Cour d’appel de Montpellier, le 19 juin 2025, n°21/02328

Now using node v22.15.1 (npm v10.8.2)
Utilisation de Node.js v20.19.4 et npm 10.8.2
Codex est déjà installé.
Lancement de Codex…
Rendue par la cour d’appel de Montpellier le 19 juin 2025, la décision tranche un litige relatif à l’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle consécutif à un accident du travail. Le cœur du débat porte sur la date d’appréciation de l’état séquellaire et la méthode d’application du barème indicatif d’invalidité en matière d’accidents du travail. La question consiste à déterminer si des éléments cliniques révélés postérieurement à la consolidation peuvent infléchir le taux initialement retenu.

Les faits sont simples et pertinents. Une salariée, auxiliaire de soins en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, a été victime d’un accident le 11 février 2017. Le certificat médical initial a décrit un lumbago, et la prise en charge au titre de la législation professionnelle est intervenue. L’organisme social a fixé la consolidation au 31 juillet 2018, puis a attribué un taux d’IPP de 10 %, motivé par des séquelles douloureuses sans signe objectif à l’examen ni amyotrophie.

La procédure est linéaire. Saisie d’un recours, la juridiction du pôle social du tribunal judiciaire de Montpellier, par jugement du 2 mars 2021, a porté le taux à 15 % au vu d’un examen de 2021 signalant un Lasègue positif. L’organisme social a régulièrement interjeté appel. Devant la cour d’appel de Montpellier, la demanderesse à l’appel a soutenu la conformité du taux de 10 % au barème indicatif, au regard d’un examen clinique antérieur complet et cohérent.

La question de droit se resserre alors sur le moment pertinent d’évaluation des séquelles indemnisables et l’autorité du barème indicatif comme guide. La décision rappelle le principe prétorien selon lequel « le taux d’incapacité permanente partielle doit être fixé en fonction de l’état séquellaire au jour de la consolidation […] sans que puissent être pris en considération des éléments postérieurs ». La solution adoptée infirme le jugement et fixe à 10 % l’IPP, en se fondant sur le barème pour des « douleurs et gêne fonctionnelle discrètes du rachis dorso-lombaire » et l’absence de signe objectif à la date utile.

I. Le sens de la décision: la fixation du taux à la date de consolidation

A. Les critères légaux d’évaluation et la fonction du barème indicatif

La cour d’appel rappelle les textes de référence, qui constituent l’ossature méthodologique de l’évaluation. Elle énonce que « le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales […] ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle ». Cette formule, issue du code de la sécurité sociale, impose une approche globale, qui accorde une place centrale aux données cliniques objectivables.

Dans ce cadre, le barème indicatif d’invalidité opère comme instrument d’harmonisation, sans rigidité excessive. La cour souligne que, pour des douleurs et une gêne fonctionnelle discrètes du rachis dorso-lombaire, « un taux d’incapacité permanente partielle de 5 à 15 % » est préconisé. Le choix de 10 % s’inscrit dans cette fourchette, sur la base d’un examen qui ne révélait ni signe de radiculalgie évocateur, ni amyotrophie. Le raisonnement articule donc le cadre légal et la gradation barémique, en respectant l’étendue d’appréciation nécessaire.

B. La temporalité de l’évaluation et l’exclusion des éléments postérieurs

La motivation se structure autour d’une temporalité stricte, qui constitue la clef de voûte du litige. La cour mentionne une jurisprudence constante selon laquelle « le taux […] doit être fixé en fonction de l’état séquellaire au jour de la consolidation », et réaffirme que des constatations cliniques postérieures ne sauraient rétroagir. L’examen expertal de 2021 signalant un « Lasègue droit à 40° » ne peut donc influer sur l’appréciation cristallisée au 31 juillet 2018.

La solution protège la cohérence de l’indemnisation légale, en évitant des révisions implicites fondées sur l’évolution naturelle ou iatrogène postérieure. Elle maintient la distinction entre évaluation du dommage consolidé et survenance d’éléments nouveaux, lesquels relèvent d’autres mécanismes éventuels. La cour s’inscrit ainsi dans une ligne cohérente, qui circonscrit le débat probatoire à la date de référence.

II. La valeur et la portée: cohérence jurisprudentielle et implications pratiques

A. Une solution juridiquement équilibrée et conforme à la méthode

La décision se montre fidèle aux exigences de précision et de motivation des juges du fond, traditionnellement souverains pour fixer le taux. Elle contrôle la pertinence de la fourchette barémique au regard des constatations médicales contemporaines de la consolidation. Elle admet que le barème reste indicatif, mais qu’il offre un cadre rationnel pour éviter des divergences excessives entre dossiers comparables.

Cette cohérence se nourrit d’une double fidélité, aux textes et à la jurisprudence citée. En rappelant que « des éléments postérieurs à la consolidation » ne doivent pas être pris en considération, la cour ferme la porte à une augmentation liée à des symptômes apparus tardivement. Le raisonnement protège l’égalité de traitement, limite les aléas contentieux et renforce la prévisibilité des solutions.

B. Des enseignements pratiques pour l’expertise médicale et le contentieux social

La portée pratique est nette pour la conduite des expertises et la charge de la preuve médicale. Les parties doivent concentrer leurs éléments cliniques, imageries et tests fonctionnels sur la période antérieure à la consolidation, afin de sécuriser la base d’évaluation. Une démarche structurée de recueil des pièces à cette date devient déterminante, tant pour l’organisme social que pour l’assuré.

L’arrêt invite aussi à une vigilance sur la qualification des séquelles, entre « douleurs et gêne fonctionnelle discrètes » et signes objectifs neurologiques. En cas d’ambiguïté, l’argumentation doit articuler clairement l’absence ou la présence d’atteintes objectivées avant la consolidation. L’encadrement par le barème, rappelé ici, facilite une graduation proportionnée et contribue à une jurisprudence stable dans les litiges d’IPP.

📄 Circulaire officielle

Nos données proviennent de la Cour de cassation (Judilibre), du Conseil d'État, de la DILA, de la Cour de justice de l'Union européenne ainsi que de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

Maître Kohen, avocat à Paris en droit pénal et droit du travail, accompagne ses clients avec rigueur et discrétion dans toutes leurs démarches juridiques, qu'il s'agisse de procédures pénales ou de litiges liés au droit du travail.

En savoir plus sur Kohen Avocats

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Poursuivre la lecture