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Rendue par la Cour d’appel de Rouen le 4 septembre 2025, l’espèce oppose un salarié protégé par une convention de branche à un licenciement disciplinaire. Engagé en 2016 comme conducteur-receveur, l’intéressé a été congédié en 2022 pour faute simple à la suite d’un accrochage sur le parc de l’entreprise. Un conseil de discipline a été réuni, puis la rupture notifiée. Le juge prud’homal a validé la cause réelle et sérieuse. En appel, la salariée sollicite l’infirmation, l’employeur soutenant l’inapplicabilité de l’article 17 de la convention collective des réseaux urbains, au regard de la convention OIT n°158 et de l’article 49. La question posée tient à la portée effective d’une clause conventionnelle réservant le licenciement des agents titulaires à la faute grave, alors que la période de stage de douze mois est regardée comme déraisonnable. La cour affirme la pleine effectivité de la restriction conventionnelle et énonce que « les agents titulaires ne peuvent être licenciés que pour faute grave et sur avis motivé du conseil de discipline », de sorte que « sans qu’il soit nécessaire d’examiner le bien-fondé des griefs », le licenciement pour faute simple est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
I. La reconnaissance d’une limitation conventionnelle du licenciement des agents titulaires
A. L’interprétation littérale et systémique de l’article 17
La cour mobilise une méthode classique d’interprétation des accords collectifs, rappelant que « une convention ou un accord collectifs, s’ils manquent de clarté, doivent être interprétés comme la loi ». Elle ne s’arrête pas au seul alinéa sur la titularisation, mais lit l’économie des articles 16 et 17, combinés au chapitre sur la rupture. Elle souligne que « les conventions et accords collectifs de travail peuvent limiter les possibilités de licenciement aux causes et conditions qu’ils déterminent », dès lors qu’ils n’interdisent pas toute rupture. Le texte retient une exigence de faute grave, hors hypothèses économiques, et l’adosse à un avis disciplinaire motivé. La lettre est décisive, la finalité confirmative. Le pouvoir de licencier demeure, mais dans un cadre resserré au bénéfice des titulaires.
B. La neutralisation de l’argument tiré de l’OIT n°158
L’employeur invoquait l’assimilation du stage de douze mois à une période d’essai déraisonnable, pour disqualifier l’alinéa préalable de l’article 17. La cour admet le constat, relevant qu’« il est exact que le stage de douze mois tel que prévu par l’article 16 doit être assimilé à une période d’essai au délai déraisonnable ». Elle refuse toutefois l’extension sollicitée, précisant qu’« en tout état de cause cela ne saurait remettre en cause cette restriction au droit de licenciement ». La logique de la protection demeure cohérente: l’employeur évalue durant la première année, puis ne peut rompre pour motif disciplinaire qu’en cas de faute grave. L’argument tiré de l’article 49, relatif aux sanctions de second degré, est écarté car inapte à contredire une règle claire consacrant une condition spécifique de rupture.
II. Valeur normative et implications pratiques de la solution
A. Conformité méthodologique et articulation des sources
La solution s’inscrit dans la hiérarchie des normes et la liberté conventionnelle encadrée. En confirmant une clause limitative explicite, la cour respecte la capacité des partenaires sociaux à aménager les conditions du licenciement. Elle articule la critique internationale de l’essai prolongé avec la survie d’un régime protecteur autonome. La motivation demeure mesurée et rigoureuse, en maintenant la primauté du texte clair sur des inférences systémiques incertaines. Le rappel selon lequel la lecture doit d’abord respecter la lettre puis l’objet renforce la sécurité normative. L’office du juge se borne à rechercher l’intention commune, sans dénaturer le dispositif conventionnel protecteur.
B. Conséquences opérationnelles pour la gestion disciplinaire
La décision trace un partage net des temps et des régimes de preuve. Avant titularisation, l’employeur dispose d’une latitude accrue, sous réserve du respect des standards internationaux. Après douze mois, la faute simple ne suffit plus à rompre, sauf exceptions économiques prévues. La cour en tire la conséquence immédiate, jugeant qu’un licenciement disciplinaire non qualifié de faute grave est dépourvu de cause, et l’indemnise dans le cadre légal. Elle précise encore que « l’article 17 ne constitue pas une clause de garantie d’emploi », et qu’« il n’existe pas en l’occurrence de préjudice moral distinct de celui d’ores et déjà réparé ». La portée pratique est claire: l’entreprise doit caractériser la faute grave et recueillir un avis disciplinaire motivé, faute de quoi la rupture encourt la censure et ses suites indemnitaires et procédurales.