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La Cour d’appel de Lyon, 3e chambre A, 4 septembre 2025, statue sur l’étendue d’un engagement de caution bancaire consenti en 2003 au profit d’un importateur et d’un établissement financier intervenant dans un réseau de distribution automobile. La débitrice, concessionnaire agréé, a été placée en redressement, puis en liquidation. Après mises en demeure, l’établissement financier et l’importateur ont assigné la caution, obtenant sa condamnation par le tribunal de commerce de Lyon le 6 septembre 2021.
L’appel interjeté par la caution conteste, d’une part, l’effet d’une fusion-absorption intervenue en 2003 sur l’assiette temporelle de la garantie, et, d’autre part, l’efficacité de la subrogation invoquée par l’établissement financier pour réclamer le prix de véhicules livrés postérieurement. D’autres chefs portent sur des agios stipulés par la convention de financement, sur des sommes versées pour des véhicules non livrés, ainsi que sur des véhicules d’occasion restitués par des locataires avec option d’achat. La cour infirme partiellement le jugement, rejette les prétentions de l’importateur, limite celles de l’établissement financier aux dettes directement garanties et fixe le recours de la caution au passif de la procédure collective.
La question de droit tient à la délimitation objective et temporelle du cautionnement quand le créancier initial a disparu par fusion, à la portée de la subrogation sur un cautionnement déterminé, et à l’articulation avec la procédure collective, en particulier l’opposabilité d’une admission de créance et la décharge éventuelle de la caution sur le fondement de l’article 2314 du code civil. La solution, d’inspiration classique, affirme que la transmission universelle n’élargit pas l’assiette de la garantie, que la subrogation ne franchit pas le périmètre du cautionnement, et que les dettes directes issues des conventions financées demeurent couvertes.
I. Transmission universelle et limites du cautionnement
A. La fusion-absorption et la borne temporelle des dettes garanties
La cour rappelle une règle de portée générale, qui gouverne l’économie du cautionnement face aux opérations sur sociétés: «En cas de dissolution d’une société par voie de fusion-absorption par une autre société, l’engagement de la caution garantissant le paiement de sommes consenti à la première demeure pour les obligations nées avant la dissolution de celle-ci.» La formulation lie la garantie à la date de dissolution, posant une borne temporelle ferme et évitant que le cautionnement ne se mue en garantie à durée indéfinie au bénéfice du successeur universel.
La motivation s’appuie sur l’article L. 236-3 du code de commerce, sans en tirer d’effet extensif au détriment de la caution. La transmission universelle n’altère pas l’objet du lien de garantie, borné par l’engagement initial et la date de disparition du créancier garanti. La solution rejoint la logique antérieurement consacrée, que le nouvel article 2318 du code civil a ultérieurement consacrée pour l’avenir. Elle assure la sécurité des engagements et la prévisibilité du risque, sans priver le bénéficiaire de ses actions pour les dettes nées avant la dissolution.
B. La subrogation et le périmètre personnel de la garantie
La cour distingue utilement les créances directes de l’établissement financier et celles cédées ou subrogées par l’importateur. Elle retient que la demande en prix de véhicules vendus procède d’une subrogation étrangère au champ initial du cautionnement au profit de l’importateur disparu par fusion. La règle gouvernant l’effet relatif de la subrogation est exprimée sans équivoque: «La subrogation ne pouvant conférer au subrogé plus de droits que n’en disposait le subrogeant.» La demande en prix échoue donc, car elle méconnaît la double limite temporelle et personnelle de la garantie.
Cette solution illustre la fidélité du juge à la lettre de l’engagement et au principe de spécialité du cautionnement. Elle prévient l’absorption silencieuse de dettes nouvelles dans un engagement ancien, au seul bénéfice d’un circuit de cession ou de subrogation. La cohérence technique est nette: le cautionnement suit la dette garantie telle qu’elle existait dans le chef du créancier initialement désigné, ni plus ni moins.
II. Dettes directement garanties et interactions avec la procédure collective
A. Les agios stipulés et la dette directe envers le financeur
La cour qualifie les agios comme accessoires d’une dette directe née de la convention de financement opposable à la caution. Elle rappelle la stipulation contractuelle: «des intérêts moratoires seront appliqués jusqu’à parfait paiement et seront calculés sur la base de l’Euribor 1 mois + 6,5% à compter de la date de l’expiration du financement.» Elle constate l’émission régulière des factures et l’établissement probatoire suffisant: «La créance de la société intimée est justifiée par les pièces produites.»
La condamnation de la caution au paiement des agios découle alors du principe de solidarité librement accepté et du caractère déterminé de l’obligation financée. La solution respecte la distinction structurante opérée plus haut: les dettes nées de la relation directe entre la débitrice et l’établissement financier entrent dans l’assiette du cautionnement, quand les créances dérivées d’un autre lien contractuel restent hors de portée. Elle maintient une ligne claire entre les flux de financement et la chaîne commerciale.
B. Véhicules d’occasion, action en revendication et article 2314
S’agissant des véhicules d’occasion restitués dans le cadre de locations avec option d’achat, la cour retient une appropriation indue par la débitrice et écarte le moyen de décharge de la caution, fondé sur une prétendue abstention fautive du créancier. La formule est nette et factuelle: «La caution reproche à tort à l’établissement de crédit de ne pas avoir mis en oeuvre l’action en revendication des véhicules.» La faute du créancier n’est pas établie, faute de preuve de la présence des biens dans le patrimoine lors de l’ouverture de la procédure.
La discussion sur l’opposabilité d’une admission de créance en procédure collective est rappelée par un principe constant: «L’admission définitive de la créance au passif du débiteur en procédure collective est opposable à la caution en ce qui concerne l’existence et le montant de la créance.» La cour constate cependant l’absence de caractère définitif dans l’espèce, puis statue sur le fond. Le rejet de la décharge sollicitée sous l’article 2314 s’explique ainsi par la carence probatoire quant à la perte des sûretés ou actions, condition nécessaire à la décharge partielle.
L’arrêt fixe corrélativement le recours de la caution au passif, conformément au mécanisme légal de subrogation personnelle après paiement. L’économie d’ensemble demeure équilibrée: limitation des demandes étrangères à l’assiette du cautionnement, condamnation sur les dettes directes prouvées, et neutralisation d’une défense de décharge insuffisamment étayée.