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La Cour d’appel de Colmar, chambre sociale, section SB, 11 septembre 2025, tranche un contentieux d’indu de prestations familiales à la suite d’un réexamen des droits. Le litige prolonge une décision du tribunal judiciaire de Mulhouse du 9 novembre 2023, qui s’était déclaré incompétent sur l’allocation de logement familiale, avait confirmé la décision de la commission de recours amiable, refusé l’injonction de produire un décompte précis, condamné au remboursement d’un indu de 8 097,69 euros, et rejeté la demande indemnitaire.
L’appelante sollicitait l’infirmation des chefs de jugement autres que la recevabilité du recours, l’injonction de justifier du trop-perçu, et l’allocation de dommages et intérêts équivalents au montant réclamé. L’organisme payeur demandait la confirmation intégrale, en soutenant l’exclusion de l’enfant concerné de la qualité d’enfant à charge au regard du plafond de revenus applicable, et la régularité du plan de remboursement proposé.
La question portait sur l’office du juge social face à une demande d’injonction de produire un décompte détaillé, et sur les conditions de la responsabilité délictuelle de l’organisme payeur. Elle visait aussi le lien entre les déclarations trimestrielles établies pour une autre prestation et l’obligation autonome de déclarer un changement de situation pour les prestations familiales.
La cour confirme le jugement. Elle retient, d’abord, que « Aucune injonction de production de justificatifs ne peut être adressée à la caisse au titre des sommes versées ». Elle souligne ensuite que « Au titre des sommes réclamées, la caisse produit en annexe 8 un décompte détaillé qui permet d’en comprendre le montant ». Enfin, s’agissant du préjudice allégué, elle énonce que « Ne constitue pas un préjudice le seul fait de devoir rembourser une somme indûment perçue ». Le dispositif « Confirme le jugement rendu entre les parties le 9 novembre 2023 par le tribunal judiciaire de Mulhouse ».
I. Le sens de la décision: clarification de l’office du juge et des obligations d’information
A. Encadrement de la compétence et rejet de l’injonction probatoire
La cour confirme le chef relatif à l’incompétence pour l’allocation de logement familiale, faute de critique articulée. S’agissant de l’injonction de produire, elle insiste sur la finalité et l’utilité de la mesure sollicitée. Elle juge que « Aucune injonction de production de justificatifs ne peut être adressée à la caisse au titre des sommes versées », l’intéressé pouvant reconstituer les versements perçus à partir des notifications et paiements reçus.
Le juge relève, de plus, l’existence d’un « décompte détaillé » communiqué en annexe, de nature à rendre compréhensible le calcul contesté. La formulation « Au titre des sommes réclamées, la caisse produit en annexe 8 un décompte détaillé » justifie pragmatiquement l’absence d’injonction supplémentaire. L’office du juge demeure ainsi centré sur la vérification de la transparence minimale, sans se substituer au service pour édicter une obligation générale d’audit.
B. Confirmation du principe et de la liquidation de l’indu
La cour constate l’absence d’argumentation développée contre le principe même de l’indu ou contre son quantum, et confirme la condamnation au remboursement. En filigrane, la décision s’inscrit dans le cadre des articles L. 513-1 et L. 512-2, I du Code de la sécurité sociale, qui conditionnent la qualité d’enfant à charge au respect d’un plafond de revenus.
Le raisonnement s’aligne sur une lecture classique: la perception de revenus supérieurs au plafond par l’enfant écarte le droit aux prestations familiales correspondantes, pour les mois considérés. À défaut de contestation précise du calcul, l’indu demeure exigible, ce qui clôt le débat contentieux sur ce point et conduit naturellement à la seconde question, indemnitaire.
II. Valeur et portée: responsabilité, preuve du préjudice et circulation de l’information
A. Le refus d’indemniser le remboursement et la condition de faute
La cour rappelle d’abord une règle d’équilibre, d’inspiration quasi-objective. Elle énonce que « Ne constitue pas un préjudice le seul fait de devoir rembourser une somme indûment perçue ». La restitution d’un enrichissement non justifié ne saurait, par elle-même, caractériser un dommage indemnisable au sens de l’article 1241 du Code civil.
La motivation admet toutefois la possibilité d’un retentissement budgétaire réel, susceptible de constituer un préjudice distinct. Elle refuse néanmoins d’engager la responsabilité de l’organisme payeur faute de manquement démontré, la preuve d’une faute qualifiée de calcul ou d’information n’étant pas rapportée. Cette approche maintient l’équilibre entre réparation du dommage digne d’intérêt et prohibition d’une indemnisation qui annulerait une restitution légitime.
B. Portée pratique: déclarations croisées, devoirs de vigilance et sécurité juridique
La décision précise la portée des déclarations trimestrielles établies pour une autre prestation, qui ne valent pas, à elles seules, déclaration de changement de situation pour les prestations familiales. En l’absence de texte imposant un traitement croisé obligatoire, le juge ne peut ériger une obligation générale de prise en compte automatique par l’organisme payeur.
La solution invite les allocataires à une vigilance renforcée sur l’obligation autonome de signaler tout changement pertinent, indépendamment d’autres circuits déclaratifs. Elle renforce, corrélativement, la sécurité juridique du recouvrement des indus lorsque la base factuelle est établie et que la transparence minimale du décompte est assurée. Elle n’exclut pas, cependant, des évolutions réglementaires favorisant l’interopérabilité, dont la charge ne saurait résulter d’une construction prétorienne isolée.
En définitive, l’arrêt combine contrôle de proportion des mesures probatoires, orthodoxie des règles de restitution et exigence probatoire élevée en matière de responsabilité. « Confirme le jugement rendu » résume cette cohérence, qui privilégie la clarté des écritures, la preuve du manquement allégué, et la lisibilité des mécanismes de calcul de l’indu.