Cour d’appel de Grenoble, le 15 juillet 2025, n°24/00397

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Rendue par la Cour d’appel de Grenoble le 15 juillet 2025, la décision statue sur la régularité de la procédure d’instruction d’une maladie professionnelle au regard de l’article R. 461-10 du code de la sécurité sociale. Le litige naît d’une déclaration de pathologie rachidienne, assortie d’une saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, suivie d’un avis favorable et d’une décision de prise en charge.

Les éléments utiles tiennent aux dates et aux séquences procédurales. La saisine du comité intervient le 15 septembre 2020. La phase contradictoire est découpée en trente jours d’enrichissement du dossier, puis dix jours de consultation et d’observations. L’avis du comité est rendu le 18 novembre 2020 et la décision de prise en charge notifiée le 20 novembre 2020. En première instance, le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy, le 14 décembre 2023, avait déclaré la décision inopposable à l’employeur.

Les prétentions opposent deux thèses. L’employeur soutient ne pas avoir bénéficié de trente jours francs à compter de la réception de l’information, dénonce une transmission anticipée d’un dossier réputé « complet » dès la date de saisine, et invoque une atteinte au contradictoire. La caisse plaide la conformité intégrale à l’article R. 461-10, affirme que les délais courent à compter de la saisine, et produit une attestation confirmant la clôture de l’enrichissement avant l’examen du comité.

La question de droit tient au point de départ et à la sanction des délais contradictoires prévus par l’article R. 461-10 en cas de saisine du comité. La Cour retient que le délai de quarante jours court à compter de la saisine, que l’information des échéances suffit, et que seule l’atteinte à la phase de dix jours entraîne l’inopposabilité. Elle infirme, en conséquence, la décision de première instance et déclare la prise en charge opposable à l’employeur.

I. Le cadre normatif du contradictoire et son interprétation par la Cour

A. La saisine du comité comme point de départ des délais

Le texte applicable organise un contradictoire en deux temps. Il précise que « La caisse met le dossier mentionné à l’article R. 441-14, complété d’éléments définis par décret, à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu’à celle de l’employeur pendant quarante jours francs. » Il ajoute : « Au cours des trente premiers jours, ceux-ci peuvent le consulter, le compléter par tout élément qu’ils jugent utile et faire connaître leurs observations, qui y sont annexées. » Puis, « Au cours des dix jours suivants, seules la consultation et la formulation d’observations restent ouvertes à la victime ou ses représentants et l’employeur. » Enfin, « La caisse informe la victime ou ses représentants et l’employeur des dates d’échéance de ces différentes phases lorsqu’elle saisit le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information. »

La Cour rattache strictement les échéances à la saisine, et non au retrait effectif du courrier d’information. Elle lit dans l’écrit de notification que « Cette formulation au présent implique nécessairement que cette transmission au comité s’effectue sans délai le jour même puisque, de surcroît, la suite de ce courrier informe l’employeur des dates des délais de consultation de 30 et 10 jours, lesquelles dépendent de cette saisine. » Le dispositif légal commande ainsi des délais communs, prévisibles et bornés, qui ne varient pas selon les dates de réception individuelles.

B. L’information des échéances et l’autonomie des phases contradictoires

La Cour souligne l’économie générale du texte, centrée sur la fixation d’échéances communes et opposables dès l’information. Elle énonce que « Il ressort des dispositions précitées de l’article R 461-10 que l’économie générale de la procédure d’instruction à l’égard de la victime ou ses représentants et de l’employeur impose la fixation de dates d’échéances communes aux parties qui leur sont indiquées par le courrier d’information dont la caisse doit seulement justifier de sa notification, peu important sa date de retrait effectif […] ». Ce raisonnement neutralise l’argument tiré d’un décalage entre envoi et réception, pourvu que les parties connaissent les bornes temporelles et qu’elles puissent utilement agir avant la clôture.

La production d’une attestation sur la chronologie d’accès aux pièces consacre l’idée d’une transmission au comité après l’enrichissement, ce qui répond au grief d’un dossier prématurément « figé ». L’examen repose donc sur la réalité du verrouillage au terme des trente jours, puis sur l’existence d’un accès complet pendant les dix jours suivants.

II. La sanction des irrégularités et la portée de la solution retenue

A. Une inopposabilité cantonnée à l’atteinte aux dix derniers jours

La Cour affirme la portée exacte de la sanction procédurale. Elle juge que « De plus, seule l’inobservation du délai de 10 jours au cours duquel les parties peuvent accéder à un dossier complet et figé et formuler des observations, est sanctionnée par l’inopposabilité, à l’égard de l’employeur, de la décision de prise en charge. (Cassation civile 2ème ; 5 juin 2025 n° 23-11.391 et 23-11.392). » Cette formulation reprend la ligne de la jurisprudence de contrôle et circonscrit l’inopposabilité à l’atteinte portant sur la phase déterminante, celle où le contradictoire se déploie à droit constant sur un dossier stabilisé.

Cette approche privilégie une lecture finaliste du texte : la garantie essentielle réside dans la faculté de consulter un dossier complet et de déposer des observations dans un temps utile. Les éventuelles anomalies antérieures, dès lors qu’elles n’affectent pas cette séquence décisive, ne suffisent pas à vicier l’opposabilité de la décision.

B. Conséquences pratiques pour l’instruction des dossiers et la sécurité juridique

La solution renforce la sécurité des calendriers procéduraux en fixant un ancrage stable à la saisine, tout en exigeant la preuve de l’information des échéances. Elle invite la caisse à documenter la notification et la chronologie de clôture, notamment lorsque l’instruction est dématérialisée, afin d’éviter tout soupçon de transmission anticipée d’un dossier incomplet.

Pour les employeurs, l’exigence se concentre sur la vigilance pendant la fenêtre utile. La consultation rapide du portail, la production d’éléments durant les trente jours, puis la formulation d’observations dans les dix jours, deviennent déterminantes. En pratique, la discussion contentieuse se déplacera vers la preuve d’un accès effectif au dossier « complet et figé » durant ces dix jours, ce qui concentre la critique sur la phase réellement protectrice des droits.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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