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La Cour d’appel de Douai, 27 juin 2025, statue sur la nullité d’un licenciement prononcé pour inaptitude au regard d’allégations de discrimination liée au handicap. Un salarié, victime de deux accidents du travail, a été déclaré inapte en janvier 2021 après l’obtention du statut de travailleur handicapé. L’employeur a consulté l’instance représentative, déclaré l’impossibilité de reclassement, puis licencié l’intéressé fin février 2021. Le conseil de prud’hommes a jugé le licenciement nul, allouant des dommages-intérêts et ordonnant un remboursement pour trop-perçu, décision frappée d’appel par l’employeur. L’intimé sollicitait la confirmation de la nullité et une revalorisation du quantum, plus une indemnité pour préjudice distinct. La cour confirme la nullité, maintient le quantum, ajoute l’anatocisme, ordonne la sanction prévue à l’article L.1235-4 et alloue des frais irrépétibles d’appel. La question posée était la suivante: l’abstention de mesures d’aménagement raisonnable, dont la saisine d’un organisme d’aide et la conduite d’une recherche de reclassement spécifiquement adaptée, permet-elle de présumer une discrimination au handicap rendant nul le licenciement, sauf justification objective de l’employeur. La cour répond positivement en retenant un régime probatoire en deux temps dégagé par la jurisprudence récente, que l’employeur ne parvient pas à renverser.
I. Le sens de la décision
A. Le régime probatoire unifié et renforcé en matière de handicap
La cour reprend d’abord le schéma probatoire issu des textes internationaux et européens combinés au droit interne. Elle cite que « le juge, saisi d’une action au titre de la discrimination en raison du handicap, doit, en premier lieu, rechercher si le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination ». Le cœur du contrôle porte ainsi sur l’existence d’indices objectifs, dont l’absence d’« aménagements raisonnables » préconisés par le médecin du travail ou l’instance représentative.
La deuxième étape est immédiatement énoncée dans les mêmes termes directifs: « Il appartient, en second lieu, au juge de rechercher si l’employeur démontre que son refus de prendre ces mesures est justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ». La justification doit reposer sur une impossibilité matérielle ou sur la disproportion manifeste des charges, appréciée in concreto. Le raisonnement procède clairement d’un alignement sur l’arrêt de la chambre sociale du 15 mai 2024 (n° 22-11.652), mentionné par la décision.
B. L’articulation inaptitude/handicap et l’extension du champ des mesures
La cour explicite la combinaison des régimes en soulignant que « les règles propres au régime de l’inaptitude et au statut de travailleur handicapé apparaissent devoir se combiner entre elles ». L’obligation de reclassement s’en trouve renforcée par l’exigence d’examiner la « palette des mesures possibles en faveur des travailleurs handicapés ». L’appréciation dépasse ce qui est exigé pour un salarié simplement inapte.
La décision précise encore la notion de refus implicite: « le refus implicite de l’employeur de prendre les mesures adaptées s’entend, en réalité, de toute forme d’abstention en lien avec la protection du travailleur handicapé ». Dès lors, l’absence de saisine d’un organisme d’aide, même non requise par le salarié, peut constituer un indice pertinent. En l’espèce, l’employeur se borne à évoquer l’absence de demande, une recherche ordinaire dans le groupe et l’absence de poste aménageable, ce qui ne suffit pas. La cour confirme donc la nullité pour discrimination, tout en rappelant que le simple manquement à l’obligation de reclassement, isolément, ne produit pas cet effet.
II. La valeur et la portée de la solution
A. Une clarification bienvenue, tempérée par une exigence de motivation
La solution consolide un cadre probatoire cohérent avec la directive 2000/78/CE et la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Elle corrige la lecture issue de l’arrêt du 3 juin 2020 (n° 18-21.993) en précisant l’office du juge et la charge de la justification, sans ériger une présomption irréfragable de discrimination. La décision choisit une voie médiane, protectrice mais mesurée, en exigeant une justification « objective » et « étrangère » à la discrimination.
Cette exigence renforce la sécurité juridique du raisonnement en évitant l’automaticité de la nullité. Elle impose toutefois à l’employeur une motivation circonstanciée des démarches entreprises, y compris l’exploration des aménagements raisonnables et la mobilisation des acteurs spécialisés. Le contrôle de proportionnalité devient central, ce qui aligne la pratique contentieuse sur la logique de l’égalité de traitement.
B. Des effets pratiques concrets sur la conduite du reclassement
La portée pratique est notable pour la gestion de l’inaptitude d’origine professionnelle en présence d’un handicap. L’employeur doit caractériser une recherche de reclassement augmentée, documentant l’examen des aménagements, la sollicitation des organismes d’aide et l’analyse de la faisabilité économique. À défaut, l’abstention peut fonder des indices sérieux de discrimination et conduire à la nullité du licenciement.
L’arrêt rappelle enfin les conséquences indemnitaires et procédurales. La nullité confirmée entraîne l’allocation de dommages-intérêts, l’anatocisme des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil, ainsi que la sanction de l’article L.1235-4 du code du travail, limitée à deux mois d’allocations chômage. L’ensemble incite à une prévention active, fondée sur la traçabilité des mesures, l’anticipation des aménagements raisonnables et la coopération avec les acteurs dédiés, dans une perspective de maintien dans l’emploi.