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La Cour d’appel de Nouméa, chambre commerciale, le 28 août 2025, statue sur l’appel d’un jugement du Tribunal mixte de commerce du 6 décembre 2024. Le litige porte sur la résiliation d’une convention d’occupation du domaine public, à l’initiative du cocontractant public, dans le contexte d’une procédure collective ouverte à l’encontre du titulaire. La question centrale tient à la régularité de la mise en demeure préalable requise, à la preuve de sa réception, et à l’identification du destinataire habilité avant puis après conversion en liquidation.
Les faits utiles tiennent en peu de points. Une procédure de redressement a été ouverte, avec désignation d’un administrateur. L’exploitant portuaire a adressé une lettre recommandée de mise en demeure au débiteur, non retirée. Il a ensuite saisi le juge-commissaire pour voir constater la résiliation. La conversion en liquidation est intervenue avant l’audience devant ce magistrat. Une ordonnance a prononcé la résiliation, partiellement réformée par le tribunal, qui l’a néanmoins confirmée au fond. L’appel est interjeté. L’intimé, constitué, ne conclut pas. L’appelante soutient la nullité du processus de mise en demeure et l’irrecevabilité de la requête, faute de notification régulière et de destinataire compétent.
La question de droit se concentre sur la nature de la mise en demeure préalable, sa qualification contentieuse, ses modalités probatoires et ses destinataires selon la phase de la procédure collective. La cour retient que « La mise en demeure adressée au débiteur par un courrier recommandé, non retiré par celui-ci, ne peut valoir mise en demeure, à défaut de lui avoir été effectivement remis. » Elle précise encore que cette démarche « présente un caractère contentieux, puisqu’elle constitue un acte préalable obligatoire à la saisine du juge-commissaire afin que celui-ci constate la résiliation du contrat en cours. » Après la conversion, « c’est au liquidateur qu’il appartient au cocontractant d’adresser une mise en demeure ». La solution prononce l’infirmation et déclare irrecevable la requête en constat de résiliation, en raison des vices cumulés affectant la mise en demeure préalable.
I – La mise en demeure préalable: nature contentieuse et exigence d’une réception certaine
A – Une démarche précontentieuse, condition de recevabilité de la saisine du juge-commissaire
La cour qualifie la mise en demeure de véritable préalable contentieux. Elle énonce que la démarche « présente un caractère contentieux, puisqu’elle constitue un acte préalable obligatoire à la saisine du juge-commissaire afin que celui-ci constate la résiliation du contrat en cours. » Une telle qualification éclaire l’office du juge-commissaire, saisi à la suite d’une formalité qui conditionne l’accès au juge. La conséquence est décisive: l’accomplissement régulier de la mise en demeure ne relève plus d’une simple courtoisie contractuelle, mais d’un préalable de procédure, dont l’irrégularité affecte la recevabilité de la requête.
Cette lecture s’accorde avec la finalité protectrice du droit des entreprises en difficulté. Elle évite qu’une résiliation automatique procède d’une notification incertaine, affaiblissant la garantie procédurale du débiteur et des organes de la procédure. Le contrôle du juge se concentre alors sur l’existence, la régularité et le destinataire de l’acte préalable, ce qui renforce la cohérence du régime des contrats en cours.
B – La preuve de la réception: l’AR non retiré reste insuffisant
La cour s’appuie sur la règle selon laquelle « La date de réception d’une notification, faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, est celle qui est apposée […] lors de la remise de la lettre à son destinataire. » Elle en déduit que « la mise en demeure […] non retiré[e] […] ne peut valoir mise en demeure, à défaut de lui avoir été effectivement remis[e]. » Le choix opéré est clair: seule la remise effective déclenche les effets procéduraux requis, en particulier les délais de prise de position et, à terme, la résiliation.
Cette exigence, sévère pour l’expéditeur, repose sur un critère objectif et vérifiable. Elle se justifie par la gravité des effets attachés à l’inaction après mise en demeure dans un cadre collectif. Elle se distingue de solutions parfois admises en matière purement contractuelle, où la présentation peut suffire. Ici, la cour retient une norme plus stricte, adaptée à un acte qualifié de contentieux. La cohérence de l’ensemble se trouve renforcée, au prix d’une diligence accrue pour le cocontractant, qui devra user de voies de notification assurant une remise certaine.
II – Le destinataire habilité selon la phase de la procédure, et la sanction d’irrecevabilité
A – Pendant l’observation: l’administrateur comme interlocuteur obligatoire
La cour juge inopérante la mise en demeure adressée au débiteur après l’ouverture du redressement. Elle constate que « la mise en demeure préalable adressée au débiteur lui-même, alors qu’il faisait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire était de toutes façons inopérante, dans la mesure où elle aurait dû être adressée à l’administrateur judiciaire. » Le raisonnement est conforme à la logique de dessaisissement partiel et d’assistance ou de représentation, selon l’étendue de la mission. Le cocontractant doit viser l’organe compétent, seul apte à se prononcer utilement sur la poursuite du contrat.
Cette solution préserve l’efficacité du traitement collectif. Elle évite des notifications stériles au débiteur, alors même que l’administrateur tient la décision, ou au moins l’initiative. Elle impose un repérage exact de l’organe en charge, ce qui suppose une veille minimale sur la procédure. Elle offre aussi une sécurité de discussion, en s’adressant à l’interlocuteur juridiquement pertinent.
B – Après conversion: le liquidateur destinataire nécessaire, et l’irrecevabilité encourue
La cour tire les conséquences de la conversion intervenue avant l’audience. Elle rappelle qu’« en liquidation judiciaire, c’est au liquidateur qu’il appartient au cocontractant d’adresser une mise en demeure d’avoir à prendre parti sur la continuation d’un contrat ». La mutation de la procédure emporte substitution de destinataire. À compter du jugement de conversion, seule une mise en demeure adressée au liquidateur pouvait fonder la saisine du juge-commissaire. Faute d’une telle diligence, « la demande aurait dû être déclarée irrecevable. »
La sanction, ici, relève de la logique même de la qualification contentieuse de l’acte préalable. L’irrégularité affecte la recevabilité, non le bien‑fondé. Cette construction présente une grande clarté méthodologique et une utilité pratique. Elle incite le cocontractant à refaire la mise en demeure lorsqu’un changement d’organe survient, plutôt que de persévérer dans une saisine viciée. Elle protège la stabilité de la procédure et l’égalité des créanciers, tout en assurant un contradictoire effectif avec l’organe compétent.
Au total, l’arrêt fixe une ligne ferme sur trois points structurants. La mise en demeure préalable est un acte de nature contentieuse. Sa réception doit être certaine, l’avis non retiré demeurant insuffisant. Son destinataire varie avec la phase de la procédure, administrateur puis liquidateur, à peine d’irrecevabilité de la saisine subséquente. Par ces choix, la Cour d’appel de Nouméa réaffirme une discipline procédurale rigoureuse, adaptée à la gravité d’une résiliation dans le cadre des contrats en cours.