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La Cour d’appel de Nancy, le 28 août 2025, connaît d’un licenciement pour faute grave contesté sous l’angle de la nullité et de la prescription. Le salarié, recruté en 2015 comme préparateur polyvalent, a démissionné puis s’est rétracté, avant convocation, mise à pied conservatoire et licenciement notifié le 14 août 2020. La lettre de licenciement retenait des détournements et des aveux, précisant que « Cette situation confortée, par rapport aux faisceaux précédents valant aveux certifiés de votre part, caractérise un manquement grave légitimant la présente mesure de licenciement à effet immédiat pour faute grave ». Le conseil de prud’hommes de Nancy, le 23 mai 2024, a déclaré l’action prescrite et rejeté toutes les demandes, décision frappée d’appel le 17 juin 2024. En appel, « L’intimée n’ayant pas conclu, elle est réputée adopter les motifs du jugement rendu par le conseil de prud’hommes », les écritures adverses ayant été déclarées irrecevables par ordonnance du 6 mars 2025. La cour devait déterminer si des pressions constitutives de harcèlement moral et une atteinte au droit d’ester en justice justifiaient la nullité, ou si la prescription annuelle commandait le rejet. Elle écarte d’abord la nullité, puis applique la prescription spéciale des litiges de rupture, confirmant le jugement attaqué.
I. L’écartement de la nullité du licenciement
A. Harcèlement moral: appréciation des faits et de la preuve
Le salarié produisait deux retranscriptions d’enregistrements, l’une relative à la mise à pied, l’autre à l’entretien préalable, pour établir des pressions réitérées. La cour relève, à la lecture des pièces, que « Dans aucun de ces documents n’apparait la moindre pression », ce qui affaiblit l’allégation de manœuvres destinées à extorquer une démission ou des aveux. Elle ajoute que, quand bien même une pression aurait existé lors d’un échange isolé, il s’agirait d’un épisode qui « constitue un fait unique ». Cette caractérisation exclut la répétition exigée par le texte, la cour indiquant que le salarié « n’établit pas d’éléments permettant de supposer l’existence d’un harcèlement moral par des agissements répétés ». Le choix d’examiner les enregistrements, réalisés à l’insu de l’employeur, manifeste une approche pragmatique de la preuve, leur contenu étant apprécié sans débat d’irrecevabilité préalable.
B. Liberté d’ester en justice: absence d’atteinte caractérisée
Sur l’atteinte alléguée à une liberté fondamentale, la juridiction retient la rétractation rapide de la démission et la saisine effective du juge. Elle énonce que « La violation de la liberté fondamentale d’ester en justice n’est pas établie », le salarié ayant pu contester la rupture devant la juridiction prud’homale. La cour souligne, en outre, que la voie contentieuse demeurait ouverte indépendamment d’une éventuelle démission, ce qui neutralise l’argument tiré d’un empêchement d’agir. L’effet recherché par la qualification de nullité est dès lors refusé, la contestation ne pouvant prospérer que sur le terrain d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, qui n’était pas utilement chiffré.
II. La prescription annuelle des actions en rupture
A. Application de l’article L1471-1 et portée procédurale
Écartée la nullité, la cour fait application de l’article L1471-1 du code du travail, rappelant que « toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois ». Le licenciement datant du 14 août 2020 et la saisine du 30 juin 2022, « Son action est donc atteinte par la prescription », ce qui emporte rejet des prétentions liées à la rupture. La motivation tient compte de la structure des demandes: l’absence de chiffrage autonome au titre de l’absence de cause réelle et sérieuse interdit toute indemnisation sur ce fondement. Par ailleurs, la mention selon laquelle l’intimée « est réputée adopter les motifs du jugement » n’altère pas l’office de la cour, qui exerce son plein contrôle sur les motifs propres.
B. Conséquences sur les chefs de demandes et questions résiduelles
Sont ainsi écartées l’indemnité de licenciement, le préavis et les dommages-intérêts, comme demandes indissociables de la contestation de la rupture. La décision vise également « des demandes de rappels de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire et du reliquat de 13ème mois », en les soumettant au même régime de prescription lié à la rupture. Ce traitement matérialise une conception extensive de l’unité du contentieux de la rupture, qui agrège les accessoires salariaux découlant de celle-ci à la prescription annuelle. Une lecture plus segmentée pourrait discuter le rattachement de certains éléments purement salariaux, sans remettre en cause ici la cohérence de l’ensemble. Le choix retenu renforce la sécurité temporelle des litiges sociaux, en assignant une borne claire aux demandes attachées à la cessation du contrat.