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La Cour d’appel de Nîmes, 4 septembre 2025, statue sur renvoi après cassation d’un arrêt de la Cour d’appel de Montpellier du 1er décembre 2022, lui-même confirmé partiellement par un jugement du tribunal d’instance de Montpellier du 28 novembre 2019. L’affaire naît d’un regroupement de crédits conclu en 2011, suivi d’un plan de surendettement, puis d’une déchéance du terme notifiée en 2017 et d’une action en paiement. Les emprunteurs ont opposé une demande indemnitaire pour manquement du prêteur à l’obligation de mise en garde. La juridiction de renvoi tranche deux questions liées mais distinctes. D’une part, le point de départ de la prescription de l’action en responsabilité pour défaut de mise en garde. D’autre part, l’étendue du devoir de mise en garde lorsque le départ à la retraite interviendra pendant l’amortissement et la mesure du préjudice indemnisable.
Les premiers juges avaient jugé l’action en responsabilité prescrite depuis la souscription. La Cour d’appel de Montpellier avait confirmé, avant que la Cour de cassation, 1re chambre civile, 15 mai 2024, casse partiellement pour violation de la loi. La juridiction de renvoi retient la recevabilité de l’action, constate le manquement à l’obligation de mise en garde, puis indemnise une perte de chance à hauteur de 10 % du capital restant dû à la date de défaillance.
I. La prescription de l’action en responsabilité
A. Le principe dégagé par la Cour de cassation
La Cour de cassation a rappelé la règle de l’article 2224 du code civil appliquée au devoir de mise en garde. Le délai ne se rattache pas à la seule signature du prêt, mais à la manifestation du risque d’endettement excessif. La formule est claire et décisive: « commence à courir, non à la date de conclusion du contrat de prêt, mais à la date d’exigibilité des sommes au paiement desquelles l’emprunteur n’est pas en mesure de faire face ». Le choix de ce point de départ rattache la connaissance du dommage à la concrétisation du risque contre lequel le prêteur devait alerter.
Ce principe évite qu’une action soit éteinte avant la réalisation du dommage. Il tient compte de la spécificité du manquement de mise en garde, qui n’émerge réellement qu’avec la défaillance. Il confirme enfin que l’appréciation de la connaissance des faits par le titulaire du droit ne peut être purement abstraite, mais s’enracine dans l’exigibilité non honorée.
B. L’application par la juridiction de renvoi
La Cour d’appel de Nîmes articule la règle à la chronologie du dossier. Elle retient la date de la déchéance du terme comme point de départ, ce qui conforte la logique de l’exigibilité. L’arrêt énonce ainsi: « La déchéance du terme de l’emprunt a été régulièrement notifiée (…) qui est donc la date de point de départ du délai de prescription de leur action en responsabilité à l’encontre de l’établissement prêteur ». Cette approche rattache la connaissance utile des faits générateurs à l’événement déclencheur de l’exigibilité globale.
La conséquence est nette et mesurée: « Elle est donc recevable et le jugement est infirmé de ce chef ». La solution sécurise l’exercice effectif de l’action, tout en offrant un critère opératoire aux juridictions du fond. Elle harmonise, en outre, le contentieux du crédit à la consommation avec l’économie de l’article 2224, fondé sur la connaissance des faits permettant d’agir.
II. L’obligation de mise en garde en présence d’un départ à la retraite prévisible
A. Le contenu prospectif du devoir de mise en garde
La juridiction de renvoi réinscrit l’obligation dans sa finalité préventive. Lorsque la retraite interviendra pendant l’amortissement, l’évaluation des capacités doit intégrer les revenus futurs et la perte d’avantages en nature. L’arrêt précise: « il lui incombait en conséquence non seulement de s’informer sur le montant de leurs pensions de retraite prévisibles (…) et de les informer (…) du risque ainsi encouru de ne plus pouvoir faire face au paiement des sommes exigibles ». La formule consacre un devoir d’investigation proportionné et une alerte circonstanciée, adaptés à un événement prévisible et déterminant.
Cette obligation porte sur des éléments objectivables au jour de l’offre. Les pièces révélaient un avantage logement attaché à l’emploi et donc voué à s’éteindre, ainsi que l’âge des emprunteurs, rendant certain le croisement de la retraite avec l’échéancier. L’arrêt constate le défaut d’alerte spécifique sur ces points, avant de conclure sans emphase: « Elle a donc manqué à son obligation de mise en garde ». La qualification s’inscrit dans la jurisprudence constante relative aux emprunteurs non avertis.
B. La réparation par la perte de chance et sa mesure
Le dommage réparable prend la forme d’une chance perdue d’éviter la réalisation du risque signalé. Le raisonnement est fidèle à la causalité adéquate, et limite l’indemnisation aux conséquences directes et immédiates. L’arrêt souligne un endettement déjà diffus, étalé sur de multiples créances, et une situation obérée avant même l’opération de restructuration. D’où une chance réduite d’éviter la défaillance en l’absence de souscription.
La juridiction fixe alors la part indemnisable avec sobriété. Elle retient que « leur perte de chance (…) est fixée à 10% », en la calculant sur le capital restant dû à la date de la dernière échéance honorée. Cette méthode, consistante et explicite, respecte la nature aléatoire de la chance perdue. Elle évite une réparation intégrale qui nierait l’état antérieur et la multiplicité des causes du défaut. Elle confirme enfin la cohérence entre la caractérisation du manquement et l’économie de la réparation sollicitée.
Ainsi, la Cour d’appel de Nîmes, 4 septembre 2025, après cassation, opère une double mise au point. Elle aligne le point de départ de la prescription sur la date d’exigibilité non honorée, et précise le contenu prospectif de la mise en garde en cas de retraite prévisible. L’arrêt articule sobriété des motifs, citations décisives et quantification mesurée, au service d’un droit de la consommation cohérent et pragmatique.