Cour d’appel de Douai, le 3 juillet 2025, n°25/00805

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La Cour d’appel de Douai, 3 juillet 2025, statue en matière de traitement du surendettement des particuliers. La décision répond à la question du calcul de la capacité de remboursement et des modalités d’apurement, à partir de données actualisées, dans le cadre du contrôle des mesures imposées par la commission.

Les faits tiennent à une situation d’endettement personnel, liée à des ressources irrégulières et à des charges courantes incluant l’entretien de deux enfants. La commission de surendettement a déclaré la demande recevable et fixé une mensualité de 359,93 euros sur cinquante-cinq mois, au taux de 0 %, en avril 2024.

Saisie d’un recours, la juridiction de première instance, par décision du juge des contentieux de la protection de Dunkerque du 10 janvier 2025, a retenu une capacité de remboursement de 1 000 euros et un rééchelonnement sur vingt-trois mois, à taux nul. L’appel a été interjeté par le débiteur qui contestait l’évaluation, en particulier la prise en compte de primes non systématiques.

La Cour énonce les règles applicables, rappelle la méthode de calcul, puis réévalue la situation au jour où elle statue. Elle fixe la contribution mensuelle à 419,84 euros et répartit l’apurement sur quarante-six mois, à 0 %, après avoir vérifié la compatibilité avec la quotité saisissable et le seuil de ressources réservées.

La question de droit posée est double. D’une part, selon quels critères cumulatifs, tirés des articles L. 731-1, L. 731-2, R. 731-1 du code de la consommation et du barème de saisie des rémunérations, la capacité de remboursement doit-elle être déterminée. D’autre part, dans quelle mesure le juge, saisi en contestation des mesures imposées, peut-il ajuster rééchelonnement et intérêts afin de concilier apurement effectif et préservation des dépenses courantes du ménage.

La Cour répond en mobilisant une grille de calcul stricte et en appréciant in concreto les revenus et charges justifiés, au jour de la décision. Elle « réduit à 0 % le taux des intérêts dus sur les créances figurant dans cet échéancier pendant la durée du plan », et « rappelle qu’aucune voie d’exécution ne pourra être poursuivie […] pendant toute la durée d’exécution des mesures sauf à constater la caducité de ces dernières ». Elle précise encore que « le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue ».

I) Les critères légaux et jurisprudentiels du calcul de la capacité de remboursement

A) La méthode de calcul imposée par les textes et reprise par la Cour
La Cour s’inscrit dans le cadre du contrôle de l’article L. 733-12 du code de la consommation, permettant de vérifier la validité et le quantum des créances. Surtout, elle adopte la méthode issue des articles L. 731-1, L. 731-2 et R. 731-1, articulés avec le barème des articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail. Elle juge que « le montant des remboursements à la charge du débiteur […] doit être fixé par référence à la quotité saisissable du salaire […] de manière à ce qu’une partie des ressources nécessaires aux dépenses courantes du débiteur, égale au moins au montant forfaitaire du revenu de solidarité active dont il disposerait, lui soit réservée par priorité et à ce qu’il n’excède pas la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l’intéressé et le montant du revenu de solidarité active ». L’économie d’ensemble réside dans une double borne, à la fois par la quotité saisissable et par l’écart avec le RSA, garantissant un reste à vivre suffisant.

B) L’appréciation in concreto au jour où la Cour statue
La Cour retient des revenus nets moyens de 2 761,54 euros, une quotité saisissable de 922,83 euros, un RSA applicable de 1 163,73 euros, et des dépenses courantes justifiées de 2 341,70 euros. Elle rappelle que « le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue ». L’évaluation conduit à une capacité de 419,84 euros, strictement inférieure aux plafonds rappelés et compatible avec le reste à vivre exigé. La Cour fonde ainsi sa décision sur des pièces actualisées et sur une prise en compte mesurée des charges familiales, dans le respect des exigences de traçabilité financière et de prévisibilité.

II) Les pouvoirs d’ajustement du juge et la portée pratique de la solution

A) L’usage proportionné des mesures d’apurement et de la réduction d’intérêts
Au titre de l’article L. 733-1, le juge peut « rééchelonner le paiement des dettes » et « prescrire que les sommes […] porteront intérêt à un taux réduit ». La Cour substitue aux modalités de première instance un plan de quarante-six mois à 0 %, opérant un lissage protecteur sans excéder sept ans. Elle « réduit à 0 % le taux des intérêts dus […] pendant la durée du plan », confirmant l’orientation du droit du surendettement vers l’apurement soutenable. La protection est renforcée par l’interdiction des voies d’exécution durant l’exécution du plan, la Cour rappelant qu’« aucune voie d’exécution ne pourra être poursuivie […] sauf à constater la caducité ». L’équilibre normatif favorise le redressement, limite le coût du crédit et sécurise l’exécution.

B) Appréciation critique de la solution retenue et de ses implications
Le rejet implicite d’une capacité de 1 000 euros au profit de 419,84 euros manifeste une orthodoxie méthodologique, sensible à la variabilité des composantes de rémunération. La Cour s’écarte d’une approche arithmétique trop rigide, en privilégiant la preuve des charges effectives et la stabilité raisonnable du reste à vivre. Le choix d’un échéancier de quarante-six mois, inférieur au plafond légal, concilie rapidité d’apurement et soutenabilité des échéances. La clause de caducité, bien que classique, incite à une vigilance accrue sur les incidents mineurs, mais elle est contrebalancée par l’obligation de suspension des voies d’exécution pendant l’exécution régulière. La solution, cohérente avec le droit positif, offre un standard lisible aux juridictions du fond et aux commissions, tout en préservant la finalité sociale de la procédure.

En définitive, l’arrêt de la Cour d’appel de Douai précise utilement la combinaison des bornes légales et l’exigence d’une appréciation actualisée, à partir d’éléments probants et d’une lecture concrète des charges familiales et professionnelles. Il fournit un modèle opératoire de calcul et d’aménagement des dettes, fidèle à la lettre des textes et à l’esprit protecteur du dispositif.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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