Cour d’appel de Paris, le 8 juillet 2025, n°24/09769

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Rendue par la cour d’appel de Paris le 8 juillet 2025, la décision confirme un jugement du 28 mars 2018 du tribunal judiciaire de Paris ayant annulé un certificat de nationalité française et dit l’intéressé non français. Le litige porte d’abord sur la régularité de la saisine et des significations, puis sur l’exigence probatoire du lien de filiation maternelle pour une personne née en 1965, au regard des règles de conflit de lois et du régime transitoire de l’ordonnance de 2005 et de la loi de 2006. Après avoir écarté l’exception de nullité, la cour retient que « la seule mention du nom de sa mère dans l’acte de naissance de l’intéressé ne peut établir le lien de filiation » et confirme la perte de force probante du certificat en cause, faute de pièces idoines.

La procédure révèle deux thèses. L’appelant invoquait un manquement au contradictoire et demandait l’annulation du jugement, soutenant avoir été domicilié en France lors des actes de première instance. Le ministère public sollicitait la confirmation intégrale, l’ordonnance de la mention prévue à l’article 28 du code civil et la condamnation aux dépens. La question de droit était double. D’une part, déterminer si les irrégularités de signification justifiaient l’annulation du jugement. D’autre part, préciser si, pour une naissance avant 1988, la filiation maternelle pouvait résulter de la seule désignation dans l’acte de naissance, et quelles conséquences en tirer sur la force probante d’un certificat de nationalité délivré en 2006. La cour répond négativement au premier point et, sur le second, confirme que, pour une personne née en 1965, la filiation maternelle utile à la nationalité doit être établie selon les règles antérieures, la seule désignation dans l’acte n’y suffisant.

I. La régularité procédurale de la contestation du certificat

A. Le grief de nullité et sa couverture par la régularisation ultérieure
La cour rappelle que « la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation fait cesser le grief ». Elle relève encore que, lorsque l’acte introductif n’est pas délivré au dernier domicile connu, la nullité suppose la démonstration d’un grief, ce qui commande une appréciation concrète des diligences accomplies. En l’espèce, l’exception est écartée au terme d’un contrôle sobre, adossé au standard du dernier domicile connu, et articulé avec l’état du dossier.

La motivation s’inscrit dans la logique du contradictoire effectif. La cour constate que le ministère public avait précédemment tenté une signification à une adresse ancienne en France, jugée insuffisante par une décision antérieure, puis a ensuite visé l’adresse étrangère figurant dans les pièces administratives de l’intéressé. Elle retient que l’information disponible lors de l’assignation était limitée, de sorte que la délivrance à l’adresse étrangère constituait, au jour où elle a été faite, une diligence pertinente et suffisante.

B. L’impossibilité d’exiger des recherches excédant les moyens utiles disponibles
La cour souligne que « le ministère public ne disposant pas, à la date de l’introduction de la procédure, d’autre adresse à laquelle assigner l’intéressé », l’irrégularité alléguée n’est pas constituée. Elle ajoute qu’« aucun fichier national ne permettant la communication des données personnelles entre administrations dans les procédures civiles de contentieux de la nationalité », l’office du demandeur ne comprend pas des recherches déraisonnables.

Cette approche privilégie une lecture mesurée des obligations procédurales. Elle limite la nullité aux hypothèses dans lesquelles un grief caractérisé découle d’un manquement objectivement évitable. La solution confirme une tendance constante à contenir la sanction de nullité dans son office curatif, afin d’éviter une paralysie inutile du contentieux de la nationalité, sans affaiblir la protection des droits de la défense.

II. Le régime probatoire de la filiation maternelle applicable aux naissances antérieures à 1988

A. Le droit applicable et la charge probatoire en présence d’un certificat
La cour rappelle d’abord qu’« conformément à l’article 30 du code civil, la charge de la preuve en matière de nationalité incombe à celui qui revendique la qualité de français lorsqu’il n’est pas déjà titulaire d’un certificat de nationalité ». Dès lors que l’intéressé disposait d’un certificat, « il appartient donc au ministère public, en application de l’article 29-3 du code civil, de démontrer que le certificat […] est erroné ou fondé sur de faux documents ». Elle fixe ensuite le droit applicable à la filiation en ces termes: « la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant ». Elle précise la portée temporelle de l’ordonnance de 2005, en retenant que « l’article 91 de la loi n°2006-911 du 24 juillet 2006 précise que [l’article 311-25] n’a pas d’effet sur la nationalité des personnes majeures à la date de son entrée en vigueur ».

Le raisonnement articule clairement le conflit de lois et le régime transitoire. Pour une naissance en 1965, l’établissement de la filiation maternelle ne peut résulter de la seule désignation de la mère dans l’acte de naissance. Il exige les formes prévues par le droit antérieur, telles que reconnaissance ou mariage, selon les règles applicables. La cour juge enfin que « la rédaction du certificat […] ne permettait pas de s’assurer que le greffier […] avait vérifié que le lien de filiation […] était établi », ce qui fragilise la force probante de l’acte.

B. La valeur et la portée de la solution confirmative de la rigueur probatoire
La cour conclut que « la seule mention du nom de sa mère dans l’acte de naissance […] ne peut établir le lien de filiation » et que, faute de pièces conformes aux exigences antérieures, le certificat « a été [délivré] à tort ». La solution maintient une ligne stricte. Elle protège la cohérence du droit transitoire en matière de filiation et nationalité, sans rétroactivité de l’article 311-25 au bénéfice des personnes majeures en 2006.

Cette rigueur présente une double portée. D’une part, elle invite les autorités à vérifier l’existence d’un titre de filiation conforme au droit applicable au jour de la naissance avant toute délivrance de certificat, sous peine d’en priver la force probante. D’autre part, elle éclaire les plaideurs sur la nature des preuves exigées pour consolider une nationalité par filiation antérieure à 1988, en particulier lorsque les actes étrangers comportent une simple désignation. Le contentieux s’en trouve clarifié: la conservation, la production et la cohérence des pièces de filiation déterminent décisivement l’issue, le certificat n’ayant de valeur que par les documents qui l’ont fondé.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

Avocat au Barreau de Paris • Droit Pénal & Droit du Travail

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