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La Cour d’appel de Rouen, chambre civile et commerciale, 11 septembre 2025, tranche un litige né d’un dépannage urgent d’un rideau métallique, sollicité sans devis préalable. L’appelante conteste l’existence d’un accord sur le prix et impute à l’intervention un dommage électrique ultérieur, tandis que l’intimée réclame le paiement d’une facture établie au temps passé, fournitures en sus.
La procédure a débuté par une injonction de payer du 14 avril 2023, suivie d’une opposition. Le tribunal de commerce de Dieppe, 12 avril 2024, a condamné l’appelante au paiement, outre accessoires, et alloué des dommages et intérêts à l’intimée. L’appel remet en cause le consentement au prix, la réalité des heures facturées, le lien causal avec la panne alléguée, ainsi que la sanction pour résistance abusive.
La question posée tient d’abord à la preuve d’un contrat sans devis, fondé sur une tarification horaire annoncée et acceptée, puis à la causalité des désordres invoqués. La cour confirme l’obligation de payer, refuse l’indemnisation de l’appelante et écarte la demande de dommages et intérêts pour abus, en rappelant la bonne foi contractuelle et la charge de la preuve. Elle souligne que « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. » puis précise immédiatement : « Cette disposition est d’ordre public. »
I. La validation de la créance au regard du consentement et de la bonne foi
A. L’acceptation du mode de facturation dans un contexte d’urgence
L’arrêt retient la formation d’un accord suffisant, malgré l’absence de devis, au vu d’échanges clairs et circonstanciés. La cour rappelle la règle probatoire en ces termes: « Il résulte de ce texte que celui qui réclame le paiement de travaux doit prouver le consentement de l’autre partie à l’exécution de ceux-ci au prix demandé. » L’intimée produit un courriel de commande, explicitant l’urgence et la méthode tarifaire, où il est écrit: « J’ai bien noté que votre prestation sera facturée à l’heure, plus vos fournitures. » L’échange ultérieur, sollicitant « les coordonnées de l’entité à qui nous devons facturer l’intervention de jeudi dernier », conforte l’acceptation du principe de la facturation. La réponse mentionne enfin: « Par ailleurs, je suis toujours dans l’attente que l’on me rappelle pour un problème électrique que vos salariés n’ont pas su résoudre », ce qui atteste l’exécution des travaux et une discussion distincte portant sur un autre incident.
La cour rattache l’ensemble à la bonne foi dans la formation du contrat, exigée par l’article 1104. L’appelante ne peut opposer l’absence de devis, alors qu’elle a exigé une intervention immédiate et admis la tarification horaire. L’économie du contrat résulte ici du besoin impérieux de sécurité et d’exploitation, non d’une offre chiffrée préalable. L’adhésion aux modalités essentielles se dégage des correspondances produites, suffisantes pour caractériser un accord ferme.
B. La justification du quantum facturé et l’inopérance d’une contestation tardive
La cour retient la réalité d’une intervention le 24 février sur la base d’attestations concordantes, de feuilles d’heures et de photographies datées. L’activité du magasin durant les travaux est relevée, ce qui rend peu crédible l’ignorance alléguée de la présence d’une équipe complète sur une journée pleine. La contestation des vingt-et-une heures apparaissant tardive, elle se heurte à des éléments précis, continus et cohérents, réunis dès l’origine.
Dès lors, le prix assis sur un taux horaire accepté, ainsi que sur des fournitures minimes, est valable. Le raisonnement opère une stricte application de la charge probatoire, sans déplacer les exigences légales à la défaveur du créancier. La solution confirme logiquement la condamnation au principal et à la pénalité forfaitaire de recouvrement, dans le strict cadre des textes applicables.
II. L’absence de lien causal et la portée des demandes accessoires
A. La dissociation entre la soudure réalisée et la panne électrique ultérieure
La cour rejette le grief tiré d’une aggravation du dommage, faute d’éléments objectifs. Elle énonce: « Il n’existe, dans les dossiers remis à la cour par les parties, aucun élément permettant de relier d’une quelconque manière la prétendue panne électrique affectant le rideau métallique le 3 ou le 4 mars 2022 et l’intervention du 24 février 2022 n’ayant porté que sur la soudure de ce même rideau. » Elle ajoute de manière décisive: « Aucune présomption de faute et de causalité entre l’intervention et le dommage invoqué ne peut être tirée de l’intervention du 24 février 2022 par rapport au dommage électrique prétendument subi le 3 ou le 4 mars suivant. »
Cette motivation distingue rigoureusement l’objet de la mission, limitée à la soudure, et l’origine non établie d’une panne électrique signalée postérieurement. La chambre refuse d’ériger l’urgence en responsabilité de résultat maximale, sans fondement technique ni lien probant. L’argumentation s’inscrit dans une orthodoxie probatoire constante, respectueuse de la matérialité des tâches effectivement commandées et réalisées.
B. Les effets procéduraux et l’appréciation mesurée de l’abus
L’arrêt prend acte de la chronologie procédurale, puis précise la substitution juridictionnelle propre à l’appel: « Il sera précisé que le présent arrêt se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer qui a été rendue le 14 avril 2023. » La charge des dépens d’appel et l’allocation d’une indemnité au titre de l’article 700 sont logiquement mises à la charge de l’appelante, qui succombe.
La demande de dommages et intérêts pour résistance abusive est écartée, par une motivation de principe. La cour rappelle: « L’exercice d’une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente au dol. » L’existence d’un litige nourri par l’absence de devis et la discussion probatoire exclut la malveillance caractérisée. La solution retient une juste mesure, dissociant le bien-fondé de la créance des conditions restrictives de l’abus, selon une ligne prudente et parfaitement cohérente.