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Cour d’appel de Grenoble, 11 septembre 2025. Un organisme de retraite et de protection sociale réclame la restitution d’un indu d’ASPA payé sur plusieurs années à un pensionné, décédé en 2021. Il invoque une perte de la condition de résidence en France depuis 2018, avec versement sur un compte ouvert en France. En première instance, le pôle social du tribunal judiciaire de Valence a rejeté la demande, retenant l’incertitude sur la qualité d’héritière de la personne assignée et sur la date d’installation à l’étranger. En appel, l’organisme réduit le quantum, sollicite l’autorisation de prélever sur le compte du défunt et entend engager la veuve prétendue à titre personnel. L’intimée ne comparaît pas. La question porte sur la possibilité d’obtenir la répétition de l’indu à l’encontre de l’épouse alléguée, en l’absence de preuve civile de la qualité d’héritier et d’éléments probants sur la date exacte de la perte de résidence, dans le cadre du régime du défaut en appel. La cour retient, d’une part, le cadre procédural applicable au défaut et, d’autre part, l’exigence probatoire pour diriger la créance de répétition. Elle énonce que « L’intimée n’a pas conclu est donc réputée s’approprier les motifs du jugement de première instance selon les dispositions communes devant la cour d’appel de l’article 954 du code de procédure civile », puis rappelle que « Le tribunal en l’absence du défendeur comme la cour ne peut faire droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où ils sont réguliers, recevables et bien fondés par application de l’article 472 du même code ». Sur le fond, elle décide que « Elle dispose donc en tout état de cause d’une créance contre sa succession mais non sa veuve à titre personnel », et conclut logiquement : « Par conséquent le jugement déféré sera confirmé pour ses motifs adoptés et les motifs propres qui précèdent ».
I. Le sens de la décision
A. Le cadre du défaut en appel et le contrôle de la régularité
La cour précise l’office du juge en cas d’intimé défaillant, en articulant les articles 954 et 472 du code de procédure civile. L’absence de conclusions de l’intimée n’ouvre aucun droit automatique au succès du recours. Le contrôle porte sur la régularité, la recevabilité et le bien‑fondé des prétentions, que le juge doit apprécier d’office. En retenant que « L’intimée n’a pas conclu est donc réputée s’approprier les motifs du jugement », la cour fixe le périmètre du débat et confirme que l’appelant doit néanmoins rapporter la preuve exigée par le droit positif. L’énoncé « ne peut faire droit […] que dans la mesure où ils sont réguliers, recevables et bien fondés » marque la continuité avec une jurisprudence constante sur l’office du juge du défaut. L’arrêt se place ainsi sur un terrain de stricte légalité procédurale, limitant la portée des demandes non étayées par des éléments probants.
B. La créance de répétition d’indu dirigée contre la succession, non contre le conjoint
La cour distingue la dette de la succession de la responsabilité personnelle du conjoint survivant. L’indu d’ASPA, généré du vivant du bénéficiaire, grève l’actif successoral et ne peut, sans preuve de la qualité d’héritier et de l’acceptation, être réclamé personnellement. La formule « Elle dispose donc en tout état de cause d’une créance contre sa succession mais non sa veuve à titre personnel » exprime une règle simple et sûre. La demande de condamnation personnelle échoue faute d’actes d’état civil établissant le lien matrimonial et la vocation successorale, et faute d’identification des autres successibles. S’y ajoute l’incertitude sur l’assiette temporelle de l’indu, la date de départ étant déduite d’un rapport administratif rédigé au conditionnel, non corroboré par des pièces. L’économie de l’arrêt conduit, sans excès, à confirmer le rejet, dès lors que les deux piliers probatoires font défaut.
II. Valeur et portée
A. Une exigence probatoire salutaire en matière successorale
La solution protège la cohérence du droit des successions et celle des voies d’exécution. La qualité d’héritier requiert un fondement civil précis, par acte ou par notoriété, avant toute condamnation personnelle. La cour refuse que des échanges électroniques dépourvus d’authentification emportent reconnaissance de dette ou mandat d’imputer sur un compte bancaire. Ce rappel renforce la sécurité juridique des ayants droit, en imposant la réunion des pièces nécessaires, ainsi que l’identification de l’ensemble des successeurs, préalablement à toute action en condamnation. La portée est pratique : l’organisme devra agir contre la succession, faire constater la dévolution successorale, et, le cas échéant, obtenir un titre exécutoire contre tous héritiers acceptants, proportionnellement à leurs droits.
B. Un contrôle renforcé de la condition de résidence au regard de l’ASPA
L’arrêt rappelle, en creux, que la perte de la condition de résidence doit être établie par des éléments objectifs et concordants. Un rapport interne rédigé au conditionnel, non suivi de preuves écrites, ne suffit pas à fonder l’indu pour une période précise. La prudence probatoire s’impose, d’autant que la prestation est de solidarité nationale et que l’assiette temporelle conditionne le quantum. La décision invite les organismes à recourir à des pièces datées et vérifiables, telles que déclarations officielles de changement d’adresse, traces fiscales, ou attestations d’autorités locales, avant mise en demeure (C. rur., art. R. 725‑22‑1). La portée est mesurée mais réelle : la récupération d’indus internationaux exige une chaîne probatoire robuste, respectueuse des garanties procédurales, faute de quoi la demande encourt la confirmation du rejet en appel.
« Par conséquent le jugement déféré sera confirmé pour ses motifs adoptés et les motifs propres qui précèdent » synthétise l’économie de l’arrêt. La cour réaffirme un ordonnancement clair : exigence de preuve de la créance et de sa titularité, et respect du cadre procédural du défaut, avant toute condamnation dirigée contre une personne déterminée.