Cour d’appel de Montpellier, le 11 septembre 2025, n°24/05691

Par un arrêt du 11 septembre 2025, la Cour d’appel de Montpellier, 3e chambre civile, confirme une ordonnance de référé rendue en matière commerciale. Le litige naît de travaux de faux plafonds réalisés dans un hôtel, sur devis accepté, avec un premier acompte payé puis un solde contesté. L’acheteur des travaux produit des photographies et des attestations, tandis qu’un constat d’huissier relève l’achèvement apparent des ouvrages à une date proche. En première instance, le juge des référés refuse l’expertise, accorde une provision correspondant au solde du devis, et statue sur les frais irrépétibles. Devant la Cour, l’appelant sollicite une expertise judiciaire et le rejet de la demande provisionnelle, l’intimé requérant la confirmation intégrale de l’ordonnance. La question posée tient aux conditions de l’expertise en référé et à la caractérisation d’une obligation non sérieusement contestable justifiant une provision.

I. Le refus d’expertise en référé fondé sur le défaut de motif légitime

A. Motif légitime et interdiction de suppléer la carence probatoire

La Cour rappelle que l’expertise sollicitée en référé exige un motif légitime, au sens de l’article 145 du code de procédure civile, distinct d’une recherche aléatoire. Elle énonce que « une telle mesure ne pouvant être ordonnée en vue de suppléer la carence d’une des parties dans l’administration de la preuve ». Cette formule consacre une ligne constante: la mesure d’instruction ne pallie pas une insuffisance probatoire manifeste, elle l’éclaire lorsqu’un besoin objectif apparaît.

B. Appréciation concrète des éléments produits et insuffisance de preuve

Les juges relèvent aussi que certaines attestations « ne répondent pas aux exigences de l’article 202 du code de procédure civile » et ne rapportent pas des faits constatés. La Cour souligne encore, au vu d’un constat, que « les plaques de plâtre résistantes au feu revêtent l’ensemble des plafonds des trois étages de l’immeuble ». Faute d’éléments précis sur des malfaçons alléguées et d’un motif légitime, l’expertise est refusée, l’instance de référé ne pouvant combler une défaillance probatoire.

II. La provision en référé et l’obligation non sérieusement contestable

A. Critères de caractérisation et application aux circonstances de la cause

En application de l’article 873, alinéa 2, du code de procédure civile, une provision s’ordonne si l’obligation invoquée « n’est pas sérieusement contestable ». La Cour se fonde sur un constat récent mentionnant l’acceptation du devis, le versement d’un acompte et la conformité de la facture au devis accepté. Les juges retiennent, en outre, l’absence de preuve d’un abandon de chantier et la carence de descriptions circonstanciées de désordres, pourtant allégués dans la procédure. Dans ces conditions, l’obligation de régler le solde du devis ne souffre pas de contestation sérieuse, justifiant la confirmation de la provision allouée en première instance.

B. Portée de la décision et enseignements pour les praticiens

La décision confirme une exigence de rigueur probatoire préalable: l’article 145 n’autorise pas des investigations exploratoires destinées à bâtir a posteriori une contestation du prix. Les acteurs doivent consigner sans délai les désordres par constat, dater les pièces, solliciter des attestations régulières, et distinguer clairement malfaçons alléguées et renégociation commerciale. La sévérité apparente demeure conforme à l’économie du référé, outil de protection de créances certaines, et à l’impératif de sécurité des flux financiers des chantiers. Elle rappelle enfin que seule une contestation étayée, précise et documentée peut faire obstacle à la provision, les griefs généraux n’atteignant pas le seuil probatoire requis.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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