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Par un arrêt de la Cour d’appel de Grenoble, chambre sociale, du 11 septembre 2025, la juridiction statue sur l’accès à la prestation de compensation du handicap. L’affaire oppose une assurée à l’organisme départemental compétent, à la suite d’un refus administratif confirmé après recours préalable obligatoire.
La demande de prestation a été déposée le 7 juillet 2023 et refusée le 24 août 2023 par l’autorité compétente. Le recours administratif préalable obligatoire a été rejeté le 15 décembre 2023, ce qui a conduit l’intéressée à saisir le juge judiciaire.
Par jugement du 25 juillet 2024, le pôle social du tribunal judiciaire de Valence a rejeté l’ensemble des demandes et condamné l’assurée aux dépens. Un appel a été interjeté le 6 septembre 2024, l’affaire ayant été débattue le 3 juin 2025 devant la cour.
L’appelante soutenait l’existence de cinq difficultés graves et la nécessité d’une aide humaine, au regard de l’annexe 2-5 du code de l’action sociale et des familles. L’organisme intimé contestait, n’admettant qu’une seule difficulté grave en mobilité, et arguait de l’absence des autres critères cumulatifs exigés par le référentiel.
Le litige portait sur l’existence d’une difficulté absolue ou, à défaut, de deux difficultés graves au sens de l’annexe 2-5 précitée. La cour a rappelé que « a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d’une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces ». Elle a visé les critères réglementaires selon lesquels « la personne qui présente une difficulté absolue pour la réalisation d’une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d’au moins deux activités » peut prétendre à la prestation. Constatant une contradiction entre les évaluations médicales et administratives, la cour a jugé qu’« il apparaît nécessaire, avant-dire droit, d’ordonner une expertise ». Le dispositif en tire la conséquence en énonçant « AVANT DIRE-DROIT, ORDONNE une expertise médicale » et « SURSOIT À STATUER pour le surplus jusqu’au dépôt au greffe du rapport d’expertise ».
I. Le sens de la décision: clarification des critères et recours à l’expertise
A. Les critères d’éligibilité rappelés et leur portée opératoire
La cour replace le débat dans le cadre légal en citant les textes qui gouvernent l’ouverture du droit. Elle articule la règle de droit autour du seuil binaire, difficulté absolue ou double difficulté grave, dont l’annexe 2-5 précise les activités pertinentes.
La citation de l’article réglementaire éclaire le centre de gravité du contrôle juridictionnel, concentré sur les capacités fonctionnelles objectivables. En rappelant que les difficultés doivent être « définitives, ou d’une durée prévisible d’au moins un an », la cour cadre temporellement l’appréciation au moment pertinent.
Cette mise au point normative n’est pas décorative, car elle fixe l’office du juge d’appel. La solution dépend d’une évaluation technique fidèle au référentiel, déliée des approximations sémantiques, et concentrée sur les activités listées de manière exhaustive.
B. La mesure d’instruction comme réponse à la contradiction probatoire
La juridiction constate une discordance significative entre un pré-rapport médical et l’évaluation administrative, quant au nombre et à l’intensité des difficultés. Plutôt que de trancher sur pièces, elle mobilise l’expertise pour sécuriser la qualification des activités affectées.
Le motif retient sans détour qu’« il apparaît nécessaire, avant-dire droit, d’ordonner une expertise », choix cohérent avec la technicité du référentiel et l’exigence de précision. Le dispositif encadre la mission et rappelle que « DIT que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 273 à 283 du Code de Procédure Civile ».
L’expertise est circonscrite au millésime pertinent, afin d’éviter tout anachronisme probatoire et de figer l’analyse sur la période de la demande. La méthode garantit une mesure utile à la stricte application du barème, sans élargissement indu de l’office.
II. Valeur et portée: contrôle juridictionnel effectif et incidences pratiques
A. Un office d’instruction proportionné et respectueux du contradictoire
Le choix d’une expertise ordonnée « avant dire droit » manifeste un office de contrôle complet, adapté aux litiges de protection sociale. L’économie du dispositif assure la contradiction sur pièces et opérations, dans un cadre procédural explicite et balisé.
Le renvoi aux articles 273 à 283 du code de procédure civile préserve l’égalité des armes et la loyauté des débats. La mesure évite une appréciation abstraite des critères, en réinscrivant la décision dans une réalité fonctionnelle précisément décrite et vérifiable.
Ce mode opératoire conforte la rationalité de la décision, tout en ménageant la possibilité d’observations des parties sur le rapport. La cour privilégie une vérité technique contrôlable, à rebours d’une décision prématurée sur un dossier lacunaire ou contradictoire.
B. Les effets sur l’accès aux droits et la sécurité juridique
Le « SURSOIT À STATUER pour le surplus jusqu’au dépôt au greffe du rapport d’expertise » retarde l’issue mais renforce la qualité de la solution attendue. L’enjeu substantiel, accès à une prestation personnalisée, justifie ce temps probatoire additionnel.
La mission cerne les activités pertinentes et la temporalité décisive, limitant les risques de reformatage ultérieur du litige. Le calibrage de la preuve conditionne l’application exacte des seuils, et réduit l’aléa contentieux au stade de l’exécution.
Cette démarche a une portée régulatrice au-delà de l’espèce, en rappelant que les refus de prestation doivent reposer sur une cotation rigoureuse et motivée. Elle incite les acteurs à documenter de façon complète l’évaluation fonctionnelle initiale, pour prévenir des sursis évitables.