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Par un arrêt du 19 juin 2025, la Cour d’appel de Grenoble juge opposable une prise en charge fondée sur le tableau n°57A des maladies professionnelles. Un salarié, opérateur d’assemblage, déclare une tendinopathie de la coiffe gauche; ses tâches comportent vissage, brasage, tests et emballage, avec des abductions fréquentes supérieures à soixante degrés. La caisse reconnaît la maladie au titre du tableau; l’employeur invoque irrégularités d’instruction et conteste la liste limitative; le pôle social prononce l’inopposabilité, puis appel. La cour est saisie de deux questions: la régularité de l’instruction et la réunion des conditions du tableau; elle infirme le jugement et déclare la décision opposable. Elle précise d’abord l’étendue des droits procéduraux, puis apprécie les critères d’abduction du tableau n°57A au regard des éléments issus de l’enquête.
I. La régularité de l’instruction
A. Le contenu opposable du dossier communicable
L’employeur reprochait l’absence de certificats de prolongation parmi les pièces consultables. La cour rappelle la règle et en déduit une limitation fonctionnelle des pièces exigibles. Elle énonce: « Le dossier consultable mentionné à l’article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-356 du 23 avril 2019 applicable au litige, doit effectivement contenir les certificats médicaux détenus par la caisse ». La précision est immédiatement nuancée; la cour ajoute: « Il s’agit cependant des certificats médicaux descriptifs sur la base desquels s’est prononcée la caisse pour la reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie ou d’un accident ».
La solution est cohérente avec la finalité du contrôle d’opposabilité, centrée sur les éléments ayant fondé la reconnaissance et non sur la gestion des arrêts de travail. Elle en déduit l’absence d’atteinte au contradictoire et affirme: « Aucun grief ou manquement au respect du contradictoire ne peut donc être retenu de leur absence au dossier consulté par l’employeur ». La portée est claire; seule compte la matérialité des pièces motivantes.
B. La temporalité décisionnelle et l’absence de grief
L’employeur soutenait qu’une décision rendue le lendemain de la période d’observations supprime la phase de consultation simple. La cour écarte le grief au regard de l’économie du dispositif et de l’absence de sanction textuelle. Elle décide: « Le fait que la décision de la caisse intervienne dès après le délai de dix jours dont dispose l’employeur pour consulter le dossier et formuler des observations, n’est cependant susceptible de causer aucun grief à cet employeur, dès lors qu’il ne peut plus formuler des observations et que le dossier n’est plus susceptible d’être complété par l’assuré victime ».
Cette interprétation confirme que la seconde phase n’ouvre aucun droit à observations nouvelles ni à compléments d’instruction, rendant vain tout délai supplémentaire pour l’employeur. Le raisonnement est pragmatique; il sécurise le calendrier d’instruction, sans altérer l’information, dès lors que le dossier demeure consultable jusqu’à la décision.
II. La réunion des conditions du tableau n°57A
A. La preuve des expositions en abduction
Sur le fond, la cour retient une abduction répétée au-delà des seuils, à partir de l’enquête, de photographies de poste et de descriptions concordantes des opérations. L’absence de chiffrage direct est compensée par la pluralité d’étapes nécessitant des gestes en élévation, rendant crédible un cumul journalier conforme aux seuils du tableau. Les déclarations recueillies décrivent une sollicitation constante; ainsi: « Les dimensions des matériels que je monte impliquent un décollement des épaules quasi constant au cours de toutes mes activités ». De même lors des essais: « Les bras sont de nouveaux appelés à être décollés du corps ».
L’argument tiré d’une moindre sollicitation du membre non dominant ne convainc pas; les gestes apparaissent bilatéraux sur de nombreuses opérations documentées. L’appréciation globale des séquences de montage permet d’établir des abductions supérieures à soixante degrés durant au moins deux heures, ou supérieures à quatre-vingt-dix degrés durant au moins une heure.
B. Les effets de la présomption d’imputabilité
Constatant la réunion de la désignation et des travaux, la cour applique la présomption et déclare l’opposabilité. L’argument relatif à la moindre sollicitation du membre non dominant ne résiste pas, au vu des gestes bilatéraux révélés par les pièces d’enquête. La présomption opère pleinement dès lors que la maladie est désignée au tableau et que les conditions d’exposition sont remplies, sans exigence de preuve complémentaire du lien causal.
La portée est nette: la preuve de l’exposition s’appréhende globalement, sans chronométrage, dès lors que l’abduction apparaît répétée et substantielle au regard des opérations décrites. Cette méthode de preuve favorise la sécurité juridique des décisions de prise en charge et limite les contestations centrées sur des approximations de temps par tâche.