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Par un arrêt du 11 septembre 2025, la cour d’appel d’Orléans, chambre sociale, censure un licenciement prononcé à la suite du retrait du permis de conduire. Le salarié, engagé comme conducteur routier, avait reçu une lettre de rupture visant une clause contractuelle de résiliation automatique et un prétendu trouble objectif dans l’entreprise. Débouté en première instance par le conseil de prud’hommes de Tours le 4 décembre 2023, il a interjeté appel pour voir constater la nullité, ou à titre subsidiaire l’absence de cause réelle et sérieuse, avec demandes indemnitaires et accessoires. L’employeur sollicitait la confirmation, des dommages-intérêts pour procédure abusive et l’allocation de frais irrépétibles.
La question tenait à la validité du fondement retenu pour rompre le contrat, au regard d’une clause prévoyant la rupture en cas de perte du permis, et à l’obligation de caractériser l’impossibilité de poursuivre l’exécution ou un trouble objectif avéré. La cour répond en retenant l’inefficacité de la clause, l’insuffisante démonstration d’une impossibilité objective, et l’absence de preuve d’un trouble caractérisé. Elle juge in fine qu’« il y a lieu de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse », tout en rejetant la nullité, et règle les conséquences pécuniaires selon le droit positif applicable.
I – La cause réelle et sérieuse face à la perte du permis
A – L’inefficacité de la clause de résiliation automatique
La lettre de licenciement reproduit le schéma classique d’un renvoi à la stipulation contractuelle et à un trouble allégué, en affirmant: « votre contrat de travail inclut une clause de résiliation […] vous n’êtes plus en possession de votre permis […] cela constitue un trouble objectif ». La cour rappelle d’abord un principe ferme, déjà consacré par la jurisprudence: « aucune clause du contrat de travail ne peut valablement prévoir qu’une circonstance quelconque constituera en elle-même une cause de licenciement ». Cette affirmation écarte la tentation contractuelle de prédéterminer la rupture par simple référence à un événement, quand bien même celui-ci affecterait une condition d’exercice de l’emploi.
La mesure de rupture ne peut donc trouver un support autonome dans la clause litigieuse; la cour le dit nettement: « La mesure de licenciement ne peut donc être fondée sur la clause litigieuse ». L’employeur devait, au contraire, démontrer des éléments objectifs caractérisant la cause réelle et sérieuse, indépendamment de la stipulation. Le grief de nullité est par ailleurs rejeté, la clause n’entravant pas l’accès au juge, et les cas de nullité étant strictement énumérés en droit du travail. L’articulation entre validité contractuelle et contrôle judiciaire de la cause aboutit ainsi à dissiper tout effet automatique de la clause de résiliation.
B – L’exigence d’une impossibilité de poursuite et d’un trouble objectivé
L’employeur invoquait l’impossibilité d’exécuter les obligations contractuelles et un trouble dans l’organisation. La cour vérifie la réalité opérationnelle, à la lumière des stipulations permettant l’affectation à d’autres tâches. Elle relève que le salarié a exercé, immédiatement après la rupture, diverses fonctions en entreprise utilisatrice, démontrant la disponibilité d’activités compatibles. D’où la conclusion, décisive: « Il n’est dès lors pas établi qu’à la suite de la décision de retrait de son permis de conduire, le salarié n’était plus en mesure de fournir la prestation inhérente à son contrat de travail et que la poursuite du contrat devenait impossible ».
Le raisonnement est symétrique pour le trouble objectif: la preuve fait défaut. Aucune indication quant à la réorganisation, au remplacement nécessaire, ou aux difficultés concrètes subies. L’insuffisance probatoire scelle l’issue du litige, et la cour infirme le jugement, retenant l’absence de cause réelle et sérieuse. L’analyse s’inscrit dans la ligne d’une jurisprudence qui exige une démonstration circonstanciée, distinguant la perturbation potentielle d’un trouble certain, et appréciant la possibilité d’affectations alternatives lorsque le contrat ou l’organisation le permettent.
II – Les effets indemnitaires et accessoires de la rupture injustifiée
A – L’indemnisation encadrée par le barème et les accessoires de rupture
Une fois l’injustice de la rupture constatée, la cour ordonne les accessoires usuels. Le préavis est dû, car la prestation restait possible durant cette période; l’arrêt énonce que l’employeur, en licenciant avec effet immédiat, a privé le salarié d’exécuter son préavis. S’ensuivent l’indemnité compensatrice de préavis et les congés afférents, ainsi que le solde de l’indemnité de licenciement. Pour l’indemnisation du préjudice principal, la cour valide l’application des textes en ces termes: « Les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail […] permettent raisonnablement l’indemnisation de la perte injustifiée de l’emploi ». La fixation de l’indemnité prend en compte l’ancienneté, la rémunération et les circonstances, conformément au cadre légal et au contrôle de proportionnalité dégagé par la jurisprudence.
Les intérêts moratoires suivent la distinction entre créances salariales et indemnitaires; la capitalisation est ordonnée, la cour indiquant: « Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil ». Enfin, la remise des documents de fin de contrat est ordonnée dans un délai, sans astreinte, mesure de police du jugement adaptée à la situation et à la diligence déjà partiellement apportée.
B – Les autres chefs: solde de tout compte, prime conventionnelle et durée du travail
L’indemnité compensatrice de congés payés est déclarée irrecevable, en raison de l’effet libératoire attaché au reçu non dénoncé dans le délai légal. La motivation est explicite et pédagogique: « Faute de dénonciation par le salarié dans le délai de 6 mois, le reçu pour solde de tout compte a produit son effet libératoire ». Le contentieux des congés se ferme ainsi sur la rigueur procédurale propre à ce mécanisme, dont l’objet est de circonscrire les litiges liés aux sommes versées lors de la rupture.
La prime conventionnelle d’1/47e est refusée, l’intéressé n’étant plus présent au 30 novembre; la privation de chance alléguée se confond avec la perte d’emploi, déjà réparée par l’indemnité principale. Sur le terrain de la santé et sécurité, l’employeur justifie des diligences essentielles, et le lien causal avec les arrêts de travail et l’invalidité postérieure n’est pas établi; la demande est rejetée. En revanche, la cour retient une illégalité dans l’organisation du temps de travail. L’entreprise n’a pas respecté les bornes conventionnelles de la modulation, ce qui conduit à reconnaître un préjudice autonome: « Le salarié a donc été soumis de manière illicite à un régime de modulation ». La réparation, d’un montant mesuré, illustre l’autonomie des atteintes au cadre conventionnel, même en l’absence de dépassements répétés des maxima légaux.
L’action en procédure abusive est enfin écartée par une formule de principe, protectrice du droit d’ester: « L’exercice d’une action en justice constitue en principe un droit », en l’absence de malice, mauvaise foi ou erreur grossière démontrée. Cette mise au point clôt utilement le volet reconventionnel et réaffirme le standard jurisprudentiel relatif à l’abus du droit d’agir.
Ici, la cour articule avec cohérence trois exigences: l’inefficacité des clauses prédéterminant la rupture, la preuve stricte d’une impossibilité ou d’un trouble objectivé, et l’ajustement indemnitaire conforme au cadre légal. La solution, fidèle aux références rappelées, éclaire la pratique: la perte du permis ne dispense pas de rechercher les réaffectations réalistes quand le contrat les prévoit, ni d’étayer concrètement les perturbations alléguées. Elle s’inscrit, par ailleurs, dans une gestion précise des accessoires de rupture et des contentieux connexes, où la technique procédurale du solde de tout compte et la discipline conventionnelle de la durée du travail conservent toute leur portée.