Cour d’appel de Dijon, le 11 septembre 2025, n°23/00586

Cour d’appel de Dijon, chambre sociale, 11 septembre 2025. Saisie avant dire droit, la juridiction statue sur une demande de révocation de l’ordonnance de clôture prononcée après l’ouverture des débats. Le litige de fond concernait une relation de travail, une requalification et une rupture, mais l’objet immédiat est procédural. L’appelant avait saisi, la veille de la date annoncée pour la clôture, le conseiller de la mise en état d’un incident aux fins de sursis à statuer. La clôture est intervenue le 21 août 2025. L’appelant a ensuite demandé le rabat, l’intimée ne s’y opposant pas. La question posée tenait à la recevabilité d’écritures postérieures à la clôture aux fins de révocation, et à l’existence d’une cause grave justifiant cette révocation après l’ouverture des débats. La cour rappelle que, selon l’article 914-3, « après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats », et que, selon l’article 914-4, « Elle ne peut intervenir qu’en cas de cause grave ». Constatant un incident pendant devant le conseiller de la mise en état, elle admet la recevabilité des écritures et révoque la clôture.

I. Le cadre légal de la révocation et son application

A. La recevabilité des écritures postérieures à la clôture

La décision reprend le texte applicable et s’y conforme strictement. Elle cite que « après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats ». La règle souffre des exceptions limitatives prévues par la loi. La formation d’appel vérifie alors la finalité des écritures déposées après la clôture, exclusivement dirigées vers la révocation de celle-ci. Elle énonce clairement que « la cour est saisie d’une telle demande de sorte que les conclusions déposées après la clôture sont recevables ». Le critère de finalité gouverne la recevabilité et non la seule chronologie. Cette lecture concilie l’ordre procédural avec les garanties du contradictoire, sans ouvrir d’exception au-delà du périmètre légal.

B. La cause grave fondant la révocation après l’ouverture des débats

Le texte de l’article 914-4 encadre sévèrement le pouvoir de révoquer après l’ouverture des débats, puisque « Elle ne peut intervenir qu’en cas de cause grave ». La cour caractérise concrètement cette cause par l’existence d’un incident régulièrement saisi, avant dessaisissement du conseiller de la mise en état, et non encore tranché. Elle souligne que « La décision à intervenir sur l’incident aura une incidence certaine sur le fond de la procédure et l’affaire ne peut être en état d’être jugée avant que cet incident ne soit tranché ». Elle ajoute que la cause ne s’est révélée que postérieurement à la clôture, dont « il apparaît des débats que les parties n’auraient pas eu connaissance ». La motivation se conclut par l’affirmation que « Ces éléments constituent une cause grave justifiant de la révocation de l’ordonnance de clôture ». Le contrôle exercé demeure concret et circonstancié, sans présumer l’exception.

II. Portée et appréciation de la solution retenue

A. L’office du conseiller de la mise en état et la continuité de l’instruction

La solution renforce l’ordonnancement des compétences en appel. L’incident introduit avant clôture relève du conseiller de la mise en état, dont l’office doit être respecté pour garantir l’état de l’affaire. En renvoyant « la procédure et les parties devant le conseiller de la mise en état pour qu’il soit statué sur l’incident de procédure », la cour évite une décision au fond entachée d’irrégularité. Le choix de statuer avant dire droit préserve l’économie du litige et la loyauté des échanges, tout en rappelant la finalité de la clôture comme instrument d’orientation et non d’entrave. La précision selon laquelle l’arrêt « vaut convocation des parties » illustre une gestion procédurale efficace et sécurisée.

B. Valeur normative et limites d’extension de la cause grave

La décision a une valeur de rappel ferme du caractère exceptionnel de la révocation postérieure à l’ouverture des débats. L’absence d’opposition de l’intimée pèse, mais ne suffit pas à elle seule à caractériser la cause grave, ce que la cour évite soigneusement. La cause réside dans l’incidence nécessaire d’un incident pendant et déterminant sur l’état de l’affaire. L’orientation demeure prudente et maîtrisée, en ce qu’elle ne banalise pas la notion de cause grave par de simples considérations d’opportunité. Elle trace néanmoins une ligne utile: lorsqu’un incident régulièrement saisi conditionne la maturité du litige, la révocation s’impose pour prévenir une méconnaissance du contradictoire. Le dispositif, qui « Révoque l’ordonnance de clôture en date du 21 août 2025 » et réserve les dépens, achève de marquer un équilibre entre célérité et juste instruction, sans ouvrir un contentieux dilatoire de fin de clôture.

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Hassan KOHEN
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