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La Cour d’appel de Paris, pôle 4 chambre 5, 3 septembre 2025, statue sur l’appel d’une entreprise de construction contre une ordonnance d’irrecevabilité prononcée pour autorité de la chose jugée. Le litige naît d’un chantier d’habitation où l’entreprise, titulaire du lot gros œuvre et gestionnaire du compte prorata, a d’abord réclamé des dépenses communes et une garantie de paiement. Un jugement du tribunal judiciaire de Paris, le 22 mars 2022, a débouté l’ensemble des demandes, tandis qu’un appel demeure pendant. Par une seconde instance introduite en 2023, l’entreprise sollicite le solde du marché, tandis que le juge de la mise en état, le 27 août 2024, a déclaré ces demandes irrecevables pour chose jugée.
La question posée est celle de la portée de l’autorité de la chose jugée lorsque, à partir des mêmes faits, une partie présente successivement des demandes distinctes par leur objet. La cour rappelle que « L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement ». Elle infirme l’ordonnance, juge la demande recevable, et souligne le périmètre précis de l’objet du litige fixé par les prétentions soumises au premier juge.
I. Les limites de l’autorité de la chose jugée sur l’objet non tranché
A. Les conditions cumulatives de l’article 1355 du code civil
La cour reprend le triptyque identité d’objet, de cause et de parties, en insistant sur l’objet réellement jugé. Elle cite utilement le texte suivant: « L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité. » La détermination de l’objet procède des prétentions, conformément à l’article 4 du code de procédure civile: « l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ». L’article 5 est rappelé dans sa fonction régulatrice: « le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ». Ce triptyque commande une lecture stricte du premier jugement, afin de vérifier l’identité exacte de la chose demandée, indépendamment de la proximité factuelle des prétentions en cause.
B. L’absence d’identité d’objet entre dépenses communes et solde du marché
La cour relève que le premier jugement a statué sur des dépenses communes et, reconventionnellement, sur une créance alléguée par le maître d’ouvrage, sans fixer la créance de solde invoquée ultérieurement par l’entreprise. Elle consigne que « Ainsi, il convient de relever que le tribunal n’a pas fixé de créance au titre du solde du marché, ». Cette affirmation neutralise l’argument d’identité d’objet, le solde contractuel n’ayant pas fait l’objet d’un dispositif. L’autorité attachée au premier jugement ne saurait donc éteindre une demande distincte par sa finalité, quand bien même elle naîtrait du même marché et des mêmes faits. La solution se justifie par une stricte fidélité au dispositif, seul vecteur de chose jugée, et par la cohérence des articles 4 et 5 qui organisent l’office du juge autour des seules prétentions effectivement soumises.
II. La compatibilité entre concentration des moyens et pluralité de demandes
A. La concentration des moyens n’impose pas celle des demandes
La cour articule clairement règles de procédure et droit substantiel en rappelant un équilibre acquis par la jurisprudence. Elle souligne, d’une part, le principe selon lequel « Il appartient au défendeur de présenter dès la première instance l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à justifier le rejet total ou partiel des demandes ». Elle précise, d’autre part, une limite décisive: « Néanmoins, il est établi que s’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci, il n’est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ». La distinction classique entre moyens et demandes gouverne ici l’issue. La concentration concerne l’argumentation appuyée sur une prétention déterminée, non l’obligation de former simultanément toutes les prétentions possibles dérivant des mêmes circonstances.
B. Les incidences pratiques pour le contentieux du chantier
Cette solution ménage une voie procédurale pour segmenter des postes de réclamation contractuels, dès lors que l’objet initialement jugé demeure circonscrit. Elle conforte une gestion pragmatique des décomptes, où le rejet d’une prétention reconventionnelle du maître d’ouvrage n’implique pas qu’ait été tranchée la créance positive de l’entreprise. Elle rappelle la rigueur du périmètre décisionnel: « le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ». La recevabilité retenue protège l’accès au juge sans heurter la sécurité juridique, puisque l’identité d’objet n’est pas réalisée. Elle trace enfin une limite claire: seule une décision ayant fixé la créance de solde aurait clos le débat, l’autorité de la chose jugée ne pouvant couvrir ce qui n’a pas été soumis ni décidé.