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L’arrêt rendu le 19 juin 2025 par la Cour d’appel de Montpellier, troisième chambre sociale, statue sur les effets procéduraux d’un désistement d’appel en matière de contentieux du recouvrement des cotisations sociales. Cette décision illustre le régime juridique du désistement unilatéral et ses conséquences sur l’instance d’appel.
Un cotisant avait formé opposition à une contrainte délivrée par l’organisme de recouvrement, portant sur des cotisations et majorations de retard afférentes au quatrième trimestre 2018 et au premier trimestre 2019, pour un montant de 10 365 euros. Par jugement du 19 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Perpignan avait déclaré cette opposition recevable mais non fondée, validant la contrainte pour son entier montant. L’opposant avait alors interjeté appel par lettre recommandée du 2 mars 2021.
Devant la cour d’appel, l’appelant, régulièrement convoqué par lettre recommandée distribuée le 6 mars 2025, ne s’est ni présenté ni fait représenter à l’audience du 10 avril 2025. Il avait toutefois adressé un courrier daté du 31 mars 2025, reçu le 1er avril suivant, indiquant se désister de son appel. L’organisme intimé, représenté à l’audience, a accepté ce désistement.
La question posée à la cour était de déterminer si le désistement d’appel formulé par l’appelant produisait ses effets de plein droit et quelles en étaient les conséquences sur l’instance et la décision de première instance.
La Cour d’appel de Montpellier constate l’extinction de l’instance par l’effet du désistement, lequel emporte acquiescement au jugement, et laisse les frais du recours à la charge de l’appelant.
La cour applique le régime du désistement unilatéral en l’absence de circonstances exigeant l’acceptation de la partie adverse (I), avant de tirer les conséquences procédurales attachées à ce désistement (II).
I. L’application du régime du désistement unilatéral
La cour caractérise d’abord les conditions du désistement (A), puis examine l’absence de nécessité d’acceptation par l’intimé (B).
A. La qualification du désistement au regard de l’article 400 du code de procédure civile
La cour relève que l’appelant s’est « désisté de son recours dans son courrier du 31 mars 2025 et a renoncé à la procédure d’appel en application des dispositions de l’article 400 du code de procédure civile ». Cette qualification emporte des conséquences importantes. L’article 400 distingue en effet le désistement d’instance, qui éteint la procédure sans mettre fin au droit d’agir, du désistement d’action, qui anéantit le droit substantiel lui-même.
En l’espèce, le désistement opéré constitue un désistement d’appel au sens strict. L’appelant renonce à poursuivre l’instance engagée devant la juridiction du second degré. Ce désistement ne porte pas sur le droit d’agir lui-même mais sur la voie de recours exercée. La jurisprudence de la Cour de cassation considère que le désistement d’appel s’analyse comme un désistement d’instance, l’appelant abandonnant la procédure sans pour autant renoncer définitivement à tout recours, sous réserve des délais de prescription.
La cour retient que ce désistement a été exprimé de manière non équivoque par un courrier adressé préalablement à l’audience. Cette manifestation de volonté suffit à caractériser l’intention de l’appelant de mettre fin à l’instance d’appel.
B. L’absence de nécessité d’acceptation en l’espèce
L’arrêt rappelle les termes de l’article 401 du code de procédure civile, selon lequel « le désistement de l’appel n’a besoin d’être accepté que s’il contient des réserves ou si la partie à l’égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ». La cour constate qu’aucune de ces deux hypothèses n’est caractérisée.
D’une part, le désistement formulé par l’appelant ne contient aucune réserve. Un désistement assorti de réserves, par exemple quant aux frais ou quant à la possibilité de former un nouveau recours, nécessiterait l’accord de l’adversaire pour produire effet. En l’absence de telles réserves, le désistement est pur et simple.
D’autre part, l’organisme intimé n’avait formé ni appel incident ni demande incidente. L’exigence d’acceptation dans cette hypothèse vise à protéger les droits de la partie qui, ayant elle-même contesté le jugement ou formé des demandes propres, ne saurait voir ses prétentions anéanties par la seule volonté de l’appelant principal.
La cour relève néanmoins que l’intimé a accepté le désistement à l’audience. Cette acceptation, bien que juridiquement superflue en l’espèce, témoigne de l’absence de tout litige sur le principe même de l’extinction de l’instance. Elle sécurise la décision en prévenant toute contestation ultérieure sur la régularité du désistement.
II. Les conséquences procédurales du désistement d’appel
Le désistement entraîne l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour (A), ainsi que des effets sur le jugement de première instance et la charge des frais (B).
A. L’extinction de l’instance et le dessaisissement de la juridiction
La cour « constate le dessaisissement de la cour et l’extinction de l’instance ». Ces deux effets sont indissociables. L’extinction de l’instance résulte directement du désistement, qui met fin au lien juridique d’instance unissant les parties devant la juridiction saisie. Le dessaisissement en est la conséquence pour la juridiction elle-même, qui perd sa potestas judicandi sur le litige.
Ce dessaisissement est immédiat dès lors que le désistement ne nécessite pas d’acceptation. La cour n’a plus à statuer sur le fond du litige et ne peut que constater les effets du désistement. Sa décision revêt un caractère purement déclaratif, non constitutif. Elle ne tranche aucune contestation au fond mais prend acte de la volonté de l’appelant.
L’arrêt illustre ainsi le caractère extinctif du désistement d’appel. L’instance d’appel disparaît rétroactivement, comme si elle n’avait jamais existé sur le plan procédural. Toutefois, les actes accomplis au cours de cette instance, notamment les notifications et convocations, conservent leur réalité matérielle pour la détermination des frais.
B. L’acquiescement au jugement et la charge des dépens
La cour rappelle que le désistement d’appel « emporte acquiescement au jugement », conformément à l’article 403 du code de procédure civile. Cette règle distingue le désistement d’appel du désistement d’instance en première instance. L’acquiescement au jugement signifie que l’appelant renonce définitivement à contester la décision de première instance, qui acquiert autorité de chose jugée.
Le jugement du tribunal judiciaire de Perpignan du 19 janvier 2021, validant la contrainte pour son entier montant, devient donc définitif. L’opposant ne pourra plus remettre en cause cette décision par aucune voie de recours ordinaire. La contrainte ainsi validée constitue un titre exécutoire permettant à l’organisme de recouvrement de poursuivre le recouvrement forcé des cotisations et majorations.
S’agissant des frais, la cour applique l’article 399 du code de procédure civile, selon lequel les dépens d’appel sont à la charge de l’appelant qui se désiste. Elle rappelle également qu’à défaut de convention contraire, le désistement emporte soumission de payer les frais de l’instance éteinte. L’appelant supporte ainsi l’intégralité des frais engendrés par l’instance d’appel qu’il a lui-même initiée puis abandonnée.
Cette solution procédurale classique sanctionne l’attitude de la partie qui, après avoir mobilisé l’appareil judiciaire et contraint son adversaire à se défendre, renonce à poursuivre son recours. Elle participe de la bonne administration de la justice en décourageant les appels dilatoires.