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La Cour d’appel de Lyon, 27 juin 2025, statue en matière prud’homale sur une difficulté strictement procédurale relative à l’effet dévolutif de l’appel. Un salarié, employé depuis de longues années puis licencié pour motif économique, contestait le bien-fondé de la rupture. Le juge prud’homal, le 15 mars 2022, avait retenu une cause réelle et sérieuse et débouté l’intéressé de ses demandes. L’appel a été interjeté, puis les débats ont été rouverts afin de discuter l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel au regard de l’article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017. Les prétentions opposaient, d’une part, l’appelant sollicitant la réformation au fond, et, d’autre part, l’intimée demandant la confirmation. La question de droit tenait à la nécessité de mentionner, dans la déclaration d’appel, les chefs du jugement critiqués pour provoquer la dévolution. La Cour répond que la déclaration, se bornant à une indication inexacte et ne visant pas les chefs, ne produit aucun effet dévolutif. Elle en déduit que la juridiction n’est saisie d’aucune demande, confirme le jugement et statue sur les dépens, sans appliquer l’article 700 du code de procédure civile.
I — Le régime de l’effet dévolutif au regard de l’article 562 du code de procédure civile
A — L’exigence de désignation des chefs de jugement critiqués
L’article 562, tel qu’interprété après la réforme de 2017, commande une identification précise des chefs du jugement déférés à la censure. La Cour rappelle le principe en des termes nets: « Attendu qu’il résulte de ce texte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’ effet dévolutif n’opère pas ; ». Ce rappel s’inscrit dans la logique d’un appel à objet déterminé par l’acte d’appel, et non par les seules conclusions ultérieures.
La motivation souligne que l’insuffisance tient autant à l’absence de chefs identifiés qu’à l’erreur sur le dispositif visé. La Cour retient ainsi que « Qu’elle ne mentionne donc pas les chefs de jugement qui sont critiqués », ce qui rend l’acte impropre à opérer la dévolution. L’exigence n’est pas formelle au sens d’un ritualisme vide, mais fonctionnelle: elle borne le périmètre du litige porté devant la juridiction du second degré.
B — La vérification concrète de l’insuffisance de l’acte d’appel
La Cour procède à une analyse concrète de la déclaration déposée. L’acte se limite à viser une formule générale et, surtout, se réfère à une disposition absente du dispositif du jugement, ce qui révèle une discordance entre l’objet annoncé et la décision effectivement attaquée. L’absence d’annexe référencée aggrave l’insuffisance, dans la mesure où aucune pièce ne vient suppléer l’acte principal.
Cette vérification conduit à la conséquence procédurale décisive. La Cour énonce que « la cour constate qu’elle n’est saisie d’aucune demande ». L’équilibre du dispositif de l’appel impose alors la confirmation du jugement, non sur un contrôle au fond, mais par défaut de dévolution. La solution traduit une application rigoureuse de l’article 562, conforme à l’objectif de rationalisation de l’instance d’appel.
II — La portée pratique et l’appréciation critique de la sanction retenue
A — Une sanction efficace mais exigeante au regard du droit d’appel
L’absence d’effet dévolutif, en cas de désignation défaillante des chefs critiqués, consacre une sanction particulièrement incisive. Elle ne frappe pas d’irrecevabilité l’appel lui-même, mais stérilise sa portée, privant l’appelant de tout débat au fond. Ce mécanisme préserve la lisibilité du litige et la bonne administration de la justice, en évitant des dévolutions implicites et incertaines.
Cette sévérité interroge pourtant l’effectivité du droit d’appel, spécialement en contentieux prud’homal où les enjeux individuels sont élevés. La solution demeure cependant justifiée par la fonction structurante de l’acte d’appel, instrument directeur de l’instance. L’exigence de précision, clairement posée, demeure à la portée des praticiens dès lors qu’une vigilance rédactionnelle minimale est observée.
B — Les enseignements opérationnels pour la pratique contentieuse
L’arrêt invite à une méthodologie sûre dans la rédaction des actes d’appel. D’abord, il convient de viser les chefs du dispositif, seuls dévolutifs, et non des motifs ou des formulations approximatives. Ensuite, chaque chef doit être individualisé, de manière à circonscrire sans équivoque le périmètre de la réformation sollicitée. Le recours à une annexe référencée dans l’acte peut utilement détailler les chefs, à condition d’être expressément mentionnée.
La décision attire aussi l’attention sur les risques d’erreurs de plume concernant le sens du jugement déféré. Une relecture du dispositif, distinct des motifs, s’impose avant tout dépôt. En cas d’incertitude, la désignation cumulative et ordonnée des chefs contestés, corrélée aux prétentions chiffrées, sécurise la dévolution. Cette discipline procédurale évite que la juridiction d’appel, faute d’être valablement saisie, confirme le jugement par simple défaut d’objet.
L’économie générale de la solution est cohérente. La Cour d’appel de Lyon fait primer l’office d’appel, strictement circonscrit par l’acte introductif du second degré, sur toute velléité de recomposition a posteriori du litige par les seules conclusions. La confirmation du jugement s’ensuit logiquement, la Cour n’étant pas saisie, et la mise à l’écart de l’article 700 du code de procédure civile repose sur des considérations d’équité adaptées à cette issue procédurale.