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La Cour d’appel de Pau, 17 juin 2025 (1re chambre), tranche un litige opposant deux opérateurs d’infrastructures passives autour de l’opposabilité d’une convention de mise à disposition. La question est bornée par le régime de l’article 1743 du code civil et par l’effet relatif des contrats, dans un marché structuré par l’articulation entre foncier et équipements.
Les faits s’ordonnent simplement. En 2000, un bail authentique de vingt ans, à tacite reconduction, est consenti sur une parcelle supportant un pylône. En 2018, une convention de mise à disposition est signée avec le propriétaire, avec prise d’effet envisagée au terme du bail en 2020. Début 2020, un congé est adressé au locataire en place. En mai 2020, la parcelle est finalement vendue à ce même locataire, au titre d’un droit de préférence.
L’instance débute par une demande d’exécution forcée de la convention de 2018 et d’évacuation des installations. Le Tribunal judiciaire de Pau, 12 décembre 2023, déboute la demanderesse, retient l’inopposabilité de la convention et la renonciation du vendeur à tout congé. L’appelante sollicite l’infirmation, la mise à disposition exclusive du site, l’enlèvement des équipements et une astreinte. L’intimée conclut à la confirmation et, subsidiairement, à la résiliation judiciaire pour impayés.
La question de droit est double. En premier lieu, l’acquéreur peut‑il être tenu par une convention de mise à disposition conclue avant la vente mais dépourvue d’authenticité et de date certaine, et qui ne devait produire effet qu’après la cession ? En second lieu, l’objet du contrat est‑il licite lorsqu’il porte, outre la parcelle, sur des équipements appartenant à un tiers au moment de la convention ? La Cour répond par l’inopposabilité de la convention et par l’illicéité corrélative de l’objet.
I. L’inopposabilité de la convention au regard du droit des baux
A. Effet relatif et exigence de l’article 1743
La motivation ouvre par le principe cardinal de l’effet relatif. La Cour cite que « Il résulte des dispositions de l’ancien article 1165 devenu 1199 du code civil que le contrat ne créé d’obligation qu’entre les parties. » Le rappel est utile : nul tiers n’est tenu sans titre, sauf régime légal dérogatoire précisément circonscrit.
La dérogation en matière de bail est ensuite rappelée dans des termes exacts. La Cour énonce que « Par dérogation à cet effet relatif des contrats, l’article 1743 du code civil prévoit que si le bailleur vend la chose louée, l’acquéreur ne peut expulser le fermier, le métayer ou le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine. » L’exigence est cumulative : un titre probant et une date certaine antérieurement opposable.
La convention de 2018 ne satisfait pas à ce standard probatoire. La Cour relève expressément que « cette ‘convention de mise à disposition’ n’est pas un bail civil authentique ou dont la date est certaine ». L’appelante ne peut donc se prévaloir du texte protecteur, quand bien même l’accord serait antérieur à la vente mais voué à ne produire effet qu’après celle‑ci.
B. La portée des déclarations notariales et la renonciation au congé
La Cour attache une importance décisive aux mentions de l’acte de vente, qui fixent la configuration juridique du bien transmis. Elle relève notamment que le vendeur déclare « qu’il n’a conféré à personne d’autre que l’acquéreur un droit quelconque sur le bien pouvant empêcher la vente (…) ». La garantie de jouissance ainsi structurée exclut tout engagement concurrent.
Le même acte précise encore « qu’il n’a reçu ni délivré aucun congé ». La Cour y voit une manifestation non équivoque de renonciation au congé antérieurement préparé. L’effet est clair : le bail authentique en cours se poursuit à son terme, et l’accord de 2018 demeure sans effet au jour de la cession.
S’y ajoute une clause relative aux occupations dérivées : le vendeur indique « qu’il existe pas de sous-location ni de mise à disposition ». Cette mention neutralise toute prétention à une possession contractuelle antérieurement conférée. L’absence de stipulation de reprise d’engagement dans l’acte parachève l’inopposabilité.
II. Valeur et portée de la solution
A. Une solution cohérente avec les exigences d’opposabilité
La solution convainc par sa cohérence avec le couple effet relatif / article 1743. L’opposabilité au tiers acquéreur suppose un bail authentique ou à date certaine, actif au jour de la cession. Une convention à effet différé, non authentique et non publiée, ne peut primer l’acte translatif, surtout si celui‑ci matérialise une renonciation au congé et garantit l’absence de droits concurrents.
La motivation articule utilement la preuve par l’acte authentique et la temporalité des effets contractuels. Une date certaine postérieure à la cession est inapte à contraindre l’acquéreur, faute d’assiette opposable au jour du transfert. La Cour évite ainsi d’étendre indûment l’article 1743 à des engagements préparatoires ou conditionnels.
La solution se montre également attentive à l’intégrité de la propriété des équipements. En qualifiant l’objet contractuel, la Cour souligne que l’accord porte en partie sur une chose appartenant à autrui, ce qui affecte la licéité de la convention au fond. Elle affirme sans détour que cela « la rend illicite puisqu’elle porte sur la chose d’autrui. »
B. Enseignements pratiques pour les opérateurs d’infrastructures
L’arrêt livre des enseignements clairs pour les opérateurs de sites passifs. Pour sécuriser l’opposabilité à un acquéreur, un bail authentique, à date certaine antérieure, et, le cas échéant, une stipulation expresse de reprise d’engagements dans l’acte de vente, s’imposent. À défaut, une convention à effet futur reste fragile face à un transfert du bien.
La portée de l’acte notarié se révèle déterminante : les déclarations du vendeur, telles que « qu’il n’a conféré à personne d’autre que l’acquéreur un droit quelconque » et « qu’il n’a reçu ni délivré aucun congé », verrouillent la situation juridique au profit de l’acquéreur. Une contradiction documentaire franche aurait été requise pour espérer une opposabilité.
S’agissant de l’objet, l’arrêt rappelle une limite structurante : on ne peut valablement louer ce que l’on ne possède pas. La référence aux équipements appartenant à un tiers disqualifie tout montage conférant des droits sur des infrastructures indépendamment du foncier. L’argument de la nullité partielle se heurte alors à l’atteinte même à l’objet et au prix.
L’ensemble emporte une portée pratique notable dans un secteur concurrentiel. Les conventions de portage sur sites occupés doivent exclure tout droit sur des équipements tiers et viser une prise d’effet juridiquement tenable. À défaut, l’acquéreur muni d’un bail authentique et d’un acte de vente clair demeure hors d’atteinte des prétentions du cessionnaire potentiel.