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Par un arrêt de la Cour d’appel de Dijon, chambre sociale, 10 juillet 2025 (n° RG 23/00472), la juridiction confirme le jugement prud’homal. La salariée, engagée depuis 2013 et reprise par son employeur en 2018, invoquait des heures supplémentaires, des irrégularités d’hygiène et sollicitait la résiliation judiciaire. Après deux avertissements en 2020 et 2021, elle a été licenciée pour faute grave en septembre 2021, le conseil de prud’hommes ayant ultérieurement rejeté l’ensemble de ses demandes. En appel, la salariée réitérait ses prétentions indemnitaires et disciplinaires, tandis que l’employeur sollicitait la confirmation intégrale et une indemnité au titre de l’article 700.
L’arrêt tranche successivement le régime probatoire des heures et du travail dissimulé, la validité des sanctions, la résiliation judiciaire et le licenciement pour faute grave. La cour retient l’insuffisance des éléments produits sur les heures, écarte toute dissimulation, valide les avertissements, refuse la résiliation et juge le licenciement fondé sur des manquements graves d’hygiène et de loyauté. Elle relève seulement un envoi tardif de bulletins de paie, mais rejette toute indemnisation faute de preuve d’un préjudice.
I – L’appréciation probatoire des demandes salariales
A – Les heures supplémentaires: exigence d’éléments précis
La cour rappelle que « Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. » Elle ajoute que « Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant. »
Appliquant ce cadre, la cour relève que la salariée critique les plannings, dénonce des changements tardifs et évoque des interventions pendant repos ou congés, sans décompte circonstancié. Le chiffrage demandé est forfaitaire et ne pallie pas l’absence de précisions datées et quantifiées. Le juge en déduit l’insuffisance probatoire et confirme le rejet. La formation souligne, en outre, s’agissant de la production forcée, que « dès lors que l’employeur ne produit pas les pièces demandées, il appartiendra à la cour d’en tirer toutes les conséquences utiles », tout en relevant que la demande n’a pas été formée en temps utile.
B – Le travail dissimulé: l’intention comme seuil décisif
La juridiction énonce que « Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle. » La prétention se heurte ici à la double carence de preuve des heures et de l’élément intentionnel. Les messages invoqués ne concernaient pas la salariée, l’attestation isolée n’était corroborée par aucun élément objectif et l’avenant discuté demeurait indifférent à défaut d’indices précis. L’absence d’heures supplémentaires établies rendait, au surplus, inopérante la qualification de dissimulation par sous‑déclaration. La demande indemnitaire est donc écartée, dans une lecture stricte des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail.
II – Le contrôle des manquements et de la rupture
A – Sanctions et résiliation: portée et temporalité
En matière disciplinaire, la cour rappelle la règle de preuve et le principe favorable: « Si un doute subsiste, il profite au salarié. » Elle valide cependant l’avertissement d’août 2020 au vu d’erreurs de caisse reconnues par messages, et celui de juillet 2021 pour une fermeture défectueuse d’un congélateur, la réponse de la salariée admettant le manquement. L’argument tiré d’un rappel à l’ordre antérieur est écarté, ce dernier ne revêtant pas la nature d’une sanction. La prescription est également rejetée, les comportements fautifs s’étant prolongés jusqu’à la date retenue.
S’agissant de la résiliation judiciaire, la cour rappelle avec netteté que « Le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en démontrant que l’employeur est à l’origine de manquements suffisamment graves dans l’exécution de ses obligations contractuelles de telle sorte que ces manquements ne permettent pas la poursuite du contrat de travail. » Les griefs relatifs aux horaires, aux repos et à l’exécution prétendument déloyale ne sont pas établis ou sont trop anciens au regard de la saisine de 2020. L’envoi tardif de bulletins est constaté, mais « il ne peut y avoir de réparation sans preuve du préjudice subi, l’existence et l’évaluation de celui-ci relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond sur la base des justificatifs produits aux débats. » La résiliation et les demandes indemnitaires afférentes sont rejetées.
B – Faute grave et licenciement: qualification et preuve
La cour définit la qualification en des termes constants: « La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. » La charge probatoire est rappelée: « Il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave commise par le salarié. » Quant au délai disciplinaire, la solution est précisée: « Il est toutefois de jurisprudence constante que ces dispositions ne font pas obstacle à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà du délai de deux mois, lorsque le comportement du salarié s’est poursuivi. »
Au fond, la fiche de poste engageait la salariée sur les règles d’hygiène, la gestion et l’entretien. Un constat d’huissier met en évidence des manquements un lundi, dans le prolongement de services assurés le dimanche. Des attestations décrivent un dénigrement récurrent en présence de la clientèle. L’identité rédactionnelle de lettres adressées à deux salariés n’affecte pas la motivation dès lors que les motifs sont clairement énoncés. L’ensemble caractérise des violations rendant impossible le maintien dans l’entreprise. La faute grave est retenue, emportant confirmation du licenciement et rejet des demandes indemnitaires pour absence de cause réelle et sérieuse.