- Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre) LinkedIn
- Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Facebook
- Cliquez pour partager sur WhatsApp(ouvre dans une nouvelle fenêtre) WhatsApp
- Cliquez pour partager sur Telegram(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Telegram
- Cliquez pour partager sur Threads(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Threads
- Cliquer pour partager sur X(ouvre dans une nouvelle fenêtre) X
- Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Imprimer
Now using node v22.15.1 (npm v10.8.2)
Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2
Codex est déjà installé.
Lancement de Codex…
La Cour d’appel de Lyon, chambre sociale A, 2 juillet 2025, se prononce à propos d’un enchaînement contractuel entre deux sociétés d’un même groupe, d’une rupture conventionnelle contestée et d’une clause de non‑concurrence. La salariée, initialement engagée en 2016, a poursuivi ses fonctions sans interruption au sein d’une autre entité à compter de novembre 2018. Elle a signé une rupture conventionnelle en février 2019, puis a saisi la juridiction prud’homale en contestant la validité de cette rupture et en revendiquant ancienneté, indemnités et contrepartie de non‑concurrence. Le Conseil de prud’hommes de Lyon, 20 mai 2021, a retenu un transfert du contrat, annulé la rupture conventionnelle et condamné l’employeur. L’employeur a interjeté appel, tandis que l’ancienne société demandait sa mise hors de cause et, subsidiairement, garantie. La question de droit portait d’abord sur le fondement du transfert du contrat, puis sur le contrôle du formalisme de la rupture conventionnelle et, enfin, sur la mise en œuvre de la clause de non‑concurrence. La Cour retient l’absence de transfert automatique au sens de l’article L. 1224‑1, mais consacre un transfert volontaire avec maintien de l’ancienneté au 2 mai 2016. Elle déclare nulle la rupture conventionnelle pour défaut de remise de l’exemplaire signé au moment de la conclusion, en tire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et alloue les indemnités correspondantes. Elle condamne l’employeur au paiement de la contrepartie financière de la clause de non‑concurrence, faute de renonciation dans le délai contractuel.
I. Le sens de la décision
A. Rejet du transfert automatique au profit d’un critère d’entité économique autonome
La Cour écarte le transfert de plein droit pour défaut de transmission d’une entité économique autonome. Elle rappelle que « sa mise en œuvre suppose la réunion de deux conditions cumulatives (Plén., 16 mars 1990, n°89‑45.730 et n°86‑40.686) : – Le transfert d’une entité économique autonome ; – Le maintien de l’identité de l’activité transférée avec maintien ou poursuite de l’activité de cette entité par le repreneur ». Elle adopte ensuite la définition classique de l’entité, comme « ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit un objectif propre ». Faute de transmission de moyens matériels ou juridiques entre deux personnes morales demeurées indépendantes, l’article L. 1224‑1 n’était pas applicable.
Ce rejet, solidement motivé, illustre une lecture stricte des indices de continuité économique. L’absence de fonds, d’outils, de clientèle ou de structure fonctionnelle transférés caractérise ici l’angle mort du mécanisme automatique. La Cour s’inscrit ainsi dans le courant jurisprudentiel refusant d’assimiler de simples réorganisations capitalistiques à des mutations d’entités.
B. Reconnaissance d’un transfert volontaire et effets sur l’ancienneté et la mise hors de cause
La Cour retient ensuite l’existence d’un transfert volontaire, déduit d’indices concordants. Les échanges antérieurs faisaient apparaître la reprise de l’ancienneté et des congés payés, tandis que le nouveau contrat, conclu dès le lendemain, reprenait qualification et rémunération à l’identique, sans période d’essai. Elle en déduit que « seul le salarié peut se prévaloir de ce qu’il n’y a pas expressément consenti (Cass. soc., 10 avr. 2008, n°06‑45.887) », ce qui n’était pas le cas ici. Le transfert volontaire produit tous ses effets à compter de l’engagement au sein de la société d’accueil, avec ancienneté reconstituée au 2 mai 2016.
La solution opère un partage net des régimes. Le refus du transfert automatique n’empêche pas l’efficacité d’un transfert volontaire, pourvu que la volonté concordante et les éléments objectifs révèlent une continuité contractuelle réelle. La conséquence est double : fixation de l’ancienneté à la date initiale et mise hors de cause de l’ancien employeur, logique au regard de la substitution convenue.
II. La valeur et la portée
A. Le formalisme de la rupture conventionnelle, entre nullité et sécurité des consentements
La Cour applique avec rigueur le formalisme protecteur de la rupture conventionnelle. Elle cite, d’abord, que « la convention de rupture conventionnelle doit, à peine de nullité, être établie en deux exemplaires, dont l’un est remis au salarié » (Cass. soc., 6 févr. 2013, n°11‑27.000). Elle ajoute que « cette remise au salarié doit avoir lieu au moment de la conclusion de la convention, qui fait courir le délai de rétractation » (Cass. soc., 10 mai 2023, n°21‑23.041). Elle rappelle encore que « l’exemplaire remis au salarié doit être signé par les deux parties » (Cass. soc., 3 juill. 2019, n°17‑14.232), et qu’« il appartient à celui qui invoque la remise d’un exemplaire de la convention de rupture au salarié d’en rapporter la preuve ; à défaut, la convention de rupture est nulle » (Cass. soc., 23 sept. 2020, n°18‑25.770).
Constatant l’absence de preuve d’une remise concomitante d’un exemplaire signé, la Cour prononce la nullité et décide que « ladite convention est nulle, et s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ». Elle confirme l’indemnité de préavis, l’indemnité de licenciement et la réparation au titre du licenciement injustifié, après avoir rappelé l’encadrement barémique applicable. Elle précise que, compte tenu de l’effectif et de l’ancienneté, « l’indemnité […] doit‑elle être fixée entre 0,5 et 3,5 mois de salaire brut », retenant un montant de 10 000 euros, cohérent avec l’ancienneté retenue et la situation de l’entreprise.
Cette motivation renforce la sécurité des consentements, en rappelant l’exigence d’une remise effective et immédiate de l’exemplaire signé. La solution est parfaitement alignée avec la jurisprudence, et dissuade les pratiques approximatives de formalisation qui privent le salarié d’un délai de rétractation utile et éclairé.
B. La clause de non‑concurrence et la discipline de la renonciation dans le délai
La Cour accueille la demande au titre de la contrepartie, faute de renonciation dans le délai contractuel de quinze jours. Elle énonce, de manière pédagogique, qu’en pareille hypothèse, « il est tenu au paiement de la contrepartie contractuellement prévue de 15 % de la moyenne mensuelle du salaire brut prévu, et ce pour la durée d’effet de la clause, c’est‑à‑dire un an ». Elle liquide la somme due sur la base des paramètres non contestés, et réforme le jugement en ce sens.
La portée est pratique et immédiate. La décision rappelle que la renonciation suppose, outre un écrit non équivoque, le respect strict du délai stipulé, lequel s’articule avec la date de notification de la rupture. À défaut, l’obligation de contrepartie s’exécute intégralement, indépendamment d’un éventuel contentieux parallèle sur la validité de la rupture.
Sous‑partie 1. Cohérence systémique du raisonnement sur l’exécution loyale et les griefs
La Cour écarte la demande principale pour exécution déloyale au‑delà d’un préjudice moral spécifique, faute d’éléments extérieurs probants. Elle observe que le seul courrier de la salariée ne suffit pas à établir des faits de harcèlement, ni des manquements distincts des débats tranchés par la juridiction civile. Cette prudence probatoire est conforme à la charge allégée prévue par l’article L. 1154‑1, mais elle n’exonère pas le salarié de fournir un faisceau d’indices minimal et objectivé.
Cette approche évite une double réparation non justifiée et circonscrit l’enjeu indemnitaire aux postes vérifiés. Elle renforce la lisibilité de la décision, en mettant à part la nullité de la rupture conventionnelle, qui produit, à elle seule, des effets complets en matière de rupture injustifiée.
Sous‑partie 2. Conséquences pratiques pour les acteurs et lignes de force jurisprudentielles
Deux lignes de force se dessinent. La première est la dualité assumée entre transfert automatique et transfert volontaire, qui offre une voie validante lorsque les conditions d’entité économique font défaut, pourvu que la continuité contractuelle soit prouvée. La seconde est l’exigence d’un formalisme scrupuleux pour la rupture conventionnelle, où la preuve de la remise concomitante de l’exemplaire signé conditionne la validité de l’acte.
L’articulation avec le barème prud’homal, clairement rappelée, consolide la prévisibilité indemnitaire. Le traitement de la clause de non‑concurrence confirme l’efficacité des délais de renonciation et la centralité de l’écrit. L’ensemble compose une décision cohérente, ferme sur la preuve et fidèle aux standards jurisprudentiels en matière de mobilité contractuelle et de sécurisation des ruptures.