionnelle. En appel, l’organisme sollicitait l’opposabilité de la prise en charge professionnelle, par voie d’infirmation du jugement entrepris sur le fond.

L’appelant, régulièrement convoqué, n’a pas comparu lors de l’audience fixée devant la juridiction d’appel sociale colmarienne. L’intimé a sollicité que l’appel fût réputé non soutenu, subsidiairement s’en rapportant à ses écritures déposées au fond. La question portait sur l’effet de la non-comparution de l’appelant, dans un cadre sans représentation obligatoire, lorsqu’il a toutefois produit des écritures écrites.

La cour se fonde sur une jurisprudence constante relative à l’oralité et au régime de la comparution de l’appelant. Elle affirme : « En cause d’appel dans la procédure sans représentation obligatoire, si l’appelant ne comparaît pas, son appel doit être considéré comme non soutenu, même s’il a adressé à la juridiction des conclusions écrites ou une demande écrite de renvoi de l’affaire ». Cette formule reprend la solution de Com., 3 mai 2016, n° 13-26662, confirmée en matière sociale par Soc., 8 novembre 1994, n° 91-41134. Il en déduit que « En ce cas, dès lors qu’elle n’est saisie d’aucun moyen d’appel, la cour ne peut que confirmer le jugement ». La juridiction confirme le jugement et condamne l’appelant aux dépens d’appel, conformément à la logique attachée au non-soutien.

I. Le principe du non-soutien en appel social

A. Fondement normatif et exigence de comparution

Le régime d’appel devant la chambre sociale, régi par l’article 945-1 du code de procédure civile, conserve l’oralité de la procédure. En ce cadre, la présence de l’appelant, ou à tout le moins une comparution effective, demeure la condition d’un soutien réel des prétentions. À défaut, la juridiction ne peut utilement débattre, malgré l’existence d’écritures, dès lors que l’instance ne connaît pas la représentation obligatoire. La solution commentée traduit exactement cette logique, en reprenant les attendus publiés par Com., 3 mai 2016, et Soc., 8 novembre 1994.

B. Conséquence procédurale: confirmation faute de moyens

Le non-soutien prive la cour des moyens d’appel, ce qui exclut tout réexamen au fond autre que l’effet confirmatif. La formule retenue le rappelle avec netteté : « la cour ne peut que confirmer le jugement ». Il ne s’agit ni d’une caducité de l’appel, ni d’un désistement, mais d’une défaillance d’instance produisant un pur maintien de la décision. La solution protège la sécurité juridique de l’intimé, qui voit prononcer la confirmation sans que la cour statue ultra petita ou hors des moyens.

II. Valeur et portée de la solution

A. Conformité aux principes du procès équitable

La solution se concilie avec l’oralité de l’appel social, qui vise l’échange direct et la maîtrise du débat par la formation de jugement. L’appelant, dûment avisé, conserve la faculté de solliciter un renvoi utile, ce que rappelle l’attendu, sans être dispensé d’une comparution effective. La décision respecte ainsi le contradictoire, car l’intimé peut plaider, tandis qu’aucune prétention nouvelle n’est accueillie en l’absence d’un soutien oral.

B. Limites et conséquences pratiques en contentieux social

La sévérité de la sanction interroge néanmoins, lorsqu’un appelant a conclu et justifié d’empêchements légitimes, dans un contentieux sensible pour la protection sociale. La jurisprudence citée admet pourtant la qualification de non-soutien, malgré des écritures, afin de préserver la cohérence d’un régime d’oralité intégrale. La rigueur est tempérée par l’exigence d’une convocation régulière, ici établie par un avis de réception signé, et par la possibilité d’anticiper une représentation volontaire. Pratiquement, les acteurs doivent assurer une présence ou une délégation claire, faute de quoi la confirmation automatique fige l’économie du litige sans examen des moyens.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture