Cour d’appel de Paris, le 10 juillet 2025, n°23/00211

Rendue par la Cour d’appel de Paris le 10 juillet 2025, l’espèce porte sur le traitement judiciaire d’une situation de surendettement. Elle infirme partiellement la décision du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris du 20 juin 2023, en réévaluant la capacité d’apurement et l’architecture du plan.

Le foyer du débiteur comprend quatre enfants mineurs, un conjoint sans activité et des ressources affectées par un licenciement intervenu en 2025. Des amendes de stationnement ont donné lieu à des saisies récurrentes, tandis que subsistaient un arriéré locatif et diverses dettes de consommation. Un premier plan avait été imposé sur quatorze mois, puis le premier juge avait rééchelonné sur trente-huit mois, au taux de 0 %, avec des mensualités de 795,75 euros.

L’appel a été formé dans le délai légal et déclaré recevable. La juridiction rappelle que « la procédure applicable devant la cour d’appel est donc la procédure orale de droit commun » et, par voie de conséquence, que « la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes ». La question posée tenait au recalibrage de la capacité d’apurement en présence de charges réelles et de barèmes réglementaires, ainsi qu’au périmètre des dettes traitables, notamment quant aux amendes.

La cour réforme la décision entreprise. Elle juge qu’« il convient en conséquence de réformer le plan et de prévoir de nouvelles mesures de désendettement sur une durée de 65 mois au taux d’intérêts réduit à 0 % ». Elle ordonne en outre l’effacement du solde à l’issue de l’échéancier.

I. Le cadre procédural et le calcul de la capacité

A. L’office de la cour en procédure orale

La cour ancre son office dans les règles de la procédure sans représentation obligatoire applicables en appel en matière de surendettement. La précision selon laquelle « la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes » garantit le respect de l’oralité et circonscrit l’instance à ce qui est effectivement soutenu à l’audience. L’économie du litige s’en trouve clarifiée, les prétentions et les pièces non évoquées oralement par les absents ne pouvant être retenues.

La recevabilité de l’appel, formé dans le délai de quinze jours, est confirmée sans difficulté. La conséquence procédurale est double. D’une part, la cour statue dans les limites de l’oralité et du contradictoire réellement établi. D’autre part, elle se trouve en situation de substituer sa propre appréciation aux mesures initialement fixées, sous le contrôle des textes gouvernant le surendettement.

B. La méthode d’évaluation de la capacité d’apurement

La juridiction applique la combinaison des articles réglementaires relatifs au barème et à la prise en compte des charges réelles, adaptée à la composition familiale. Les revenus actuels, composés d’allocations de chômage et de prestations familiales, sont confrontés aux dépenses courantes évaluées selon le barème, outre les charges de logement et de demi-pension. Il en résulte un reste à vivre préservé et une capacité significativement réduite.

Le raisonnement est explicite lorsqu’elle relève qu’« au final la capacité de remboursement de l’ordre de 940,66 euros a fortement diminué puisque le premier juge avait retenu une somme de 1 616 euros ». Cette révision traduit l’incidence du licenciement et des prélèvements antérieurs liés aux amendes, qui ont durablement perturbé la trésorerie du foyer. La cour en tire une conséquence pratique, en alignant l’effort mensuel sur un plafond de 450 euros, inférieur à la capacité comptable, afin de garantir la soutenabilité du plan.

II. Le périmètre et la portée des mesures arrêtées

A. L’exclusion des amendes et ses effets pratiques

En première instance, « le premier juge avait retenu des mensualités maximales de 795,75 euros, à compter du mois d’août 2023, en ce inclus les amendes pénales ». La cour opère un infléchissement net. Elle constate que ces amendes « n’ont pas vocation à figurer au plan » et les mentionne « hors plan ». Cette exclusion est classique en droit du surendettement, les sanctions pécuniaires pénales n’étant pas rééchelonnables dans le cadre des mesures imposées.

La cour ne méconnaît pas pour autant l’impact de ces sommes sur la trésorerie. Elle intègre leur prévisible recouvrement par voie d’avis à tiers détenteur dans l’appréciation globale de la soutenabilité. Le plafonnement à 450 euros ménage l’équilibre entre apurement des dettes civiles et maintien d’un niveau de vie décent, malgré la poursuite du recouvrement des amendes en dehors du plan.

B. La structuration d’un plan soutenable à taux zéro et l’effacement final

La solution retient une durée de soixante-cinq mois, au sein de la borne maximale de sept années, et un taux d’intérêt nul. Le dispositif énonce qu’il est « dit que les dettes sont rééchelonnées sur une durée de 65 mois au taux d’intérêts réduit à 0 % ». Cette neutralisation des intérêts répond à la logique de redressement, en évitant l’aggravation du passif durant l’exécution des mesures.

La portée de l’arrêt tient aussi à la clause de purge terminale. Il est « dit qu’à l’issue de cet échéancier, le solde des dettes est effacé ». L’articulation entre la durée, le taux zéro et l’effacement final manifeste une volonté d’aboutir à un désendettement effectif, proportionné aux facultés contributives actuelles et prévisibles du foyer. Le dispositif rappelle enfin l’inscription au fichier des incidents, les conditions de caducité en cas d’impayé et la substitution des modalités de paiement antérieurement fixées, ce qui parachève un plan cohérent et exécutable.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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