- Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre) LinkedIn
- Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Facebook
- Cliquez pour partager sur WhatsApp(ouvre dans une nouvelle fenêtre) WhatsApp
- Cliquez pour partager sur Telegram(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Telegram
- Cliquez pour partager sur Threads(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Threads
- Cliquer pour partager sur X(ouvre dans une nouvelle fenêtre) X
- Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre) Imprimer
Cour d’appel d’Orléans, 9 septembre 2025, chambre des affaires de sécurité sociale. Le litige oppose un employeur et la caisse sur l’opposabilité d’une prise en charge d’accident du travail. La question tient au périmètre du contradictoire durant l’instruction et au contenu communicable du dossier au regard des articles R. 441-8 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale.
Le 31 janvier 2023, un accident est déclaré le 8 février avec réserves et certificat initial. La caisse ouvre l’instruction, fixe la consultation et les observations du 20 avril au 2 mai 2023, puis décide la prise en charge le 3 mai. La commission de recours amiable rejette le recours. Par jugement du 28 mai 2024, pôle social du tribunal judiciaire de Nevers, l’inopposabilité est prononcée au motif d’une décision rendue sans délai de consultation passive. En appel, la caisse invoque le respect des dix jours francs et l’absence d’exigence d’une phase passive, ainsi que l’inutilité des certificats de prolongation dans le dossier. L’employeur soutient un droit à une consultation sans observation avant décision et l’égalité des armes quant aux pièces médicales. La cour infirme, jugeant que « En conséquence, l’employeur ne peut valablement invoquer une quelconque violation du délai de consultation passive, qui n’est au demeurant pas quantifié par le texte ».
I. Le périmètre temporel du contradictoire dans l’instruction
A. La portée obligatoire du délai de dix jours
Le texte régit une « consultation active » de dix jours francs, puis une faculté de consultation sans observations jusqu’à la décision. La cour cite l’article R. 441-8, selon lequel « Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l’employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d’observations ». Elle en déduit que « Il résulte de ce texte que la décision de la caisse doit intervenir après l’expiration du délai de 10 jours de consultation et d’émission d’observations et avant l’expiration du délai de 90 jours courant à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration de d’accident de travail et du certificat médical initial ». L’articulation de ces délais confirme que seule la période d’observations structure le contradictoire, la phase suivante restant ouverte mais non quantifiée.
La computation en jours francs est précisément rappelée, afin d’écarter toute incertitude sur l’échéance. La cour souligne que « lorsqu’un délai est exprimé en jours francs, il n’est pas tenu compte du jour de l’évènement qui le déclenche ni du jour auquel le délai arrive à échéance ». Elle ajoute que « Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant ». En l’espèce, le report au 2 mai a consacré dix jours francs complets, rendant régulière la clôture des observations à cette date.
B. L’absence d’exigence d’un délai de « consultation passive »
La solution confirme l’absence de délai minimal entre la clôture des observations et la décision, sous réserve du plafond de quatre-vingt-dix jours. La cour affirme nettement : « Rien ne s’oppose en revanche à ce que la décision intervienne dès le lendemain de l’expiration du délai de consultation active, le délai de 90 jours francs étant un délai maximal ». Une exigence de « consultation passive » impérative n’apparaît pas dans le texte, la faculté de consultation postérieure ne se doublant d’aucune durée incompressible.
L’application au cas d’espèce s’ensuit logiquement, au regard de la date de décision intervenue le 3 mai. La cour conclut que « Il en résulte que l’employeur a bien bénéficié d’un délai de consultation et d’observations de 10 jours francs et qu’ainsi la caisse pouvait valablement statuer sur le caractère professionnel de la maladie le 3 mai 2023, peu important qu’il s’agisse du lendemain de la clôture du délai de consultation et d’observations ». L’intérêt pratique est clair pour la sécurité des calendriers d’instruction, sans amoindrir la phase contradictoire prescrite.
II. Le contenu du dossier communicable et ses limites
A. L’exclusion des prolongations du périmètre des pièces faisant grief
La discussion portait sur la communication des certificats médicaux de prolongation au titre de l’article R. 441-14. La cour rappelle que « Le dossier […] comprend : 1°) la déclaration d’accident du travail ou de maladie professionnelle ; 2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ; […] ». Elle s’aligne toutefois sur la jurisprudence qui circonscrit les pièces « faisant grief » à celles éclairant le lien causal. Elle cite que « Il a été jugé que ne figurent pas parmi les éléments susceptibles de faire grief à l’employeur, les certificats ou les avis de prolongation de soins ou arrêts de travail, délivrés après le certificat médical initial, qui ne portent pas sur le lien entre l’affection, ou la lésion, et l’activité professionnelle (2e civ., 16 mai 2024, n° 22-15.499) ».
Le raisonnement est téléologique et cohérent avec la finalité de l’instruction. La cour précise que « le dossier […] vise à permettre à la caisse de statuer sur le caractère professionnel ou non de l’accident, c’est-à-dire de vérifier l’existence d’un lien entre les lésions initialement déclarées et le fait accidentel ». Elle ajoute que « les certificats médicaux de prolongation ne participent en rien à la vérification de ce lien ». Dès lors, « leur absence de communication à l’employeur ne constitue pas une violation du principe du contradictoire, de sorte qu’aucune inopposabilité ne saurait être encoure de ce seul fait ».
B. Portée pratique et équilibre des droits des parties
La solution affine l’égalité des armes en l’indexant sur la pertinence causale des pièces, plutôt que sur une exhaustivité médicale dépourvue d’incidence. L’exclusion des prolongations évite d’alourdir la phase précontentieuse par des documents postérieurs qui n’éclairent pas l’imputabilité, tout en maintenant l’accès aux éléments décisifs sur le lien accidentel. La cour approuve ainsi une économie probatoire strictement finalisée.
L’articulation combinée des deux points dessine une ligne stable en matière de contentieux de l’opposabilité. La procédure reste contradictoire durant les dix jours, puis fluide jusqu’à la décision, sans délai passif imposé. Le filtrage des pièces médicales renforce la lisibilité du dossier, tout en préservant la possibilité de débattre judiciairement des durées d’arrêts, le cas échéant, dans un autre cadre que l’imputabilité initiale.