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Par un arrêt de la cour d’appel de Paris, Pôle 6 – Chambre 7, du 11 septembre 2025, les juges du fond ont statué sur la régularité d’un temps partiel inférieur au minimum légal, la prescription disciplinaire attachée à un abandon de poste, l’étendue des rappels de salaires dus en l’absence de fourniture de travail, l’applicabilité du barème légal d’indemnisation et la caractérisation d’un travail dissimulé. Un salarié, embauché le 25 juin 2018 en CDD à temps partiel de 86 heures mensuelles, a poursuivi la relation en CDI à compter du 25 septembre 2018. Convoqué le 15 juillet 2019, il a été licencié pour faute grave le 2 août 2019, l’employeur imputant un abandon de poste au 3 décembre 2018. Par jugement du 24 mars 2021, le conseil de prud’hommes a, notamment, requalifié le CDD en CDI à temps plein, jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et alloué diverses sommes. L’employeur a interjeté appel, le salarié a formé appel incident sur les rappels de salaires, l’exécution de bonne foi, le barème d’indemnisation et le travail dissimulé. L’arrêt confirme l’absence de cause réelle et sérieuse, écarte la requalification à temps plein tout en retenant un rappel au minimum légal de 24 heures, refuse d’écarter le barème, rejette le travail dissimulé et fixe les créances au passif, avec garantie de l’organisme de garantie des salaires et arrêt des intérêts au jugement d’ouverture.
I. Régime du temps partiel et sanction de l’insuffisance horaire
A. Les mentions obligatoires et la portée de la présomption de temps complet
Les juges rappellent, à titre liminaire, que « le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit qui mentionne notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail convenue, [et] la répartition de la durée du travail ». Ils ajoutent que « en l’absence d’indication […] de la durée exacte de travail convenue et/ou de sa répartition sur la semaine ou le mois le contrat est présumé avoir été conclu à temps complet ». L’espèce révèle un écrit fixant 86 heures mensuelles et une répartition du lundi au vendredi, de 8 h à 12 h, ce qui conduit la cour à retenir un contrat à temps partiel régulier sur ces points, « peu important l’absence de mention du “temps partiel” au contrat ». La carence sur les cas de modification de la répartition et les heures complémentaires n’emporte pas, à elle seule, requalification, la cour précisant que « ce manquement n’est pas de nature à emporter la requalification du contrat en un temps plein ». L’office du juge se concentre donc sur l’économie du formalisme protecteur, en distinguant ce qui affecte l’existence du temps partiel de ce qui n’en compromet que l’exécution.
B. Le minimum de vingt-quatre heures et le choix d’une réparation en salaire
Le cœur du litige tient à la durée contractuelle inférieure au minimum légal. La cour constate que la durée de 86 heures mensuelles ne satisfait pas l’exigence de 24 heures hebdomadaires, faute de dérogation établie, l’initiative alléguée du salarié n’étant pas prouvée et devant, au surplus, « faire l’objet d’un écrit motivé ». Elle fixe alors la sanction en ces termes clairs: « Cette violation de la durée minimum de travail à temps partiel n’entraîne pas la requalification du contrat en un temps plein mais rend bien fondée la demande de rappel de salaire sur la période à hauteur de ce minimum ». La solution, sobre et ferme, privilégie une réparation par équivalent, alignant la rémunération sur 104 heures mensuelles. Elle s’inscrit dans une conception mesurée des nullités et requalifications, réservées aux atteintes structurantes, tout en préservant l’effet utile de la norme par l’octroi d’un rappel chiffré et des congés payés afférents.
II. Rupture, prescription disciplinaire et indemnisation encadrée
A. L’abandon de poste, faute instantanée, et la forclusion de l’action disciplinaire
Après avoir rappelé la définition, « la faute grave […] constitue une violation des obligations […] d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié », la cour précise la temporalité du grief: « l’abandon de poste, à l’inverse de l’absence injustifiée, présente un caractère instantané ». En conséquence, l’article L. 1332-4 du code du travail commande que « la procédure de licenciement » soit engagée dans les deux mois de la connaissance des faits. Or, « la lettre de licenciement du 2 août 2019 vise expressément […] l’abandon […] depuis le lundi 3 décembre 2018 » et « la procédure […] a été initiée […] le 15 juillet 2019, soit 7 mois après ». La forclusion étant acquise, la cause réelle et sérieuse fait défaut. Sur la période non travaillée, la cour rappelle une obligation cardinale: « Le salarié qui se tient à la disposition de son employeur a droit à son salaire, […] c’est à l’employeur de démontrer que le salarié a refusé d’exécuter son travail ». Faute de mise en demeure ou de preuve d’un refus, il est alloué des salaires pour 2019, sous réserve de l’absence du salarié à l’étranger sur une période limitée qu’il reconnaît. L’indemnité de préavis et l’indemnité légale de licenciement sont enfin ajustées, par application linéaire des textes.
B. Le barème d’indemnisation, l’absence d’intention de dissimulation et les garanties périphériques
S’agissant du barème d’indemnisation, la cour juge que « les dispositions de l’article 24 de la charte sociale européenne révisée ne sont pas d’effet direct […] dans un litige entre particuliers ». Elle ajoute que les dispositions légales « sont de nature à permettre le versement d’une indemnité adéquate […] au sens de l’article 10 de la convention n° 158 de l’Organisation internationale du travail », de sorte qu’« il résulte » leur compatibilité. L’indemnité est alors arrêtée à un montant mesuré, au regard de l’âge, de l’ancienneté et des éléments produits, « il convient de lui allouer la somme de 1.500 euros ». La demande d’écarter le barème est donc rejetée, sans dénaturation des standards internationaux.
La qualification de travail dissimulé appelle un élément intentionnel que la cour ne retient pas: malgré des absences non justifiées sur deux bulletins et une méconnaissance du minimum horaire, « il ne découle pas pour autant de ces erreurs une intention de dissimulation du travail exécuté ». La délivrance de documents de fin de contrat au 31 décembre 2018, bien qu’inopérants pour rompre, confirme l’absence de dessein frauduleux. Enfin, les créances sont fixées au passif de la liquidation; l’organisme de garantie des salaires doit sa garantie dans les limites textuelles; les intérêts sont arrêtés au jugement d’ouverture conformément à l’article L. 622-28 du code de commerce. L’ensemble consolide une réparation complète, mais strictement encadrée par les bornes légales et les priorités de la procédure collective.