Cour d’appel de Toulouse, le 24 juin 2025, n°23/02268

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Rendue par la Cour d’appel de Toulouse le 24 juin 2025, la décision commente la prescription de l’action du créancier à l’encontre de la caution en présence d’une procédure collective du débiteur principal, ainsi que l’allégation de faute tirée d’une omission dans la déclaration de créance. Les faits utiles tiennent à l’ouverture d’un compte professionnel, à un cautionnement conclu pour cinq ans le 7 mars 2013, à l’ouverture d’une sauvegarde en 2014 suivie d’une liquidation en 2015, à une mise en demeure adressée le 13 mai 2015, puis à la clôture pour insuffisance d’actif le 10 octobre 2016. L’assignation de la caution est intervenue le 12 janvier 2022.

La juridiction commerciale de première instance avait condamné la caution au paiement du solde débiteur et alloué une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. En appel, l’intimée n’ayant pas constitué avocat, la Cour, par application de l’article 472 du code de procédure civile, statue sur le fond. L’appelant soutenait la prescription quinquennale de l’action et, subsidiairement, la faute du créancier pour n’avoir pas indiqué la garantie accessoire dans la déclaration de créance. La question posée porte sur le point de départ et la computation du délai, au regard de l’effet interruptif de la déclaration de créance et de la reprise du délai à la clôture, ainsi que sur l’existence d’une obligation d’information spécifique lors de la déclaration. La Cour infirme le jugement, constate la prescription à la date de l’assignation, rejette la demande de dommages et intérêts, et statue sur les dépens et frais irrépétibles.

I. La prescription de l’action contre la caution en présence d’une procédure collective

A. L’articulation entre obligation de couverture et obligation de règlement

La Cour rappelle le cadre conceptuel du cautionnement, dont la nature personnelle commande de distinguer la couverture et le paiement des dettes garanties. Elle énonce que « la caution est tenue à une obligation de couverture et une obligation de règlement ». La durée convenue borne l’engagement de couverture lorsqu’un terme est stipulé. La motivation précise en ce sens que, « dans le cadre d’un cautionnement à durée déterminée, la caution est seulement engagée jusqu’à la date convenue dans l’acte ».

Cette délimitation temporelle n’épuise pas la question de l’exigibilité des dettes incluses dans la période de couverture. La Cour se réfère à la jurisprudence commerciale relative au compte courant en procédure collective pour situer l’exigibilité au jour de la liquidation. Elle vise « la jurisprudence en vigueur (cf chambre commerciale 13 décembre 2016 n° 14 16037) » pour retenir que l’obligation de règlement naît lorsque le compte est clos par l’ouverture de la liquidation.

B. L’effet interruptif de la déclaration de créance et la reprise du délai à la clôture

Le cœur du raisonnement porte sur l’interruption et la reprise du délai quinquennal de l’article 2224 du code civil à l’égard de la caution. La Cour cite une règle constante : « la déclaration de créance au passif du débiteur principal en procédure collective interrompt la prescription à l’égard de la caution et cet effet se prolonge jusqu’à la clôture de la procédure collective ». Elle se réfère explicitement à « com., 25 octobre 2023, n°22-18.680 » pour asseoir la portée erga cautionem de l’interruption.

À partir des dates de déclaration et de clôture, le calcul est net et rigoureux. La motivation retient que « ainsi un nouveau délai de 5 ans a commencé à courir à compter du 10 octobre 2016 ». L’assignation du 12 janvier 2022 se situe au-delà du terme. La Cour en déduit, dans une formule claire et décisive, que « dès lors le 12 janvier 2022, date à laquelle l’action a été engagée par la banque, cette dernière était prescrite ». La solution, qui infirme le jugement de première instance, s’inscrit dans la continuité des principes gouvernant les effets de la procédure collective sur les accessoires de la créance.

II. La conformité de la solution au droit positif et le rejet de la faute alléguée

A. Une solution cohérente avec les textes et la jurisprudence récente

La qualification d’action personnelle soumise à la prescription quinquennale est conforme à l’article 2224 du code civil. La détermination de l’exigibilité du solde de compte au jour de la liquidation s’accorde avec l’arrêt commercial du 13 décembre 2016, n° 14-16.037. Surtout, l’extension à la caution de l’interruption causée par la déclaration de créance, prolongée jusqu’à la clôture, applique la décision du 25 octobre 2023, n° 22-18.680, en veillant à la sécurité juridique des délais.

La combinaison de ces jalons conduit à une computation lisible, protectrice de la caution sans désarmer le créancier diligent. Le choix du point de reprise à la clôture prévient un cumul d’interruptions artificielles et garantit une prévisibilité raisonnable. La Cour livre ainsi une application pédagogique de la chronologie, au service d’un équilibre constant entre force obligatoire du cautionnement et discipline des délais.

B. L’absence d’obligation d’indiquer la garantie accessoire dans la déclaration de créance

La demande indemnitaire fondée sur une omission alléguée d’information se heurte à l’exigence d’un fondement textuel. La Cour énonce sans ambiguïté qu’« aucun texte n’impose à un créancier d’assortir sa déclaration de créance de l’information selon laquelle sa créance est assortie d’une éventuelle caution personnelle ». Elle constate en conséquence que « la faute alléguée n’est donc pas établie ».

Cette position s’accorde avec l’économie des déclarations de créance, exclusivement tournées vers l’admission au passif et la sauvegarde des droits contre le débiteur. Imposer l’énoncé des accessoires à peine de responsabilité détacherait la déclaration de sa finalité procédurale. Reste que la vigilance de la caution sur ses recours subrogatoires demeure décisive, sans que le juge transforme l’exigence de loyauté en obligation d’information nouvelle. La Cour ménage ici la cohérence du régime, tout en rappelant les bornes de la responsabilité du créancier dans le cadre collectif.

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Hassan KOHEN
Avocat Associé

Hassan Kohen

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