Cour d’appel de Montpellier, le 24 juin 2025, n°24/04990

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Rendue par la Cour d’appel de Montpellier, chambre commerciale, le 24 juin 2025, la décision commente la recevabilité d’un recours dirigé contre une ordonnance du juge-commissaire complétant la liste des créances. Une société de bâtiment, d’abord en redressement puis en liquidation, avait vu un créancier social déclarer une créance partiellement provisionnelle, ensuite définitivement chiffrée. Le juge-commissaire, par ordonnance du 16 septembre 2024, a ordonné l’inscription de cette créance au relevé pour un montant déterminé. La dirigeante puis la société ont interjeté appel de cette ordonnance, avant que la juridiction d’appel ne relève d’office un moyen d’irrecevabilité et invite les parties à s’en expliquer par note en délibéré. La question posée tient à la voie de recours ouverte contre une ordonnance qui ne statue pas sur l’admission d’une créance, mais se borne à compléter l’état déposé au greffe. La juridiction retient que « Dans le droit des procédures collectives, la nature de l’ordonnance rendue par le juge-commissaire détermine la voie de recours qui lui est applicable », en jugeant l’appel irrecevable, au profit du recours devant le tribunal selon l’article R. 621-21.

I. La qualification de l’ordonnance et la détermination de la voie de recours

A. Une ordonnance de complément de l’état des créances, non une décision d’admission

La décision replace l’acte contesté dans l’économie des articles L. 622-24 et R. 624-2, qui autorisent la conversion ultérieure d’une déclaration provisionnelle en montant définitif. Elle constate que le juge-commissaire n’a pas tranché un différend d’admission, mais a entériné l’inscription d’un montant désormais fixé, à l’initiative du mandataire. Le raisonnement, strict, dissocie la simple mise à jour de l’état, étrangère à la vérification contradictoire, du jugement d’admission pris après observations du débiteur. Cette qualification commande la voie de recours, en excluant la saisine directe de la juridiction d’appel.

La motivation s’appuie sur une formule de principe, dépourvue d’ambiguïté, qui oriente l’ensemble de la solution. En rappelant que « la nature de l’ordonnance […] détermine la voie de recours », le juge recentre la discussion sur la typologie fonctionnelle des ordonnances, plutôt que sur les griefs périphériques tenant aux décomptes ou aux mentions au registre.

B. Le principe du recours devant le tribunal et les exceptions d’appel immédiat

La juridiction d’appel réaffirme le droit commun de l’article R. 621-21, alinéa 4, du code de commerce. Elle énonce que « Le recours ouvert contre les ordonnances du juge-commissaire doit être porté devant le tribunal […] et ce n’est qu’exceptionnellement que le recours […] est porté devant la cour d’appel », à raison de textes spéciaux. Sont cités, à titre d’exemples, l’article R. 624-7 pour l’admission des créances et les articles R. 642-37-1 et R. 642-37-3 pour la réalisation des actifs.

La solution découle alors d’un syllogisme simple. L’ordonnance en cause ne statue ni sur l’admission ni sur le rejet, et n’entre dans aucune catégorie bénéficiant d’un appel direct. En conséquence, « aucun texte ne prévoit que l’ordonnance du juge-commissaire, qui se borne à compléter la liste des créances […] puisse être directement frappée d’appel devant la cour », ce qui justifie l’irrecevabilité prononcée.

II. La robustesse de la solution et ses effets pratiques

A. Une solution conforme à l’économie des procédures collectives

L’option retenue est cohérente avec la structure centralisée de la vérification des créances. Le contentieux de l’admission se concentre devant le juge-commissaire, sous le contrôle du tribunal, afin d’assurer célérité, unité et hiérarchisation des voies de recours. Autoriser l’appel immédiat d’un simple complément reviendrait à dédoubler les circuits et à contourner la phase de vérification contradictoire. L’arrêt réaffirme utilement la frontière entre l’inventaire évolutif des déclarations et le jugement sur l’existence, le montant et le rang.

La réponse donnée aux arguments tirés des formalités d’immatriculation ou des décomptes illustre cette logique. De tels moyens relèvent de la contestation devant le mandataire et le juge-commissaire, puis du recours devant le tribunal, non d’un appel direct. Le rappel du cadre normatif canalise les griefs vers la voie appropriée, sans préjuger de leur bien-fondé.

B. Une portée clarificatrice pour les praticiens et les greffes

La décision fournit un guide opératoire dans les hypothèses fréquentes de conversion des créances provisionnelles en montants définitifs. Elle conforte la pratique consistant à solliciter la mise à jour de l’état sans rouvrir le débat d’admission, sauf contestation formée dans les délais. Elle rappelle aussi que l’indication figurant sur une notification ne crée pas une voie de recours. Ainsi, « Il importe peu que la notification de l’ordonnance […] mentionne que la décision est susceptible de faire l’objet d’un appel […] une telle mention n’ayant pas pour effet d’ouvrir une voie de recours inexistante ».

Cette précision, classique mais nécessaire, protège la sécurité juridique des opérations de vérification et évite un contentieux inutile sur des voies de droit impropres. Les acteurs disposent ainsi d’une grille claire: recours au tribunal pour les ordonnances de gestion, appel direct uniquement en présence d’un texte spécial, spécialement en matière d’admission. L’arrêt, sobre et ferme, consolide une lecture hiérarchisée et prévisible des recours en période collective.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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