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Par un arrêt de la Cour d’appel de Rouen du 4 septembre 2025, la responsabilité d’un commissaire à l’exécution du plan est discutée à la suite d’un plan de continuation défaillant. L’appel émane d’un créancier chirographaire reprochant l’absence de distribution de fonds issus d’une cession d’actions et la tardiveté d’une requête en résolution du plan. La question posée tient à la qualification fautive, ou non, de ces abstentions au regard des pouvoirs et devoirs du commissaire.
Les faits tiennent à une cession d’actions assortie d’une garantie de passif, suivie d’un redressement judiciaire ouvert le 3 mai 2013. Diverses créances du créancier ont été admises, d’abord le 20 janvier 2016, puis à titre définitif, après fixation par une juridiction d’appel le 13 février 2020 et ordonnance du 28 avril 2021, pour un total de 331 827,17 euros. Un plan de continuation a été arrêté le 3 février 2016, avec versement régulier des dividendes jusqu’en 2020, puis défaut à compter de 2021. Par jugement du 15 septembre 2021, le tribunal de commerce de Lisieux a autorisé une cession de titres pour 826 000 euros, en ordonnant la consignation du prix entre les mains du commissaire, les fonds étant déposés fin décembre 2021. Saisi d’une requête, le tribunal de commerce a résolu le plan le 8 juin 2022 et ouvert la liquidation judiciaire. Par jugement du 25 juin 2024, le Tribunal judiciaire de Rouen a rejeté l’action en responsabilité du créancier contre le commissaire. L’appel interroge la conformité des diligences accomplies, d’une part au regard des règles de répartition des dividendes, d’autre part au regard de l’opportunité temporelle d’une saisine en résolution du plan.
La question de droit tient à la portée d’une consignation ordonnée judiciairement et à ses effets sur les pouvoirs de répartition du commissaire, ainsi qu’à la caractérisation d’une faute par tardiveté à solliciter la résolution du plan. La Cour d’appel répond en confirmant l’absence de faute, en jugeant que la consignation interdisait une distribution unilatérale et qu’une résolution plus précoce n’aurait pas modifié la position du créancier chirographaire. Elle relève notamment que « Il n’est donc pas démontré l’existence d’une faute », tout en prenant appui sur les modalités de la consignation et l’état économique du débiteur.
I. Délimitation des pouvoirs du commissaire et régime de la consignation
A. La consignation ordonnée par le juge exclut toute distribution discrétionnaire
La Cour d’appel s’appuie sur l’économie du plan de continuation et l’autorité de la décision de consignation pour borner les pouvoirs du commissaire. Elle souligne que « A partir du moment où le tribunal avait ordonné la consignation de cette somme entre les mains du commissaire à l’exécution du plan », l’affectation des fonds échappait à toute initiative unilatérale. Elle ajoute de manière explicite que « celui-ci ne pouvait de sa propre initiative affecter le montant de cette somme au paiement des dividendes ». La solution articule la nature de la consignation, assimilable à une affectation spéciale, avec la règle selon laquelle le commissaire ne peut s’immiscer dans la gestion du débiteur redevenu in bonis. Elle en déduit l’absence de pouvoir de répartir des sommes non remises par le débiteur au titre des échéances du plan, ce qui neutralise l’argument tiré d’un prétendu refus de distribution.
La Cour conforte ce raisonnement par la constatation factuelle de l’absence d’alimentation du flux des dividendes sur l’année litigieuse. Elle retient que « Il n’est pas contesté que durant l’année 2021, le commissaire à l’exécution du plan n’a reçu aucune somme ». Ce constat suffit, en droit, à exclure une inexécution fautive des obligations de répartition au sens de l’article L. 626-21 du code de commerce, lequel vise les dividendes effectivement remis. L’exacte délimitation des fonds distribuables résulte ici de la combinaison entre le mécanisme de consignation ordonné et l’absence de remise effective.
B. L’absence de carence fautive dans la saisine en résolution
Le grief subsidiaire tenait au prétendu retard du commissaire pour solliciter la résolution du plan après les premiers impayés. La Cour d’appel replace l’analyse dans le contexte de la cession autorisée, de la consignation décidée, et des perspectives limitées pour les créanciers chirographaires. Elle relève que la requête du commissaire reposait sur une impossibilité objective de poursuite du plan, tirée de la disparition des ressources d’exploitation. Elle cite le motif décisif de la requête, « que la société ne sera pas en mesure de respecter les engagements du plan au motif que le bail à construction a pris fin et que la société ne bénéficie plus des ressources des locations et ne dispose pas d’autres ressources ».
La juridiction retient encore que, quand bien même une saisine antérieure aurait été formée, la résolution serait intervenue à brève échéance et n’aurait pas amélioré la position d’un créancier chirographaire. La structure du passif, où « le passif privilégié s’élève à 652 258,38 € et le passif chirographaire à 484 388,60 € », confirme la neutralité pratique d’une résolution plus précoce sur l’espoir de désintéressement. Faute de lien de causalité entre la date de la requête et un préjudice certain, le grief de retard s’éteint.
II. Valeur normative et portée pratique de la solution
A. Une solution conforme à la lettre des textes et à la fonction de l’organe
L’arrêt s’accorde avec la répartition fonctionnelle des compétences en procédures collectives. Le commissaire applique un plan et répartit les dividendes remis, sans pouvoir s’approprier la conduite de la gestion, ni dévoyer une consignation judiciaire. La décision rejoint la finalité d’une consignation assortie d’une affectation spéciale, laquelle organise l’indisponibilité des fonds à des fins de distribution ciblée. En rappelant que le commissaire ne peut distribuer que les sommes régulièrement remises pendant l’exécution du plan, la Cour maintient une lecture stricte de l’article L. 626-21 et évite une confusion des rôles.
La motivation évite aussi de créer un précédent risqué permettant de contourner une consignation par une réaffectation unilatérale. Elle préserve l’égalité des créanciers dans la perspective d’une liquidation, spécialement lorsque les fonds consignés ont vocation à couvrir d’abord le passif privilégié. La neutralisation du grief de non-réponse formelle à un courrier de relance, isolée de tout préjudice, participe d’une appréciation mesurée des exigences de diligence.
B. Des enseignements pragmatiques pour les créanciers chirographaires
La portée pratique de l’arrêt tient d’abord à la vigilance requise sur la décision de consignation. Si une consignation est ordonnée en cours de plan, la contestation doit viser ses modalités et son affectation, faute de quoi aucune distribution prioritaire n’est envisageable sous l’empire du plan. Le créancier doit donc, le cas échéant, solliciter des précisions sur l’usage des fonds, plutôt que d’imputer au commissaire un pouvoir de répartition qu’il ne détient pas.
Ensuite, l’arrêt rappelle la nécessité de démontrer un préjudice certain et un lien causal, et pas seulement l’existence d’un retard allégué. En matière de plans fragilisés, l’issue liquidative et la hiérarchie du passif peuvent rendre indifférente la chronologie précise de la résolution. La conclusion s’impose avec sobriété, « Il n’est donc pas démontré l’existence d’une faute », ce qui confirme la cohérence de l’ensemble du raisonnement et invite les créanciers à calibrer leurs moyens sur les véritables leviers procéduraux.