Cour d’appel de Paris, le 8 juillet 2025, n°22/06974

Par un arrêt du 8 juillet 2025, la cour d’appel de Paris confirme le bien-fondé d’une mise à pied disciplinaire d’une journée prononcée pour manquements d’assiduité. Elle confirme le jugement du 3 juin 2022 du conseil de prud’hommes de Villeneuve Saint Georges, qui avait rejeté l’ensemble des demandes du salarié.

Le salarié, engagé en 2008 puis confirmé en 2009, travaillait comme assistant avion au sein d’une entreprise d’assistance aéroportuaire. Convoqué le 8 février 2019 à un entretien préalable fixé au 19 février, il a été ultérieurement sanctionné par lettre du 18 mars d’une mise à pied d’un jour. Les faits reprochés tenaient à un départ anticipé de quarante-cinq minutes le 6 février et à un retard de vingt minutes le 7 février. Le courrier de sanction précisait notamment: « Par acte de clémence, nous ne poursuivons pas la procédure pouvant aller jusqu’au licenciement ».

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 23 mars 2020 pour contester la sanction et solliciter des dommages-intérêts. Le premier juge l’a débouté, décision contre laquelle il a interjeté appel le 15 juillet 2022. En cause d’appel, il soutenait l’absence de preuve de la matérialité, l’existence de représailles et la disproportion de la mesure. L’employeur sollicitait la confirmation, invoquant le respect impératif des horaires et le contenu du règlement intérieur.

La question posée était celle des conditions de justification et de proportion d’une sanction disciplinaire, au regard des articles L.1333‑1 et L.1333‑2 du code du travail. La cour répond en retenant, au vu des pièces versées, que « aucun élément ne permet de remettre en cause la valeur probante des pièces produites par l’employeur, que les faits reprochés sont établis et que la sanction prononcée est proportionnée ». Il est rappelé que le règlement intérieur prévoit que « toute absence ou sortie anticipée non justifiée ou non autorisée constitue une faute pouvant être sanctionnée ».

I. La qualification et le contrôle de la sanction disciplinaire

A. Le cadre légal et la règle du doute

Le rappel des textes éclaire l’office du juge. L’arrêt cite l’article L.1331‑1: « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ». Il reprend ensuite l’article L.1333‑1: « L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. » Il ajoute: « Si un doute subsiste, il profite au salarié ». Enfin, l’article L.1333‑2 est rappelé: « le conseil de prud’hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ». Ces énonciations placent le contrôle sur la justification objective des faits et la proportion de la réponse disciplinaire.

B. L’application aux éléments de fait et l’appréciation de proportion

La cour retient le contenu du règlement intérieur, selon lequel « toute absence ou sortie anticipée non justifiée ou non autorisée constitue une faute pouvant être sanctionnée ». Elle prend appui sur des documents concordants: message hiérarchique relatant un départ non autorisé, plannings établissant l’absence, bulletins confirmant des retards, ainsi qu’un avertissement antérieur non contesté. Au terme de cette analyse, la cour affirme que « aucun élément ne permet de remettre en cause la valeur probante des pièces produites par l’employeur, que les faits reprochés sont établis et que la sanction prononcée est proportionnée ». Le rappel, dans la lettre, que « Par acte de clémence, nous ne poursuivons pas la procédure pouvant aller jusqu’au licenciement » ne fonde pas la solution; il souligne seulement la gradation de la réponse.

II. Portée et appréciation de la solution rendue

A. Le standard probatoire et la charge de la preuve

L’articulation retenue confirme une répartition dynamique de la preuve. L’arrêt rappelle que « L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction », tandis que le salarié doit apporter des éléments contraires pour susciter l’hésitation. La règle protectrice est nette: « Si un doute subsiste, il profite au salarié ». En l’espèce, la cour constate que « aucun élément ne permet de remettre en cause la valeur probante des pièces produites par l’employeur », ce qui neutralise la bascule favorable au salarié. Cette solution incite les entreprises à documenter précisément les manquements, tout en laissant au juge un contrôle vigilant sur la qualité et la cohérence des preuves.

B. Discipline de l’assiduité, proportion et rejet des représailles

L’arrêt s’inscrit dans une logique de gradation de la sanction pour des atteintes à l’assiduité, domaine où la présence à l’heure demeure essentielle. Le rappel du règlement intérieur, combiné à la brièveté de la mise à pied, conduit à une réponse proportionnée, adaptée à des manquements réitérés. Le grief de représailles échoue, faute d’éléments précis et circonstanciés, la cour relevant l’absence d’indice sérieux d’intimidation. Au plan pratique, la solution valide des pièces internes pour établir des manquements, mais n’exclut pas un contrôle, rigoureux, des documents unilatéraux par confrontation et recoupements. Enfin, la référence au courrier, où il est écrit « Par acte de clémence, nous ne poursuivons pas la procédure pouvant aller jusqu’au licenciement », illustre une graduation conforme aux exigences de proportion.

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Hassan KOHEN
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