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L’arrêt rendu le 10 juillet 2025 par la cour d’appel de Paris, pôle 1, chambre 3, offre l’occasion d’examiner le régime procédural du désistement d’appel. Cette décision, bien que portant sur une question de procédure civile classique, permet d’illustrer les conditions dans lesquelles un appelant peut mettre fin à l’instance d’appel qu’il a lui-même initiée.
En l’espèce, une société exploitant un établissement hôtelier avait été condamnée en première instance par le président du tribunal de commerce de Paris, statuant en référé le 16 juillet 2024, au paiement d’une provision de 6 593,98 euros ainsi qu’à la restitution de matériel de détection incendie sous astreinte. Elle avait également été condamnée aux dépens et au versement d’une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La société condamnée a interjeté appel de cette ordonnance le 16 septembre 2024. Toutefois, par conclusions remises le 6 décembre 2024, l’appelante a sollicité que son désistement soit déclaré parfait.
L’intimée a constitué avocat mais n’a pas conclu. L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 avril 2025.
La cour d’appel de Paris devait déterminer si le désistement d’appel formé par l’appelante remplissait les conditions pour être déclaré parfait et produire ses effets extinctifs.
La cour a constaté le désistement d’appel et l’a déclaré parfait. Elle a prononcé l’extinction de l’instance et s’est dessaisie du litige, condamnant l’appelante aux dépens.
Cette décision invite à analyser tant les conditions de validité du désistement d’appel (I) que ses effets procéduraux (II).
I. Les conditions de validité du désistement d’appel
A. Le principe de l’admission du désistement en toutes matières
La cour d’appel de Paris rappelle que le désistement d’appel constitue un droit pour l’appelant, consacré par l’article 400 du code de procédure civile. La cour énonce ainsi qu’« en vertu de l’article 400 du code de procédure civile, le désistement de l’appel est admis en toutes matières ». Cette formulation traduit le caractère général du droit de se désister, qui trouve son fondement dans le principe dispositif gouvernant le procès civil. La partie qui a pris l’initiative d’un recours demeure libre d’y renoncer.
Ce principe d’admission du désistement en toutes matières s’inscrit dans une logique de maîtrise par les parties de leur litige. L’appelant qui, après réflexion ou négociation, estime que la poursuite de l’appel ne sert plus ses intérêts, peut mettre fin à l’instance sans avoir à justifier d’un motif particulier. Cette liberté procédurale favorise également le désengorgement des juridictions d’appel.
B. L’absence d’appel incident comme condition du désistement parfait
La cour d’appel précise les conditions dans lesquelles le désistement peut être déclaré parfait, en application de l’article 401 du code de procédure civile. Elle relève que « le désistement de l’appel n’a besoin d’être accepté que s’il contient des réserves ou si la partie à l’égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande ».
En l’espèce, la cour constate que « ce désistement est parfait en l’absence d’appel incident ou de demande incidente ». L’intimée avait certes constitué avocat, mais elle n’avait pas conclu et n’avait donc formé aucune demande propre. Cette absence d’appel incident rendait inutile l’acceptation du désistement par l’intimée.
Cette exigence protège l’intimé qui aurait formé un appel incident. Dans une telle hypothèse, le désistement de l’appelant principal ne saurait priver l’intimé du bénéfice de son propre recours. L’intimé qui a contre-attaqué en relevant lui-même appel partiel a acquis un droit propre à voir son recours examiné.
II. Les effets procéduraux du désistement d’appel
A. L’extinction de l’instance et le dessaisissement de la juridiction
Le désistement d’appel déclaré parfait emporte des conséquences procédurales immédiates. La cour d’appel de Paris « constate l’extinction de l’instance et s’en déclare dessaisie ». Cette formulation traduit la double dimension de l’effet extinctif du désistement.
L’extinction de l’instance signifie que le lien juridique d’instance créé par la déclaration d’appel disparaît. La cour n’a plus à statuer sur le fond du litige ni sur les prétentions des parties. Le dessaisissement de la juridiction en est la conséquence directe : la cour perd toute compétence pour connaître de l’affaire.
La décision de première instance acquiert alors force de chose jugée. L’ordonnance de référé du 16 juillet 2024 ne peut plus être remise en cause par la voie de l’appel. La condamnation au paiement de la provision, l’injonction de restitution sous astreinte et les condamnations accessoires deviennent définitives.
B. La charge des dépens incombant à l’appelant qui se désiste
La cour d’appel fait application de l’article 399 du code de procédure civile en condamnant l’appelante aux dépens de l’instance d’appel. Elle précise que cette dernière « conservera la charge de ses dépens », avant de prononcer expressément dans son dispositif la condamnation aux dépens.
Cette règle de répartition des dépens répond à une logique d’équité. L’appelant qui a pris l’initiative d’un recours puis y renonce doit assumer les frais engendrés par cette procédure avortée. L’intimé, contraint de constituer avocat et de préparer sa défense, ne saurait supporter les conséquences financières d’une instance qu’il n’a pas provoquée et qui n’aboutit pas.
La portée de cette décision demeure limitée au plan doctrinal, dès lors qu’elle se borne à faire application des textes régissant le désistement d’appel. Elle illustre néanmoins le fonctionnement d’un mécanisme procédural qui permet aux parties de mettre fin à l’instance de manière amiable ou unilatérale, sous réserve du respect des conditions légales. Cette faculté de désistement participe d’une conception du procès civil laissant aux parties une large maîtrise de leur litige, tout en préservant les droits procéduraux de l’adversaire lorsque celui-ci a formé des demandes propres.