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Par un arrêt rendu le 11 septembre 2025, la cour d’appel d’Orléans (chambre sociale) confirme un jugement prud’homal relatif à un licenciement disciplinaire. Le salarié, cadre en charge de la sécurité, contestait la cause réelle et sérieuse, invoquait un harcèlement moral et le manquement à l’obligation de sécurité. L’employeur s’y opposait, soutenant la matérialité de manquements procéduraux et l’usage fautif d’un outil professionnel.
Les faits utiles tiennent à une enquête interne consécutive au signalement d’un vol et à l’usage d’un téléphone professionnel prêté à un tiers. La procédure a conduit au rejet des demandes en première instance, puis à l’appel du salarié, qui sollicitait des dommages-intérêts et des remises de documents rectifiés. La cour rappelle d’abord le cadre légal: « Aux termes de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. » Elle ajoute: « L’article L.1235-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles; que si un doute subsiste, il profite au salarié. »
I. La consécration d’une cause réelle et sérieuse du licenciement
A. La violation des procédures internes d’investigation
La décision retient que le salarié a initié et fait exécuter, par un prestataire extérieur, des opérations de visionnage et d’extraction d’images de vidéoprotection, sans autorisation préalable. La cour estime qu’il s’agissait d’actes d’enquête internes non délégables au regard des règles applicables. Elle souligne l’absence d’urgence, en ces termes sans équivoque: « Aucune urgence ne justifiait que le salarié ne sollicite pas de sa hiérarchie l’autorisation requise. » L’argument tiré d’un précédent échange hiérarchique, plus ancien, ne dispensait pas de respecter les procédures alors en vigueur. La qualification fautive de ce premier grief se trouve ainsi assumée, indépendamment des contestations circonstancielles du salarié.
La même formation, instruisant un second grief relatif à la traçabilité d’un matériel ancien, module toutefois l’appréciation. Elle constate une désorganisation d’ensemble dans les inventaires, neutralisant la charge exclusivement imputée au salarié. Deux affirmations guident l’analyse: « Toutefois, ce défaut de suivi d’un ordinateur s’inscrit dans le contexte d’une désorganisation générale de l’entreprise. » Et encore: « La circonstance que le salarié ait donné des versions différentes et contradictoires ne suffit pas à caractériser un manque de loyauté à l’égard de l’employeur. » Le grief, en ce volet, ne peut donc fonder à lui seul une sanction disciplinaire.
B. L’usage fautif d’un outil professionnel confié
La cour retient qu’un téléphone professionnel a été prêté plusieurs mois à un tiers, puis restitué après réinitialisation intégrale. Elle rappelle la norme interne: « L’article 13 du règlement intérieur prévoit que les téléphones fixes, portables ou de type smartphone ne ‘peuvent être utilisés à des fins personnelles que de manière raisonnable’. » Une telle clause n’autorise ni la dépossession de l’outil de travail, ni sa mise à disposition extérieure, fût-ce à titre temporaire. L’appréciation est nette: « Le comportement du salarié est fautif. » La matérialité des faits résulte de pièces indépendantes, sans qu’un débat linguistique sur une audition interne modifie l’analyse probatoire: « Le grief est donc matériellement établi. »
Rassemblant ces éléments, la solution s’impose dans les termes mêmes de l’arrêt: « Chacun des deux griefs matériellement établis, à lui seul, justifie le prononcé de la mesure de licenciement. » La confirmation s’ensuit, au visa de la décision prud’homale initiale: « Le jugement du conseil de prud’hommes est confirmé en ce qu’il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse. »
II. L’absence de harcèlement moral et l’exécution de l’obligation de sécurité
A. Le contrôle probatoire aménagé et l’insuffisance du faisceau d’indices
La cour rappelle le régime probatoire issu des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, dont elle propose une synthèse performative: « Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. » Dans un premier temps, elle admet que la réunion de certains éléments pourrait franchir le seuil de présomption: « Ces derniers éléments sont matériellement établis et, pris dans leur ensemble, et compte tenu des éléments médicaux produits, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral. »
Dans un second temps, l’employeur renverse utilement cette présomption en démontrant que les décisions critiquées procèdent d’éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement. Les demandes d’explications, le cadrage des processus et le refus de congés au regard des contraintes collectives relèvent du pouvoir de direction légitime. Les écrits produits, d’un ton mesuré, n’excèdent pas les exigences de rigueur requises par des fonctions sensibles. Les documents médicaux, enfin, décrivent un retentissement mais ne prouvent pas, à eux seuls, des agissements prohibés.
B. La prévention comme exécution suffisante de l’obligation de sécurité
La cour rappelle la norme d’exécution attendue, dans une formule de principe: « Respecte l’obligation de sécurité, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail (actions de prévention, d’information, de formation…) et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser. » L’instruction révèle un dispositif de formation, une enquête interne diligentée sans délai, et une réorganisation managériale préventive pour réduire l’exposition des protagonistes.
De ces éléments découle l’appréciation conclusive, fidèle au cadre légal: « Il s’en déduit que l’employeur, en prenant les mesures appropriées pour prévenir une situation de harcèlement moral et, le cas échéant la faire cesser, a rempli son obligation de prévention et de sécurité. » La solution contentieuse se déploie alors naturellement autour de la confirmation du jugement, du rejet des demandes indemnitaires et de l’allocation accessoire des frais irrépétibles. L’arrêt rappelle enfin la règle de répartition: « Les dépens de l’instance d’appel sont à la charge du salarié, partie succombante. »