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Cour d’appel d’Orléans, 11 septembre 2025 (n° 193‑25). L’arrêt tranche un litige relatif à un regroupement de crédits relevant du chapitre II du livre III du code de la consommation. La question posée porte sur l’étendue des obligations d’information propres au regroupement, la portée de l’« encadré » du contrat, et les conséquences attachées à leur méconnaissance.
Une offre acceptée le 16 novembre 2018 prévoyait un prêt de 30 900 euros, remboursable en 144 mensualités au taux conventionnel de 4,31 % l’an. Après des impayés à compter de février 2022, une mise en demeure a été adressée, suivie de la déchéance du terme le 15 décembre 2022 et d’une demande en paiement portant sur le solde. Par jugement du 5 septembre 2023, le juge des contentieux de la protection a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et condamné l’emprunteuse à régler une somme en principal, sans intérêts, avec dépens.
L’appel a été relevé le 7 décembre 2023. L’établissement de crédit a sollicité l’infirmation de la déchéance, la condamnation au paiement du solde avec intérêts au taux contractuel, subsidiairement une condamnation au principal avec intérêts au taux légal, ainsi qu’une somme au titre de l’article 700. L’intimée n’a pas constitué avocat. La cour rappelle que « il résulte de l’article 472 du code de procédure civile que si, en appel, l’intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et que la cour ne fait droit aux prétentions de l’appelant que dans la mesure où elle les estime régulières, recevables et bien fondées, étant précisé que par application de l’article 954, dernier alinéa, du même code, la partie qui ne conclut pas est réputée s’approprier les motifs du jugement entrepris ». Elle infirme le jugement, écarte la déchéance, précise le périmètre de l’encadré, et réduit l’indemnité de résiliation pour excès.
I. Le sens de la décision
A. Le cadre normatif du regroupement et l’absence de déchéance attachée au R. 314-20
La décision replace d’abord l’opération dans son régime propre. Elle souligne que « le regroupement de crédits est prévu aux article L. 314-10 à L. 314-14 et R. 314-18 à R. 314-21 du code de la consommation ». Le document d’information spécifique, établi après dialogue, comporte notamment le tableau comparatif annexé à l’article R. 314-20. L’arrêt consacre toutefois une lecture stricte des textes de sanction. Il énonce que « aucun texte du code de la consommation ne prévoit que le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, en cas de non-respect des différentes obligations d’information énumérées aux articles R. 314-19 à R. 314-20 en matière de regroupement de crédit ».
Partant, la carence relevée par le premier juge dans le tableau comparatif (absence du taux débiteur et de la durée restante pour un crédit regroupé) ne peut, à elle seule, justifier la déchéance du droit aux intérêts. La cour s’inscrit ici dans le sillage de Civ. 1re, 9 janvier 2019, n° 17‑20.565, qui refuse d’ajouter aux cas légaux de déchéance. Le raisonnements articule les articles L. 314‑10 et suivants avec L. 341‑2, en circonscrivant la sanction aux seules obligations qu’énumère ce dernier texte.
B. Le périmètre de l’« encadré » et l’exclusion du coût d’assurance mensuel
La juridiction d’appel rappelle ensuite la logique de l’encadré, dont l’omission des mentions prescrites est, elle, légalement sanctionnée. « Selon les articles L. 312-28 et L. 341-4 du code de la consommation, un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit, sous peine de déchéance du prêteur du droit aux intérêts. » La liste des mentions résulte de l’article R. 312‑10, 2°. L’arrêt en déduit clairement la conséquence sur le traitement de l’assurance accessoire. « Il s’en déduit que le montant de l’échéance qui figure dans l’encadré au titre des informations sur les caractéristiques essentielles du contrat de crédit n’inclut pas le coût mensuel de l’assurance souscrite par l’emprunteur accessoirement à ce contrat (v. par ex. Civ. 1′, 8 avril 2021, n° 19-25.236). »
Dès lors, l’absence d’intégration du coût mensuel de l’assurance dans l’encadré ne fonde pas la déchéance, à la condition que le document mentionne distinctement le coût de l’assurance et les mensualités « avec assurance », ce que constatait la cour au bas du contrat. Le sens de la solution se fixe ainsi sur une frontière nette entre obligations d’information sanctionnées et simples exigences de présentation.
II. Valeur et portée
A. Une clarification utile des sanctions et un alignement jurisprudentiel
La valeur de l’arrêt tient à la rigueur de sa méthode. En refusant d’étendre la déchéance à l’inexécution des seules obligations propres au regroupement de crédits, la cour respecte le principe de légalité des sanctions civiles en droit de la consommation. Le rappel que la sanction naît du texte, et de lui seul, sécurise les opérations et la prévisibilité du contentieux.
Le rapprochement explicite avec Civ. 1re, 9 janvier 2019, n° 17‑20.565 consolide la cohérence d’ensemble. La décision conforte la ligne selon laquelle les lacunes du document R. 314‑20, si elles peuvent nourrir d’autres griefs, ne déclenchent pas la déchéance de l’article L. 341‑2. Cette clarification éclaire les acteurs sur la hiérarchie des instruments d’information et sur la finalité propre de l’encadré.
B. Un contrôle proportionné de l’indemnité et quelques réserves pratiques
La cour exerce en outre un contrôle concret sur la pénalité due après déchéance du terme. Elle rappelle d’abord la règle de principe: « selon l’article L. 312-39 du code de la consommation, le prêteur peut, en cas de défaillance de l’emprunteur, exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés, le tout produisant intérêts au taux contractuel, outre une indemnité dépendant de la durée du contrat restant à courir et ne pouvant excéder, sans préjudice de l’article 1231-5 du code civil, 8’% du capital restant dû ». Puis elle motive la réduction judiciaire en des termes nets: « en l’espèce, cumulée avec les intérêts conventionnels dont le taux excède largement le taux légal, cette indemnité de 8’% revêt un caractère manifestement excessif qui commande sa réduction d’office à un montant qui, pour conserver à la clause son caractère comminatoire, sera fixé à 100 euros ».
Ce contrôle de proportionnalité est équilibré. Il préserve le caractère dissuasif de la clause tout en évitant une double charge excessive combinant intérêts conventionnels et pénalité maximale. La méthode retenue, articulant L. 312‑39 et l’appréciation souveraine de l’excès, paraît transférable à des espèces voisines.
On relève enfin une apparente coquille sur le point de départ des intérêts mentionné « au 26 janvier 2013 », alors que le décompte fait référence à 2023. La portée pratique de cette inexactitude sera nulle si la liquidation tient compte de la date exacte, mais elle invite à une vigilance rédactionnelle accrue sur des éléments chiffrés déterminants. L’arrêt, pour le reste, harmonise utilement la présentation des encadrés « hors assurance » et sécurise la pratique du regroupement en circonscrivant la déchéance à son exacte assise textuelle.