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Cour d’appel de Montpellier, ordonnance du 29 juillet 2025. L’affaire concerne la prolongation d’une rétention administrative décidée après une mesure de remise aux autorités d’un État membre, assortie d’une interdiction de circulation. Le juge du contrôle des libertés a rejeté la contestation de la régularité du placement et a prolongé la rétention pour vingt‑huit jours. L’intéressé a interjeté appel en soutenant disposer de garanties de représentation à l’étranger, d’un titre de séjour en cours de validité, d’un billet de retour, et en contestant la motivation et l’examen individualisé. La juridiction d’appel a indiqué envisager l’application du second alinéa de l’article L. 743‑23 du CESEDA, a recueilli les observations des parties, puis a rejeté l’appel sans audience. La question posée tenait aux conditions du rejet immédiat de l’appel en matière de rétention, en l’absence de circonstance nouvelle et de justifications manifestes en faveur d’une mise en liberté. La cour retient que « le premier président ou son délégué peut […] rejeter la déclaration d’appel […] s’il apparaît qu’aucune circonstance nouvelle de fait ou de droit n’est intervenue […] ou que les éléments fournis à l’appui de la demande ne permettent manifestement pas de justifier qu’il soit mis fin à la rétention ». Elle constate l’absence de faits nouveaux, l’insuffisance des éléments produits pour lever le risque de soustraction et déclare irrecevables des moyens nouveaux présentés hors délai.
I. Les conditions du rejet sans audience en appel de la rétention
A. Le cadre légal et l’exigence d’un débat contradictoire minimal
L’ordonnance s’appuie sur le second alinéa de l’article L. 743‑23 du CESEDA, dont elle cite la teneur, et sur l’article R. 743‑15. Le texte réglementaire rappelle expressément que « lorsque le premier président […] envisage de rejeter une déclaration d’appel en application du second alinéa de l’article L. 743‑23, il recueille par tout moyen les observations des parties ». La cour a effectivement sollicité des observations par courriel, à bref délai, puis a statué sans audience. Elle vérifie ainsi le respect d’un contradictoire adapté à l’urgence, sans excéder les bornes du mécanisme dérogatoire prévu par la loi.
Le contrôle opéré porte sur deux conditions alternatives, étroitement encadrées par le texte. D’une part, l’absence de « circonstance nouvelle de fait ou de droit » intervenue depuis le placement ou son renouvellement. D’autre part, l’inopérance des éléments fournis, lorsqu’ils « ne permettent manifestement pas de justifier qu’il soit mis fin à la rétention ». La juridiction rappelle ces standards de contrôle, qui limitent son office au tri des appels dénués d’éléments pertinents, tout en préservant la possibilité d’un examen approfondi si un fait nouveau ou un élément décisif est présenté.
B. L’application aux griefs invoqués et l’appréciation des garanties
L’intéressé se prévalait d’un titre de séjour délivré par un autre État membre, d’un projet de retour immédiat, et de l’absence de menace à l’ordre public. La cour relève d’abord que le premier juge a retenu l’irrégularité du séjour en France et l’absence de garanties de représentation effectives, ce qui demeure central en matière de rétention. Elle souligne que « le préfet n’est pas tenu dans sa décision de faire état de tous les éléments de la situation personnelle de l’intéressé dès lors que les motifs positifs suffisaient ». Elle insiste sur un élément factuel déterminant pour le risque de soustraction, tenant à l’ancrage territorial. Il est rappelé que « il déclare ne pas avoir d’adresse en France », ce qui relativise la portée des attaches situées hors du territoire national.
La critique tirée de l’insuffisance de motivation et du défaut d’examen individuel est écartée au regard du seuil probatoire exigé par l’article L. 743‑23. La cour juge, dans une formule claire, que « les éléments invoqués […] ne permettent pas de justifier qu’il soit mis fin à sa rétention administrative ». Elle relève aussi un argument procédural décisif concernant des écritures complémentaires déposées tardivement. La décision constate que « ces nouveaux moyens soulevés hors délai d’appel sont irrecevables », ce qui consolide le cadre temporel strict de l’appel en rétention. En l’absence de « toute illégalité susceptible d’affecter les conditions (découlant du droit de l’Union) de légalité de la rétention », la juridiction fait application des textes précités et prononce le rejet, conformément au dispositif: « Rejetons l’appel ».
II. La valeur et la portée de la solution rendue
A. Une mise en œuvre mesurée d’un filtrage d’appel, conciliant urgence et droits
La solution confirme l’utilité pratique du filtrage instauré par l’article L. 743‑23, sans affaiblir les garanties minimales du contradictoire. La cour n’écarte pas l’appel d’emblée; elle se conforme à l’article R. 743‑15 en sollicitant des observations, ce qui assure une expression succincte des positions. Le contrôle exercé reste néanmoins substantiel, puisqu’il examine la pertinence des éléments fournis et apprécie le risque de soustraction de manière concrète. La motivation, appuyée sur des formules précises et sur les pièces, évite les automatismes et préserve la lisibilité du raisonnement.
Le traitement procédural des moyens tardifs est particulièrement significatif. L’irrecevabilité des prétentions nouvelles présentées hors délai renforce la discipline de l’instance d’appel en rétention, où les délais sont ramassés par construction. Cette rigueur protège la célérité du contentieux, condition nécessaire à l’effectivité des mesures d’éloignement. Elle invite les défenseurs à concentrer rapidement les moyens utiles, ce qui favorise un examen plus ciblé sur les enjeux déterminants, notamment la légalité concrète de la rétention et l’existence d’alternatives moins contraignantes.
B. Des enseignements pratiques sur les garanties de représentation et l’ancrage territorial
L’ordonnance précise l’appréciation des garanties de représentation à l’aune du territoire d’exécution. Des attaches situées dans un autre État membre et la détention d’un titre de séjour étranger ne suffisent pas, à elles seules, à neutraliser le risque de soustraction en France. L’absence d’adresse stable sur le territoire national pèse de façon décisive, d’autant plus lorsque l’éloignement est déjà ordonné. Le raisonnement ne nie pas la valeur d’attaches extérieures, mais il les subordonne à la capacité d’assurer le suivi effectif de la mesure et la disponibilité de l’intéressé devant l’administration.
Cette ligne jurisprudentielle incite à produire des éléments concrets et actuels, tels qu’une domiciliation vérifiable, des engagements de présentation, ou des justificatifs d’hébergement immédiat. Elle confirme aussi la portée limitée des promesses de départ rapide ou des billets acquis postérieurement, dès lors qu’ils ne garantissent pas, par eux-mêmes, la maîtrise du risque. En statuant qu’« en l’absence de toute illégalité susceptible d’affecter les conditions […] de légalité de la rétention », l’appel peut être rejeté sans audience, la cour précise une articulation équilibrée entre efficacité administrative et contrôle juridictionnel. La décision, sobre et précise, éclaire l’office du juge d’appel dans ce contentieux de l’urgence et confirme une exigence d’éléments probants, strictement rattachés à la situation sur le territoire.