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Cour d’appel de Nancy, 3 septembre 2025. Saisie de l’appel d’un jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Reims du 20 septembre 2024, la cour tranche la prise en charge de syndromes du canal carpien au titre du tableau 57 C.
Un salarié déclare en juillet 2023 des atteintes bilatérales, instruites au titre du tableau 57 C relatif aux affections périarticulaires de la main. La caisse reconnaît la prise en charge le 14 novembre 2023, tandis que l’employeur conteste l’exposition alléguée et dénonce des irrégularités d’instruction.
Après rejet amiable implicite, le pôle social du tribunal judiciaire de Reims déclare les décisions inopposables, puis la caisse interjette appel fin octobre 2024. Devant la cour, la caisse sollicite l’opposabilité, l’employeur requiert la confirmation, invoquant l’insuffisance des investigations et la violation du calendrier contradictoire.
Deux questions gouvernent le litige, l’une procédurale, l’autre matérielle, relatives au calendrier de consultation et à la caractérisation des travaux relevant du tableau 57 C. La solution confirme la régularité de l’instruction et retient l’exposition au risque, en conséquence des éléments produits et de l’absence de preuve contraire.
I. Le sens de la décision
A. La phase de consultation et le pouvoir de décision de la caisse
La cour interprète l’article R. 461-9 du code de la sécurité sociale en distinguant deux séquences successives, l’une contradictoire, l’autre purement consultative. Elle énonce ainsi: « Il ressort de ces dispositions qu’à l’issue d’une phase de consultation du dossier de 10 jours francs, ouvrant aux parties la possibilité d’abonder le dossier de pièces et/ou observations dans le cadre d’un échange contradictoire destiné à fournir à la caisse les éléments utiles à sa décision, s’ouvre une nouvelle phase, sans délai défini, permettant une simple consultation sans observations possibles. »
De ce cadre ressort la faculté de statuer à l’issue du premier délai, sans attendre la consultation passive, dès lors qu’aucune observation nouvelle n’est recevable. La cour précise: « Si la caisse a une obligation de délai pour répondre à la demande de prise en charge, sous la sanction de la reconnaissance implicite, elle n’est aucunement contrainte d’attendre à nouveau, à l’expiration du délai de 10 jours francs, pour prendre sa décision. »
L’absence de grief ferme l’argumentation, puisque le droit de consulter a été respecté, malgré une décision prise sans surseoir à la phase de consultation sans écriture. Le moyen d’inopposabilité procédurale se trouve, en conséquence, justement écarté.
B. L’exposition au risque du tableau 57 C et l’étendue des investigations requises
Sur le fond, la cour rappelle la présomption d’imputabilité attachée aux tableaux, sous réserve du respect de leurs conditions. Elle affirme: « Par application des dispositions de l’article L. 461-1 du code la sécurité sociale sont réputées imputables au travail les maladies figurant au tableau des maladies professionnelles lorsque sont remplies les conditions visées par ces mêmes tableaux. »
La caisse a exploité un dossier nourri par des descriptions circonstanciées, accompagnées de photographies, et non contredites par des éléments objectifs opposables. La cour admet la pertinence de cette méthode, sans exiger une étude de poste dès lors que le dossier est complet: « A cet égard il ne peut être reproché à la caisse, dans le cadre de l’instruction des déclarations des maladies de canal carpien gauche et droit, d’avoir utilisé, pour apprécier la situation présente, ce qu’elle connaissait de l’emploi effectif du salarié au travers notamment d’une récente décision d’appel. »
La qualification d’exposition au sens du tableau 57 C est donc retenue, eu égard aux gestes répétés, à la préhension et aux appuis carpien. La motivation est nette: « Dès lors c’est par une appréciation cohérente et justifiée qu’elle a pu estimer, sans recourir à d’autres investigations, que les travaux du tableau 57 C des maladies professionnelles étaient caractérisés pour les maladies de canal carpien gauche et droit déclarées. »
La présomption n’est pas renversée, faute de preuve contraire utilement rapportée par l’employeur. La cour conclut d’ailleurs que: « Les autres conditions du tableau en cause ne sont pas contestées. Par ailleurs l’employeur n’apporte aucun élément pour combattre la présomption du tableau. »
II. Valeur et portée
A. Une clarification utile du contradictoire sans alourdissement procédural
La décision clarifie l’économie de l’article R. 461-9, en consacrant un premier temps contradictoire, suivi d’un accès documentaire sans faculté d’écrire. Ce schéma évite des délais superflus, tout en préservant l’information des parties pendant la consultation passive.
Cette lecture recentre l’inopposabilité procédurale sur l’existence d’un grief, non sur un calendrier interne indicatif, renforçant la sécurité juridique des décisions prises dans le délai de cent vingt jours. Les acteurs savent ainsi que l’essentiel se joue durant les dix jours francs d’échanges contradictoires.
L’exigence de diligence pèse corrélativement sur les parties, invitées à produire intégralement leurs observations dans la première fenêtre. La portée contentieuse est immédiate, puisque la preuve d’une atteinte concrète aux droits de la défense devient déterminante.
B. Le standard probatoire en matière d’exposition et ses effets pratiques
La décision confirme un standard probatoire exigeant, imposant à l’employeur des éléments précis et contemporains, tels qu’une fiche de poste, des attestations, et la démonstration d’aménagements effectivement appliqués. À défaut, les descriptions circonstanciées et concordantes du dossier prévalent.
La référence à une décision antérieure de la même juridiction, rendue le 28 février 2023, montre une appréciation contextualisée de la réalité des tâches. Cette continuité renforce la cohérence factuelle et évite de reconstituer artificiellement des fonctions d’encadrement non démontrées.
L’absence d’étude de poste obligatoire ne signifie pas un abaissement des garanties, mais l’affirmation d’un contrôle de suffisance du dossier, fondé sur la précision et la contradiction des données collectées. Le juge du fond en demeure l’arbitre attentif et pragmatique.
La portée pratique est nette, la présomption du tableau 57 C jouant pleinement tant que l’employeur ne fournit pas une preuve contraire structurée. La prévention s’en trouve encouragée, par une meilleure traçabilité des gestes exposants et une formalisation accrue des postes.