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Cour d’appel de Douai, 27 juin 2025. Un salarié, engagé comme ouvrier en février 2020 au sein d’une entreprise du bâtiment ultérieurement placée en liquidation judiciaire, sollicite la fixation de sa créance au passif. Le premier juge a requalifié des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, octroyant des indemnités de rupture et des dommages-intérêts. En appel, l’intéressé réclame notamment l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, une indemnité compensatrice de congés payés plus élevée et des rappels interstitiels. L’organisme de garantie conteste, principalement sur le travail dissimulé, le salaire de référence et l’indemnité de congés. La juridiction d’appel confirme l’essentiel, rejette le travail dissimulé, accorde une indemnité de congés payés à hauteur de 10 % des salaires et rehausse l’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La question posée portait d’abord sur les conditions probatoires du travail dissimulé, au regard des articles L. 8221-3, L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, puis sur les effets, dans la branche du bâtiment, de l’absence de preuve de versements à la caisse de congés payés. La cour répond en refusant l’indemnité forfaitaire de six mois faute d’éléments probants, et en allouant une indemnité de congés calculée à 10 % des rémunérations, l’employeur n’ayant pas justifié des cotisations à la caisse compétente. Elle rappelle enfin le caractère injustifié de la rupture verbale et fixe les dommages-intérêts en fonction de critères individualisés.
I. Le sens de la décision
A. L’exigence probatoire du travail dissimulé et l’écartement de l’indemnité forfaitaire
La cour rappelle le cadre légal en reprenant la définition légale du travail dissimulé: « En application des articles L 8221-5, L 8221-3 et L 8223-1 du code du travail est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié ou d’activité le fait pour tout employeur (…) ». Elle exige, conformément au texte, un comportement intentionnel, portant sur l’absence de déclaration préalable à l’embauche, l’omission de bulletins ou la minoration des heures. L’argumentation du salarié reposait sur des versements bancaires supérieurs aux bulletins et l’invocation d’un procès-verbal ancien. La cour constate que « le procès-verbal dressé par l’URSSAF (…) est antérieur à l’embauche (…) et il n’a pas été dressé à l’encontre de la société (…) ». Elle souligne l’absence de preuve d’une entente frauduleuse, l’irrégularité des flux et l’absence de déclaration fiscale corrélative par l’intéressé. La conclusion est sans équivoque: « Au final, la preuve n’est pas administrée que’l’employeur se soit soustrait à l’accomplissement de la déclaration préalable à l’embauche ni à l’obligation de délivrance d’un bulletin de paie (…) ». L’indemnité forfaitaire est donc refusée.
Cette lecture privilégie un contrôle serré de l’intention et des indices convergents. La cour écarte les éléments isolés et non contemporains, refuse de suppléer la carence probatoire et circonscrit l’office du juge au contrôle de cohérence des pièces salariales et bancaires. Elle confirme en creux le rôle décisif des déclarations sociales, des bulletins et de la traçabilité des heures pour caractériser la dissimulation.
B. La spécificité de la branche du bâtiment et l’allocation de l’indemnité de congés
La juridiction procède à un rappel utile: « Il est de règle que dans la branche du bâtiment les indemnités de congés payés sont servies par une caisse se substituant à l’employeur (…) ». Elle précise toutefois la conséquence probatoire attachée à cette substitution, en inversant toute tentation de faire peser sur le salarié une démarche préalable: l’employeur doit justifier des cotisations. Constatant que « les bulletins de paie ne [font] apparaître la prise d’aucun congé et le versement d’aucune indemnité de congés payés » et l’absence de preuve de versements à la caisse, la cour fixe l’indemnité à 10 % des rémunérations mentionnées aux bulletins. Cette solution concilie la règle de substitution et la responsabilité de l’employeur défaillant, sans excéder les montants justifiés par les pièces salariales.
La méthode retenue est pragmatique. Elle fonde le calcul sur le salaire de référence des bulletins et écarte les prétentions spéculatives. La cohérence interne du dispositif est assurée, l’indemnité compensatrice de congés étant isolée du débat sur un revenu « réel » non établi.
II. Valeur et portée de la solution
A. Rigueur probatoire, sécurité juridique et rationalité de l’office du juge
L’arrêt renforce la cohérence du droit positif sur le travail dissimulé en exigeant une démonstration articulée de l’élément intentionnel. En refusant de déduire la fraude de flux bancaires irréguliers non corroborés par des déclarations fiscales du salarié, la cour sécurise l’appréciation de la preuve et préserve l’équilibre des charges. La référence aux pièces sociales et aux bulletins maintient un critère objectif, aisément vérifiable et reproductible. La motivation suivante y contribue: « [L]’appelant ne fournit pas d’élément caractérisant une entente avec son employeur pour tripler ses appointements ». La portée pratique est claire: il appartient au demandeur d’établir l’écart entre le travail exécuté, la rémunération déclarée et la conscience de dissimuler, au-delà de simples soupçons.
La solution sur la rupture verbale, qualifiée de licenciement sans cause réelle et sérieuse, illustre la même exigence d’objectivation. La cour rappelle, dans une formule limpide, l’assiette factuelle de sa décision: « Il ressort des productions que le salarié a été embauché (…) et qu’il a cessé ses fonctions par rupture verbale (…) ». L’évaluation des dommages-intérêts retient des critères individuels, en cohérence avec les textes applicables, sans céder à des chiffrages déconnectés des pièces.
B. Portée sectorielle et articulation avec la procédure collective et la garantie
En matière de congés payés dans le bâtiment, la décision marque une ligne opérationnelle. Le principe de substitution par la caisse n’empêche pas l’allocation d’une indemnité lorsque l’employeur ne justifie d’aucune cotisation, les bulletins ne révélant ni congés pris ni indemnités versées. La phrase de principe, reprise plus haut, oriente la pratique des acteurs: l’employeur doit prouver la régularité des versements à la caisse, faute de quoi une indemnisation à 10 % des salaires s’impose. L’assiette retenue demeure celle des bulletins, ce qui garantit une base probatoire certaine et limite les aléas contentieux.
S’agissant de la procédure collective, la cour lie utilement la temporalité de la rupture et l’intervention du mécanisme légal de garantie. Elle statue que la rupture étant antérieure au jugement d’ouverture, la garantie légale couvre les sommes dues au titre des créances salariales ainsi fixées. La portée est double: elle éclaire les salariés sur la présentation des créances et elle incite les organes de la procédure à documenter précisément les périodes, salaires de référence et pièces sociales utiles, afin de réduire les incertitudes de garantie et de rang.
En définitive, l’arrêt offre une grille de lecture sobre et équilibrée. Il consolide l’exigence probatoire du travail dissimulé, clarifie l’indemnisation des congés payés dans le bâtiment et stabilise les effets de la rupture sur la garantie légale, tout en ancrant l’évaluation des sommes dans les seules pièces incontestables.