Cour d’appel de Riom, le 30 juillet 2025, n°25/00421

La tierce opposition constitue une voie de recours extraordinaire permettant à un tiers de contester une décision lui faisant grief. Son exercice soulève des questions procédurales délicates, notamment lorsque le tiers opposant décide de se désister. La Cour d’appel de Riom, dans un arrêt du 30 juillet 2025, a eu à connaître de cette situation particulière.

Une société avait fait l’objet d’un jugement d’ouverture de redressement judiciaire prononcé le 10 décembre 2024 par le tribunal de commerce de Cusset. Un tiers a formé tierce opposition contre ce jugement, sollicitant sa rétractation. Par jugement du 11 février 2025, le tribunal de commerce a déclaré cette tierce opposition infondée et débouté le tiers opposant de sa demande de rétractation. Ce dernier a interjeté appel le 21 février 2025. Le 25 juin 2025, l’appelant a notifié des conclusions de désistement d’instance et d’action. Par courrier du 1er juillet 2025, le mandataire judiciaire de la société, partie intimée, a accepté ce désistement sans réserve.

La question posée à la cour d’appel était de déterminer si le désistement d’appel présenté par le tiers opposant pouvait être déclaré parfait et produire ses effets extinctifs sur l’instance.

La Cour d’appel de Riom, au visa des articles 400 et 401 du code de procédure civile, a constaté le désistement d’instance et d’action et l’a déclaré parfait. Elle a jugé que ce désistement mettait fin à l’instance d’appel et emportait dessaisissement de la cour. L’appelant a été condamné aux dépens.

Le désistement d’appel obéit à un régime juridique précis dont les conditions d’efficacité méritent d’être examinées (I). Cette décision illustre également les effets attachés à un tel désistement dans le contentieux des procédures collectives (II).

I. Le régime juridique du désistement d’appel

L’analyse des conditions de validité du désistement (A) permet de comprendre la vérification opérée par la cour (B).

A. Les conditions de validité du désistement

La cour fonde son raisonnement sur les articles 400 et 401 du code de procédure civile. Elle rappelle que « le désistement d’appel est admis en toutes matières sauf dispositions contraires ». Ce principe d’universalité confère au désistement une grande souplesse procédurale. L’article 401 du code de procédure civile précise les hypothèses dans lesquelles l’acceptation du défendeur est requise. Le désistement doit être accepté lorsqu’il « contient des réserves ou si la partie à l’égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ».

En l’espèce, le désistement ne comportait aucune réserve. L’intimée n’avait pas davantage formé d’appel incident ni présenté de demande incidente. Le désistement aurait donc pu être unilatéral et produire effet sans acceptation. La cour relève néanmoins que l’intimée a accepté ce désistement. Cette acceptation, bien que non nécessaire, conforte la régularité de l’acte.

B. La vérification juridictionnelle de la régularité du désistement

La cour ne se contente pas d’enregistrer le désistement. Elle procède à une vérification méthodique de ses conditions. Elle constate d’abord que le désistement est « formé sans réserve ». Elle relève ensuite l’acceptation de l’intimée. Cette double vérification permet à la juridiction de déclarer le désistement « parfait ».

La notion de désistement parfait renvoie à un acte réunissant l’ensemble des conditions requises pour produire ses effets. Le contrôle juridictionnel garantit la sécurité juridique des parties. Il évite qu’un désistement irrégulier ne compromette les droits des parties. Cette vigilance s’avère particulièrement importante dans le contentieux des procédures collectives où l’intérêt des créanciers doit être préservé.

L’acceptation du désistement établie, il convient d’examiner les effets de cette acceptation sur l’instance.

II. Les effets du désistement en matière de procédures collectives

Le désistement emporte des conséquences procédurales immédiates (A) et laisse subsister le jugement d’ouverture du redressement judiciaire (B).

A. L’extinction de l’instance d’appel

La cour énonce que « le désistement de l’instance, accepté par l’intimée, met fin à l’instance et dessaisit la cour ». Cette formule reprend la lettre de l’article 401 du code de procédure civile. L’extinction de l’instance présente un caractère définitif. La cour ordonne la radiation de l’affaire du rôle.

Le dessaisissement de la juridiction d’appel emporte une conséquence fondamentale. La cour perd tout pouvoir juridictionnel sur l’affaire. Elle ne peut plus statuer sur le fond du litige. Cette règle procédurale protège la cohérence du système juridictionnel. Le désistement constitue ainsi un mode d’extinction de l’instance au même titre que le jugement.

B. La consolidation du jugement d’ouverture de la procédure collective

Le désistement d’appel formulé par le tiers opposant produit un effet substantiel sur la procédure collective. Le jugement du 11 février 2025 ayant rejeté la tierce opposition devient définitif. Par voie de conséquence, le jugement du 10 décembre 2024 ayant prononcé le redressement judiciaire acquiert force de chose jugée à l’égard du tiers opposant.

Cette consolidation du jugement d’ouverture sécurise la procédure collective. Les organes de la procédure peuvent poursuivre leur mission sans craindre une remise en cause de l’ouverture. Les créanciers bénéficient de la stabilité du cadre juridique. Le désistement du tiers opposant manifeste son renoncement définitif à contester le jugement d’ouverture.

La condamnation aux dépens constitue la sanction classique du désistement. Elle fait peser sur l’appelant la charge financière d’une instance qu’il a lui-même initiée puis abandonnée.

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Hassan KOHEN
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