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Rendue par la Cour d’appel de Nancy le 11 septembre 2025, la décision commente un licenciement disciplinaire prononcé à l’encontre d’un technico-commercial en arrêt maladie. La lettre invoquait la non‑transmission de plannings, des actes d’insubordination et des violations des conditions commerciales. Le conseil de prud’hommes avait retenu une cause réelle et sérieuse et alloué des sommes de rupture et des heures supplémentaires. Les deux parties ont interjeté appel.
Le litige posait d’abord la question des limites de l’office du juge au regard de la lettre de rupture et du délai de prescription disciplinaire. Il portait ensuite sur l’administration de la preuve des griefs, puis sur la qualification de la faute et la proportionnalité de la sanction. Des demandes accessoires relatives aux heures supplémentaires, à l’obligation de sécurité, au repos, au chômage partiel et aux frais professionnels devaient également être examinées.
La cour rappelle que « La lettre de licenciement fixe les limites du litige » et que « La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié […], d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. » Au terme d’une revue serrée des pièces, elle constate que « seul est établi le grief de non-transmission de ses plannings » et juge qu’« en l’absence de sanction disciplinaire antérieure du salarié, le grief établi ne justifiait pas même un licenciement ». Elle en déduit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et alloue une indemnité plafonnée par l’article L. 1235‑3.
I. Délimitation du litige et contrôle des griefs
A. Portée de la lettre et exigence probatoire encadrée par la prescription
La décision borne le débat par la lettre de rupture, conformément à l’énoncé selon lequel « La lettre de licenciement fixe les limites du litige ». Le contrôle s’opère ensuite sous l’angle de l’article L. 1332‑4, la cour retenant des faits de novembre 2020 pour ouvrir la période utile. Les rappels antérieurs de même nature pouvaient être mobilisés, dès lors qu’un élément récent avait été constaté dans les deux mois. Le contexte sanitaire a été considéré sans excès, les périodes de confinement n’expliquant pas l’ensemble des carences relevées dans l’agenda.
Le grief principal, la non‑transmission régulière des plannings, est déclaré établi au vu du contrat, des relances et d’extraits d’agendas probants. La contestation sur la manipulabilité des agendas n’est pas convaincante, faute de production de versions contradictoires par le salarié. En revanche, pour les prétendues plaintes clients, la motivation est nette: « Aucun justificatif de plainte de client n’est produit. » La cour écarte des attestations internes trop générales et dépourvues de précisions temporelles.
Le grief d’insubordination, limité à un unique courriel de relance à propos d’un rapport déterminé, est jugé insuffisamment démontré. De même, les violations alléguées des règles tarifaires ne passent pas l’épreuve de la preuve, l’unique facture jointe ne suffisant pas sans la « politique commerciale » opposable versée au débat. Pour ces deux branches, la formule revient avec constance: « Au vu de ces éléments, le grief n’est pas établi. » La méthode adoptée confirme une exigence de justification concrète pour chaque chef retenu par la lettre.
B. Qualification des faits retenus et proportion de la sanction
La cour rappelle le standard de la faute grave: « d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien ». Même dépourvu de gravité avérée, le manquement établi doit encore légitimer la rupture. Ici, l’unique faute retenue n’a pas été précédée de mesures disciplinaires intermédiaires. La solution en découle logiquement: « en l’absence de sanction disciplinaire antérieure du salarié, le grief établi ne justifiait pas même un licenciement. » L’affirmation pose une ligne de proportionnalité, sans ériger une obligation de progressivité, mais en appréciant la sanction au regard du dossier.
La conséquence s’impose alors sur le terrain de la cause: « Il sera donc fait droit à la demande de voir dire le licenciement non fondé ». La cour rénove ainsi le sens de la rupture au regard du seul grief avéré, et inverse l’économie du jugement de première instance. La rigueur probatoire employée pèse directement sur la qualification, dans une espèce où l’autonomie du poste ne saurait suppléer la carence de preuves sur des manquements distincts.
II. Portée indemnitaire et traitement des demandes accessoires
A. Indemnités de rupture et dommages-intérêts encadrés par le barème
Le salaire de référence est fixé à 4 396,47 euros, solution favorable au salarié parmi les bases discutées. La cour en tire les conséquences pour le rappel de salaire lié à la mise à pied, l’indemnité de licenciement et le préavis, après avoir écarté une moyenne défavorable sur les trois derniers mois. La motivation est précise: « Il convient de prendre pour base ce montant, et de retenir […] un salaire moyen mensuel de référence de 4 396,47 euros. »
Sur l’indemnisation du licenciement, la limite probatoire joue encore. Le salarié ne justifiait pas sa situation récente au regard de l’emploi. L’allocation est donc mesurée dans la fourchette légale: « Il sera donc fait droit à sa demande à hauteur de 13 189,41 euros, correspondant à trois mois de salaire. » La décision illustre une application pragmatique du barème, articulant l’absence de preuve actualisée du préjudice et la reconnaissance d’une rupture injustifiée.
B. Heures supplémentaires, sécurité, repos, chômage partiel et frais
La cour rappelle l’article L. 3171‑4: « en cas de litige […] l’employeur fournit au juge les éléments […]. Au vu de ces éléments […] le juge forme sa conviction. » Elle précise la règle de répartition: « La preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties mais le salarié doit appuyer sa demande […]. » En lien avec le grief retenu sur les plannings, les tableaux et courriels produits ne sont pas jugés « suffisamment précis » pour permettre la contradiction. Les demandes d’heures supplémentaires, de repos compensateurs et de travail dissimulé sont rejetées.
Les prétentions relatives à l’obligation de sécurité, fondées sur des sollicitations pendant congés et arrêts, se heurtent d’abord à la prescription partielle, puis à l’insuffisance des pièces: « Les faits ne sont donc pas démontrés. » La même logique gouverne la demande pour chômage partiel, où la preuve d’une activité excédant l’organisation annoncée fait défaut. Pour le repos hebdomadaire, la motivation manque en fait et en droit, justifiant que « l’appelant sera débouté de sa demande. »
Enfin, les postes liés aux frais professionnels et au télétravail sont écartés, les documents versés n’établissant ni l’obligation de s’équiper, ni le lien certain des dépenses avec l’activité. La solution, cohérente avec l’ensemble, montre que l’autonomie fonctionnelle d’un cadre itinérant ne renverse pas le standard probatoire applicable aux créances salariales et aux préjudices dérivés.
I. Le périmètre du litige et la preuve des griefs
A. La lettre de licenciement et la prescription disciplinaire
B. L’insuffisance probatoire des plaintes, rapports et remises
II. Les effets de l’absence de cause réelle et sérieuse
A. L’articulation des indemnités de rupture et du barème
B. Le rejet des heures supplémentaires et des demandes accessoires