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Par un arrêt du 4 septembre 2025, la Cour d’appel de Paris statue sur l’appel d’une ordonnance rendue en référé le 15 octobre 2024. Était en cause la désignation d’un administrateur provisoire d’une indivision successorale portant sur une exploitation agricole.
À la suite du décès de l’exploitant, ses héritiers ont assigné en référé pour faire nommer l’un d’eux administrateur de l’indivision, sur le fondement de l’article 815-6. Le président du tribunal judiciaire de Sens a accédé à cette demande et a fixé une mission d’un an, puis l’épouse survivante a interjeté appel.
Devant la juridiction d’appel, l’épouse sollicitait la désignation d’un administrateur neutre, tandis que les héritiers demandaient la confirmation et divers accessoires. La cour a cependant soulevé d’office une fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir du juge des référés.
La question tenait à la compétence procédurale pour nommer l’administrateur d’une indivision: référé de l’article 834 ou procédure accélérée au fond de l’article 1380. La réponse est nette, la cour retenant que « En application des textes précités, le juge du fond, et non pas le juge des référés, a le pouvoir de désigner un indivisaire comme administrateur d’une indivision ».
Elle précise encore qu’« Il lui appartient alors de la déclarer irrecevable et de répondre qu’il n’y a lieu à référé, s’agissant d’une fin de non-recevoir d’ordre public ». En conséquence, l’ordonnance est infirmée et l’action initiale déclarée irrecevable.
Cette solution invite à clarifier le régime procédural applicable à l’article 815-6, puis à mesurer sa valeur et sa portée concrète.
I. Le rétablissement du cadre procédural
A. L’exclusivité de la procédure accélérée au fond
Le code de procédure civile confie à la procédure accélérée au fond les demandes formées sur le fondement de l’article 815-6. L’arrêt relève ainsi que la désignation d’un administrateur relève du juge du fond et requiert l’assignation à une audience dédiée, conformément à l’article 481-1.
La juridiction d’appel synthétise le principe en ces termes: « En application des textes précités, le juge du fond, et non pas le juge des référés, a le pouvoir de désigner un indivisaire comme administrateur d’une indivision ». Les articles 834 et 835 réservent au référé des mesures conservatoires ou de remise en état, sans statuer au fond sur l’organisation durable de l’indivision.
B. La sanction: irrecevabilité d’ordre public et n’y a lieu à référé
Saisi en référé, le juge ne peut statuer au fond et doit se borner à apprécier l’urgence ou l’absence de contestation sérieuse. L’arrêt souligne, à propos de la demande, qu’elle n’entrait pas dans les pouvoirs du juge des référés.
D’où la formule de principe: « Il lui appartient alors de la déclarer irrecevable et de répondre qu’il n’y a lieu à référé, s’agissant d’une fin de non-recevoir d’ordre public ». La motivation précise: « Dès lors, conformément à l’article 125 du code de procédure civile, la cour doit soulever d’office cette fin de non-recevoir ». L’ordonnance est donc infirmée et l’action déclarée irrecevable, sans examen au fond.
Reste à apprécier la valeur de cette solution et ses effets.
II. Valeur et portée de la solution
A. Alignement avec la jurisprudence récente et rationalité procédurale
La solution s’inscrit dans une ligne désormais constante, illustrée par Cass. 3e civ., 28 mai 2025, n° 23-20.769. Elle renforce la séparation des offices en évitant qu’une mesure d’organisation durable ne soit ordonnée en référé.
Le recours à la procédure accélérée au fond assure un débat contradictoire suffisant et une décision exécutoire de droit, mieux adaptée à la gestion d’une exploitation. La clarté du critère confère prévisibilité et évite les contournements par l’urgence invoquée.
B. Incidences pratiques pour les indivisions successorales et le référé
Les praticiens doivent privilégier l’assignation selon l’article 481-1 lorsque la nomination d’un administrateur est envisagée, y compris en contexte agricole. Le référé demeure ouvert aux mesures conservatoires strictement nécessaires, sans toucher à l’organisation de l’indivision.
La décision guide en outre la répartition des demandes accessoires évoquées par les parties, telles que rémunération et flux financiers. Incompétente sur le fond, la juridiction de référé ne pouvait y statuer, d’où le rejet et la répartition équilibrée des dépens et frais irrépétibles.
La voie idoine, clairement réaffirmée, sécurise la mission de l’administrateur ultérieurement désigné et l’opposabilité de ses actes. Elle concilie célérité et stabilité, en confiant l’organisation de l’indivision au juge du fond compétent.