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Cour d’appel de Lyon, chambre sociale D, 9 septembre 2025. L’arrêt tranche un appel en matière d’accident du travail et d’opposabilité des arrêts et soins. Le litige naît d’un accident déclaré le 21 juillet 2015, sur un poste d’agent de production. L’employeur relate un fût en plastique déformé, puis la tentative de rattrapage et une douleur dorsale immédiate. L’organisme a pris en charge l’accident au titre de la législation professionnelle le 31 juillet 2015.
La contestation porte, non sur l’existence de l’accident, mais sur l’imputabilité des arrêts et soins allégués ultérieurement. Après un recours amiable demeuré infructueux, la juridiction de première instance a déclaré inopposables à l’employeur les arrêts et soins liés à l’accident. L’organisme a interjeté appel. À l’audience d’appel du 10 juin 2025, l’appelant n’a ni comparu ni sollicité de dispense, tandis que l’intimé a demandé confirmation du jugement.
La question posée est celle des effets de l’oralité en appel social lorsque l’appelant est défaillant. Plus précisément, la cour doit dire si l’absence de présentation orale prive l’appel de tout soutien et commande la confirmation pure et simple du jugement. La décision répond par l’affirmative en s’appuyant sur le principe suivant : « les parties présentent oralement à l’audience leurs prétentions et les moyens à leur soutien ». Elle ajoute que « le juge n’est tenu de répondre qu’aux moyens et prétentions présentées à l’audience ». En conséquence, « l’appel n’est pas soutenu », et le jugement est confirmé, l’appelant étant en outre condamné au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
I. L’office du juge d’appel en procédure orale
A. Le rappel du principe d’oralité et sa fonction délimitative
La cour d’appel fonde son raisonnement sur l’article 446-1 du code de procédure civile. Elle en retient la règle structurante : la contradiction se forme et se circonscrit à l’audience, par la présentation orale des prétentions et moyens. D’où l’affirmation centrale : « les parties présentent oralement à l’audience leurs prétentions et les moyens à leur soutien ». Cette exigence n’est pas cosmétique. Elle conditionne l’existence même du débat utile et borne l’office du juge aux moyens effectivement soutenus.
Cette délimitation est redoublée par la seconde assertion de l’arrêt : « le juge n’est tenu de répondre qu’aux moyens et prétentions présentées à l’audience ». Le juge n’a pas à suppléer la carence d’une partie défaillante, sauf hypothèses légales distinctes. La procédure orale confère ainsi à l’audience une fonction constitutive des prétentions justiciables, ce que la cour explicite sans détour.
B. L’application immédiate à la défaillance de l’appelant
La cour constate l’absence de l’appelant, régulièrement convoqué. Elle en tire la conséquence procédurale décisive : « La cour constate donc qu’elle n’est saisie d’aucune demande à l’appui de l’appel […], de sorte que l’appel n’est pas soutenu ». L’absence prive l’instance d’appel de tout contenu opératoire du côté de l’appelant. Le débat se réduit alors aux prétentions de l’intimé, qui sollicite la confirmation.
Dans cette configuration, la cour n’a ni à reprendre le fond du litige, ni à explorer des moyens non présentés. La solution coule alors de source : « Dès lors, le jugement ne pourra qu’être confirmé, ainsi que le demande la partie intimée ». La confirmation s’accompagne d’une condamnation sur le fondement de l’article 700, laquelle sanctionne la carence et répare les frais exposés par l’intimé.
II. Valeur et portée de la solution retenue
A. Une lecture cohérente de l’oralité, garante de la loyauté procédurale
La solution confirme une conception ferme de l’oralité, peu compatible avec des conclusions dormantes non soutenues. Elle favorise la clarté du contradictoire, puisqu’elle contraint la partie appelante à porter effectivement ses moyens au débat. Ce formalisme mesuré renforce la loyauté procédurale et sécurise l’office du juge, qui n’a pas à deviner des moyens non articulés.
On peut regretter un effet potentiellement radical lorsqu’un écrit a été versé mais non repris. Toutefois, la règle vise l’égalité des armes. Elle prévient les procès par écrit fantômes en matière sociale où la représentation n’est pas toujours obligatoire. La décision rappelle ainsi que l’audience demeure le lieu du droit, sauf dispense régulièrement obtenue.
B. Incidences pratiques en contentieux AT/MP et équilibre des intérêts
En matière d’accident du travail, la décision de première instance avait déclaré inopposables les arrêts et soins. La confirmation par défaut de soutien d’appel maintient cette inopposabilité, avec des conséquences assurantielles immédiates pour l’employeur et l’organisme. L’intensité de la présomption d’imputabilité ne peut être discutée en appel si elle n’est pas portée oralement au débat.
La portée de l’arrêt dépasse le seul dossier. Les acteurs du contentieux social doivent sécuriser leur présence ou demander une dispense d’oralité. À défaut, l’appel se vide de substance et l’économie du jugement persiste, y compris sur des enjeux techniques tels que la consolidation, la causalité des soins, et l’assiette financière. La condamnation au titre de l’article 700 parachève cet équilibre incitatif.